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Müller, Hamlet-machine et autres pièces

Entre la ville de Rome et la ville d’Albe
Il y avait une que­relle pour la domi­na­tion. Face aux que­rel­lants
Se dres­saient en armes, puis­sants, les Etrusques.
Afin de vider leur que­relle avant l’at­taque immi­nente
Se mirent face à face en ordre de bataille
Ceux que mena­çaient un péril com­mun. Les chefs d’ar­mée
S’avancèrent cha­cun devant son armée et dirent
L’un à l’autre : la bataille affai­blis­sant
Vainqueurs et vain­cus, tirons au sort
Afin qu’un homme com­batte pour notre ville
Un homme com­bat­tant pour votre ville
Préservant les autres pour l’en­ne­mi com­mun.
Et les armées frap­pèrent les glaives contre les bou­cliers
Le sort appe­la à com­battre
En signe d’ap­pro­ba­tion et ils tirèrent au sort.
Pour Rome un Horace, pour Albe un Curiace.
Le Curiace était fian­cé à la sœur d’Horace
Et Horace et le Curiace
Furent inter­ro­gés cha­cun par son armée :
Il/Tu est/es fian­cé à ta/sa sœur. Doit-on
Tirer au sort encore une fois ?
Et Horace et le Curiace dirent : Non
Et ils com­bat­tirent entre les rangs des armées
Et Horace bles­sa le Curiace
Et le Curiace dit d’une voix s’é­va­nouis­sant :
Épargne le vain­cu. Je suis
Fiancé à ta sœur.
Et Horace s’é­cria :
Mon épou­sée s’ap­pelle Rome
Et Horace plan­ta son glaive
Dans la gorge du Curiace, et le sang tom­ba sur le sol.
Lorsque dans Rome ren­tra Horace
Sur les bou­cliers de la troupe intacte
Avec sur l’é­paule la tunique
Du Curiace qu’il avait tué
A la cein­ture le glaive-tro­phée, à la main le sien ensan­glan­té
Vinrent à sa ren­contre à la porte de l’Est
D’un pas rapide sa sœur et der­rière elle
Son vieux père, len­te­ment
Et le vain­queur sau­ta des bou­cliers, sous les accla­ma­tions du peuple
Pour rece­voir l’ac­co­lade de sa sœur.
Mais la sœur recon­nut la tunique ensan­glan­tée
Œuvre de ses mains et hur­la et défit ses che­veux.
Et Horace blâ­ma sa sœur endeuillée :
Qu’as-tu à hur­ler et défaire tes che­veux.
Rome a vain­cu. Le vain­queur est devant toi.
Et la sœur bai­sa la tunique ensan­glan­tée et s’é­cria :
Rome.
Rends-moi ce qui était dans ce vête­ment.
Et Horace, dans le bras encore le coup de glaive
Par lequel il avait tué le Curiace
Qu’à pré­sent sa sœur pleu­rait
Planta le glaive, où le sang de celui qui était pleu­ré
N’avait pas encore séché
Dans la poi­trine de celle qui pleu­rait
Et le sang tom­ba sur le sol. Il dit :
Va rejoindre celui que tu aimes plus que Rome.
Voilà pour les Romaines
Qui prennent le deuil de l’en­ne­mi.
Et il mon­tra le glaive deux fois ensan­glan­té à tous les Romains
Et les accla­ma­tions se turent. Des der­niers rangs seule­ment
De la foule spec­ta­trice on enten­dait encore
Des cris, des vivats. Là n’a­vait pas encore été per­çu
L’effroyable. Lorsque dans le silence du peuple le père
Se fût appro­ché de ses enfants
Il n’a­vait plus qu’un enfant. Il dit :
Tu as tué ta sœur.
Et Horace ne dis­si­mu­la pas le glaive deux fois ensan­glan­té
Et le père d’Horace
Regarda le glaive deux fois ensan­glan­té et dit :
Tu as vain­cu. Rome règne sur Albe.
