• Friedrich Nietzsche ⋅ « Opinions et Sentences mêlées » ⋅ Humain trop humain 10 07 20

    Le poète fait sem­blant de connaître à fond les dif­fé­rentes pro­fes­sions, comme par exemple celle de géné­ral, de tis­se­rand, de marin et toutes les choses qui les concernent. Il se com­porte comme s’il savait. En expli­quant les des­ti­nées et les actes humains, il a l’air d’avoir été pré­sent, lorsque fut tis­sée la trame du monde : en ce sens c’est un impos­teur. Il accom­plit ses dupe­ries devant des igno­rants — c’est pour­quoi elles lui réus­sissent : ceux-ci le louent de son savoir réel et pro­fond et l’induisent enfin à croire qu’il connaît véri­ta­ble­ment les choses aus­si bien que les spé­cia­listes, qui les…

  • Friedrich Nietzsche ⋅ Par delà le bien et le mal. Prélude d’une phi­lo­so­phie de l’avenir 18 06 17

    De quoi s’occupe en somme toute la phi­lo­so­phie moderne ? Depuis Descartes — et cela plu­tôt par défi contre lui qu’en s’appuyant sur ses affirma­tions — tous les phi­lo­sophes com­mettent un atten­tat contre le vieux concept de l’âme, sous l’appa­rence d’une cri­tique de la concep­tion du sujet et de l’attribut, c’est-à-dire un atten­tat contre le pos­tulat de la doc­trine chré­tienne. La phi­lo­so­phie moderne, en tant que théo­rie scep­tique de la con­naissance, est, soit d’une façon ouverte, soit d’une façon occulte, net­te­ment anti-chré­­tienne, bien que, soit dit pour des oreilles plus sub­tiles, nul­le­ment anti-reli­­gieuse. Jadis, on croyait à l’ « âme », comme on…

  • Friedrich Nietzsche ⋅ Par-delà Bien et Mal 10 07 20

    Les phi­lo­sophes ont cou­tume de par­ler de la volon­té comme si c’é­tait la chose la mieux connue du monde ; Schopenhauer a même lais­sé entendre que la volon­té était la seule chose qui nous fût réel­le­ment connue, entiè­re­ment et tota­le­ment connue, sans sur­plus et sans reste ; mais il me semble tou­jours que Schopenhauer, dans ce cas comme dans d’autres, n’a fait que ce que font d’ha­bi­tude les phi­lo­sophes : il a adop­té et pous­sé à l’ex­trême un pré­ju­gé popu­laire. La volon­té m’ap­pa­raît avant tout comme une chose com­plexe, une chose qui n’a d’u­ni­té que son nom, et c’est dans cette uni­ci­té du…

  • Friedrich Nietzsche ⋅ Par delà le bien et le mal. Prélude d’une phi­lo­so­phie de l’avenir 18 06 17

    Pour ce qui en est de la super­sti­tion des logi­ciens, je veux sou­li­gner encore, sans me lais­ser décou­ra­ger, un petit fait que ces esprits super­sti­tieux n’avouent qu’à contre-cœur. C’est, à savoir, qu’une pen­sée ne vient que quand elle veut, et non pas lorsque c’est moi qui veux ; de sorte que c’est une alté­ra­tion des faits de pré­tendre que le sujet moi est la condi­tion de l’attribut « je pense ». Quelque chose pense, mais croire que ce quelque chose est l’antique et fameux moi, c’est une pure sup­po­si­tion, une affir­ma­tion peut-être, mais ce n’est cer­tai­ne­ment pas une « cer­ti­tude immé­diate ». En fin de…

  • Friedrich Nietzsche ⋅ Par delà le bien et le mal. Prélude d’une phi­lo­so­phie de l’avenir

    Pour par­ler sérieu­se­ment, je crois qu’il y a de bons motifs d’espérer que tout dog­ma­tisme en phi­lo­so­phie — quelle que fût son atti­tude solen­nelle et qua­­si-défi­­ni­­tive — n’a été qu’un noble enfan­tillage et un bal­bu­tie­ment. Et peut-être le temps n’est-il pas éloi­gné où l’on com­pren­dra sans cesse à nou­veau ce qui, en somme, suf­fit à for­mer la pierre fon­da­men­tale d’un pareil édi­fice phi­lo­so­phique, sublime et abso­lu, tel que l’élevèrent jusqu’à pré­sent les dog­ma­tiques. Ce fut une super­sti­tion popu­laire quel­conque, datant des temps les plus recu­lés (comme, par exemple, la super­sti­tion de l’âme qui est encore la cause de la super­sti­tion…

  • Friedrich Nietzsche ⋅ Par delà le bien et le mal. Prélude d’une phi­lo­so­phie de l’avenir

    Il faut faire ses preuves devant soi-même, pour démon­trer que l’on est né pour l’indépendance et le com­man­de­ment, il faut les faire au bon moment. Il ne faut pas vou­loir évi­ter ses épreuves d’essai, bien qu’elles soient peut-être le jeu le plus dan­ge­reux que l’on puisse jouer et qu’en somme il ne s’agit que d’essais dont nous sommes les seuls témoins et dont per­sonne d’autre n’est juge. Ne s’attacher à aucune per­sonne, fût-elle même la plus chère, — toute per­sonne est une pri­son, et aus­si un recoin. Friedrich Nietzsche Par delà le bien et le mal. Prélude d’une phi­lo­so­phie de…