Il pleu­ra sa fille, le visage cou­vert
Étendit sur sa bles­sure la tunique
Œuvre de ses mains, ensan­glan­tée par le même glaive
Et don­na l’ac­co­lade au vain­queur.
Vers Horace à pré­sent
S’avancèrent les lic­teurs, rom­pirent avec fais­ceau et hache
L’accolade, au vain­queur ils enle­vèrent
De la cein­ture le glaive-tro­phée et à l’as­sas­sin de la main le sien
Doublement ensan­glan­té.
Et l’un d’entre les Romains cria :
Il a vain­cu. Rome règne sur Albe.
Et un autre d’entre les Romains répli­qua :
Il a tué sa sœur.
Et les Romains se crièrent les uns aux autres :
Honorez le vain­queur.
Exécutez l’as­sas­sin.
Et des Romains sai­sirent le glaive contre des Romains en que­relle
Si Horace comme vain­queur devait être hono­ré
Ou être exé­cu­té comme assas­sin.
Les lic­teurs
Séparèrent les que­rel­lants avec fais­ceau et hache
Et convo­quèrent le peuple en assem­blée
Et le peuple en dési­gna deux en son sein
Pour sta­tuer sur Horace
Et remit en mains à l’un
Le lau­rier pour le vain­queur
Et à l’autre la hache du bour­reau des­ti­née à l’as­sas­sin
Et Horace était
Entre le lau­rier et la hache
Mais son père se mit à son côté
Le pre­mier quant à la perte et dit :
Spectacle ignoble que même l’Albain
Ne regar­de­rait pas sans honte.
Face à la ville se dressent les Étrusques
Et Rome brise son meilleur glaive.
Vous vous sou­ciez d’elle
Souciez-vous de Rome.
Et l’un d’entre les Romains lui répli­qua :
Rome a beau­coup de glaives.
Aucun Romain
N’est moins que Rome sinon Rome n’est pas.
Et un autre d’entre les Romains dit
et mon­tra du doigt en direc­tion de l’en­ne­mi :
Doublement puis­sant
Est l’Étrusque, si Rome est divi­sée
Par des opi­nions dif­fé­rentes
Dans ce juge­ment inop­por­tun.
Et le pre­mier jus­ti­fia ain­si son opi­nion :
Débat non débat­tu
Alourdit le bras armé du glaive.
Désaccord occul­té
Éclaircit le rang de bataille.
Et les lic­teurs rom­pirent pour la deuxième fois
L’accolade des Horaces, et les Romains s’ar­mèrent
Chacun de son glaive.
Celui qui tenait le lau­rier et celui qui tenait la hache
Chacun de son glaive, si bien que la gauche à pré­sent
Tenait le lau­rier ou la hache et la droite
Le glaive. Les lic­teurs eux-mêmes
Déposèrent le temps d’un regard
Les insignes de leur fonc­tion et mirent
Chacun leur glaive à la cein­ture et prirent
En main de nou­veau fais­ceau et hache
Et Horace se pen­cha
Vers son glaive, ensan­glan­té, qui était dans la pous­sière. Mais les lic­teurs
L’en empê­chèrent avec fais­ceau et hache.
Et le père d’Horace aus­si prit son glaive et allait
Pour ramas­ser de la gauche celui ensan­glan­té
Du vain­queur qui était un assas­sin
Et les lic­teurs l’en empê­chèrent aus­si
Et les gardes furent ren­for­cées aux quatre portes
Et le juge­ment se pour­sui­vit
Dans l’at­tente de l’en­ne­mi.
Et le por­teur du lau­rier dit :
Son mérite efface sa faute.
Et le por­teur de la hache dit :
Sa faute efface son mérite.
Et le por­teur du lau­rier inter­ro­gea :
Le vain­queur doit-il être jugé ?
Et le por­teur de la hache inter­ro­gea :
L’assassin doit-il être hono­ré ?
Et le por­teur du lau­rier dit :
Si l’as­sas­sin est jugé
Le vain­queur est jugé
Et le por­teur de la hache dit :
Si le vain­queur est hono­ré
L’assassin est hono­ré.
Et le peuple regar­da l’un et indi­vi­sible auteur
De ces actes dif­fé­rents et gar­da le silence.
Et le por­teur du lau­rier et le por­teur de la hache inter­ro­gèrent :
Si l’un ne peut être fait
Sans l’autre qui le rend nul et non ave­nu
Parce que le vainqueur/l’assassin et l’assassin/le vain­queur sont un seul et même homme indi­vi­sible
Devons-nous donc des deux n’en faire aucun
En sorte qu’il y ait victoire/assassinat, mais pas de vainqueur/d’assassin
Et que le vainqueur/l’assassin s’appelle per­sonne ?
Et le peuple répon­dit d’une seule voix
(Mais le père d’Horace gar­da le silence)
Voilà le vain­queur. Son nom : Horace.
Voilà l’as­sas­sin. Son nom : Horace.
Beaucoup d’hommes sont dans un homme.
L’un a vain­cu pour Rome en un com­bat au glaive
L’autre a tué sa sœur
Sans néces­si­té. À cha­cun son dû.
Au vain­queur le lau­rier. À l’as­sas­sin la hache.
Et Horace fut cou­ron­né avec le lau­rier
Et le por­teur du lau­rier bran­dit son glaive
Bras ten­du et hono­ra le vain­queur
Et les lic­teurs dépo­sèrent
Faisceau et hache et ramas­sèrent le glaive
Deux fois ensan­glan­té par des sangs dif­fé­rents
Qui était dans la pous­sière et le ten­dirent au vain­queur
Et Horace, la tempe cou­ron­née
Brandit son glaive en sorte qu’il fut visible de tous
Deux fois ensan­glan­té par des sangs dif­fé­rents
Et le por­teur de la hache dépo­sa la hache, et les Romains aus­si
Brandirent cha­cun leur glaive le temps de trois bat­te­ments de cœur
Bras ten­du et hono­rèrent le vain­queur.
Et les lic­teurs remirent leur glaive
A la cein­ture, enle­vèrent le glaive
Du vain­queur des mains de l’as­sas­sin et le jetèrent
Dans la pous­sière d’au­pa­ra­vant, et le por­teur de la hache arra­cha
A l’as­sas­sin le lau­rier de la tempe
Par lequel le vain­queur avait été cou­ron­né et le remit
Dans la main du por­teur du lau­rier et jeta à Horace
Sur la tête l’é­toffe aux cou­leurs de la nuit
Dans laquelle il était condam­né à entrer
Parce qu’il avait tué un être humain
Sans néces­si­té, et les Romains
Remirent tous leurs glaives au four­reau
En sorte que les tran­chants étaient tous recou­verts
Afin que les armes
Avec les­quelles le vain­queur avait été hono­ré
N’aient aucune part à l’exé­cu­tion de l’as­sas­sin. Mais les gardes
Aux quatre portes, dans l’at­tente de l’en­ne­mi
Ne recou­vrirent pas leurs glaives
Et tran­chants des haches res­tèrent décou­verts
Ainsi que le glaive du vain­queur, qui était dans la pous­sière, ensan­glan­té.
Et le père d’Horace dit :
Celui-ci est mon der­nier. Tuez-moi à sa place.
Et le peuple répon­dit d’une seule voix :
Aucun homme n’est un autre homme.
Et Horace fut exé­cu­té avec la hache
Et le sang tom­ba sur le sol
Et le por­teur du lau­rier, à la main
De nou­veau le lau­rier du vain­queur, fri­pé à pré­sent
Parce qu’ayant été arra­ché à l’as­sas­sin de la tempe
Interrogea le peuple :
Que doit-il adve­nir de la dépouille du vain­queur ?
Et le peuple répon­dit d’une seule voix :
Que la dépouille du vain­queur soit expo­sée
Sur les bou­cliers de la troupe, saine et sauve grâce à son glaive
Et ils mirent à peu près ensemble
Ce qui natu­rel­le­ment ne pou­vait plus être uni
La tête de l’as­sas­sin et le corps de l’as­sas­sin
Séparés l’un de l’autre par la hache du bour­reau
Tous deux ensan­glan­tés d’eux-mêmes, pour for­mer la dépouille du vain­queur
Sur les bou­cliers de la troupe, saine et sauve grâce à son glaive
Ne prê­tant pas atten­tion à son sang qui cou­lait sur les bou­cliers
Ne prê­tant pas atten­tion à son sang sur leurs mains et lui enfon­cèrent
Sur la tempe le lau­rier fri­pé
Et lui pla­cèrent dans la main aux doigts cris­pés
Par le der­nier com­bat son glaive ensan­glan­té plein de pous­sière
Et croi­sèrent au-des­sus de lui les glaives nus
Signifiant, que rien n’al­tère la dépouille
D’Horace, qui avait vain­cu pour Rome
Ni la pluie ni le temps, ni la neige ni l’ou­bli
Et prirent le deuil le visage cou­vert.
Mais les gardes, aux quatre portes
Dans l’at­tente de l’en­ne­mi
Ne cou­vrirent pas leur visage.
Et le por­teur de la hache, à la main de nou­veau la hache du bour­reau
Où le sang du vain­queur n’a­vait pas encore séché
Interrogea le peuple :
Que doit-il adve­nir de la dépouille de l’as­sas­sin ?
Et le peuple répon­dit d’une seule voix
(Mais le der­nier Horace gar­da le silence)
Que la dépouille de l’as­sas­sin
Soit jetée aux chiens
Afin qu’ils le déchirent
En sorte que rien ne reste de lui
Qui a tué un être humain
Sans néces­si­té.
Et le der­nier Horace, au visage
Un double sillon de larmes dit :
Le vain­queur est mort qu’on ne sau­rait oublier
Aussi long­temps que Rome règne sur Albe.
Oubliez l’as­sas­sin comme je l’ai oublié
moi le pre­mier quant à la perte.
Et l’un d’entre les Romains lui répon­dit :
Longtemps après que Rome ait régné sur Albe
Rome ne sera pas oubliée ni l’exemple
Qu’elle a don­né ou n’a pas don­né
Soupesant avec la balance du mar­chand le pour et le contre
Ou bien dis­tin­guant net­te­ment faute et mérite
De l’in­di­vi­sible auteur d’actes dif­fé­rents
Craignant la véri­té impure ou ne la crai­gnant pas
Et le demi-exemple n’est pas un exemple
Ce qui n’est pas accom­pli com­plè­te­ment jus­qu’à sa véri­table fin
Retourne au néant à la bride du temps mar­chant en crabe.
Et le lau­rier fut enle­vé au vain­queur
Et l’un d’entre les Romains s’in­cli­na
Devant la dépouille et dit :
Tolère que nous t’ar­ra­chions de la main, vain­queur
Toi qui n’as plus de sen­sa­tions
Le glaive, dont on a besoin.
Et un autre d’entre les Romains cra­cha sur la dépouille et dit :
Assassin, rends le glaive
Et le glaive lui fut arra­ché de la main
Car sa main dans la rigi­di­té de la mort
S’était refer­mée sur le pom­meau du glaive
En sorte qu’il fal­lut bri­ser les doigts
D’Horace, afin qu’il rende le glaive
Avec lequel il avait tué pour Rome et une fois
Pas pour Rome, ensan­glan­té une fois de trop
Afin que d’autres fassent un usage meilleur
De ce dont il avait fait bon usage excep­té une fois.
Et la dépouille de l’as­sas­sin, divi­sée par la hache du bour­reau
Fut jetée aux chiens, afin qu’ils
Le déchirent com­plè­te­ment, en sorte qu’il ne reste rien de celui
Qui avait tué un être humain
Sans néces­si­té, ou pra­ti­que­ment rien.
Et l’un d’entre les Romains inter­ro­gea les autres :
Comment Horace doit-il être nom­mé à la pos­té­ri­té ?
Et le peuple répon­dit d’une seule voix :
Il doit être nom­mé vain­queur d’Albe
Il doit être nom­mé assas­sin de sa sœur
D’un seul souffle son mérite et sa faute.
Et qui nomme sa faute et ne nomme pas son mérite
Qu’il vive comme un chien par­mi les chiens
Et qui nomme son mérite et ne nomme pas sa faute
Qu’il vive aus­si par­mi les chiens.
Et qui nomme sa faute en un temps
Et nomme son mérite en un autre temps
D’une même bouche par­lant autre­ment en des temps dif­fé­rents
Ou bien autre­ment pour des oreilles dif­fé­rentes
Que la langue lui soit arra­chée.
Car il faut que les paroles res­tent pures. Car
Un glaive peut être bri­sé et un homme
Aussi peut être bri­sé, mais les paroles
Tombent dans le mou­ve­ment du monde irrat­tra­pables
Rendant les choses connais­sables ou mécon­nais­sables.
Mortel est à l’homme ce qui est mécon­nais­sable.
Ainsi, ne crai­gnant pas la véri­té impure, éta­blirent-ils
Dans l’at­tente de l’en­ne­mi un exemple pro­vi­soire
De dis­tinc­tion nette, ne dis­si­mu­lant pas le reste
(Der nicht auf­ging im unauf­halt­ba­ren Wandel)
Et ils retour­nèrent cha­cun à son tra­vail, au poing
Avec la char­rue, le mar­teau, l’a­lêne et le crayon d’ar­doise, le glaive.
Zwischen der Stadt Rom und der Stadt Alba
War ein Streit um Herrschaft. Gegen die Streitenden
Standen in Waffen die Etrusker, mäch­tig.
Ihren Streit aus­zu­ma­chen vor dem erwar­te­ten Angriff
Stellten sich gege­nei­nan­der in Schlachtordnung
Die gemein­sam Bedrohten. Die Heerführer
Traten jeder vor sein Heer und sag­ten
Einer dem andern : Weil die Schlacht schwächt
Sieger und Besiegte, lasst uns das Los wer­fen
Damit ein Mann kämpfe für unsere Stadt
Gegen einen Mann, kämp­fend für eure Stadt
Aufsparend die andern für den gemein­sa­men Feind
Und die Heere schlu­gen die Schwerter gegen die Schilde
Zum Zeichen der Zustimmung und die Lose wur­den gewor­fen.
Die Lose bes­timm­ten zu kämp­fen
Für Rom einen Horatier, für Alba einen Kuriatier.
Der Kuriatier war ver­lobt der Schwester des Horatiers
Und der Horatier und der Kuriatier
Wurden gefragt jeder von sei­nem Heer :
Er ist/Du bist ver­lobt deiner/seiner Schwester. Soll das Los
Geworfen wer­den noch ein­mal ?
Und der Horatier und der Kuriatier sag­ten : Nein
Und sie kämpf­ten zwi­schen den Schlachtreihen
Und der Horatier ver­wun­dete den Kuriatier
Und der Kuriatier sagte mit schwin­den­der Stimme :
Schone den Besiegten. Ich bin
Deiner Schwester ver­lobt.
Und der Horatier schrie :
Meine Braut heißt Rom
Und der Horatier stieß dem Kuriatier
Sein Schwert in den Hals, dass das Blut auf die Erde fiel.
Als nach Rom heim­kehrte der Horatier
Auf den Schilden der unver­wun­de­ten Mannschaft
Über die Schulter gewor­fen das Schlachtkleid
Des Kuriatiers, den er getö­tet hatte
Am Gürtel das Beuteschwert, in Händen das blu­tige eigne
Kam ihm ent­ge­gen am öst­li­chen Stadttor
Mit schnel­lem Schritt seine Schwester und hin­ter ihr
Sein alter Vater, lang­sam
Und der Sieger sprang von den Schilden, im Jubel des Volks
Entgegenzunehmen die Umarmung der Schwester.
Aber die Schwester erkannte das blu­tige Schlachtkleid
Werk ihrer Hände, und schrie und löste ihr Haar auf.
Und der Horatier schalt die trauernde Schwester :
Was schreist du und lösest dein Haar auf.
Rom hat gesiegt. Vor dir steht der Sieger.
Und die Schwester küsste das blu­tige Schlachtkleid und schrie :
Rom.
Gib mir wie­der, was in die­sem Kleid war.
Und der Horatier, im Arm noch den Schwertschwung
Mit dem er getö­tet hatte den Kuriatier
Um den seine Schwester weinte jetzt
Stieß das Schwert, auf dem das Blut des Beweinten
Noch nicht getro­ck­net war
In die Brust der Weinenden
Dass das Blut auf die Erde fiel. Er sagte :
Geh zu ihm, den du mehr liebst als Rom.
Das jeder Römerin
Die den Feind betrauert.
Und er zeigte das zwei­mal blu­tige Schwert allen Römern
Und der Jubel vers­tummte. Nur aus den hin­te­ren Reihen
Der zuschauen­den Menge hörte man noch
Heil rufen. Dort war noch nicht bemerkt wor­den
Das Schreckliche. Als im Schweigen des Volks der Vater
Angekommen war bei sei­nen Kindern
Hatte er nur noch ein Kind. Er sagte :
Du hast deine Schwester getö­tet.
Und der Horatier ver­barg das zwei­mal blu­tige Schwert nicht
Und der Vater des Horatiers
Sah das zwei­mal blu­tige Schwert an und sagte :
Du hast gesiegt. Rom Herrscht über Alba.
Er beweinte die Tochter, ver­deck­ten Gesichts
Breitete auf ihre Wunde das Schlachtkleid
Werk ihrer Hände, blu­tig vom glei­chen Schwert
Und umarmte den Sieger.
Zu den Horatiern jetzt
Traten die Liktoren, trenn­ten mit Rutenbündel und Beil
Die Umarmung, nah­men das Beuteschwert
Vom Gürtel dem Sieger und dem Mörder aus der Hand das zwei­fach
Blutige eigne.
Und von den Römern einer rief :
Er hat gesiegt. Rom Herrscht über Alba.
Und von den Römern ein andrer ent­ge­gnete :
Er hat seine Schwester getö­tet.
Und die Römer rie­fen gege­nei­nan­der :
Ehrt den Sieger.
Richtet den Mörder.
Und Römer nah­men das Schwert gegen Römer im Streit
Ob als Sieger geehrt wer­den sollte
Oder gerich­tet wer­den als Mörder der Horatier.
Die Liktoren
Trennten die Streitenden mit Rutenbündel und Beil
Und berie­fen das Volk in die Versammlung
Und das Volk bes­timmte aus sei­ner Mitte zwei
Recht zu spre­chen über den Horatier
Und gab dem einen in die Hand
Den Lorbeer für den Sieger
Und dem andern das Richtbeil, dem Mörder bes­timmt
Und der Horatier stand
Zwischen Lorbeer und Beil.
Aber sein Vater stellte sich zu ihm
Der erste im Verlust, und sagte :
Schändliches Schauspiel, das der Albaner selbst
Nicht ansäh ohne Scham.
Gegen die Stadt stehn die Etrusker
Und Rom zer­bricht sein bestes Schwert.
Um eine sorgt ihr.
Sorgt um Rom.
Und von den Römern einer ent­ge­gnete ihm
Rom hat viele Schwerter.
Kein Römer
Ist weni­ger als Rom oder Rom ist nicht.
Und von den Römern ein ande­rer sagte
Und zeigte mit Fingern die Richtung des Feinds :
Zweifach mäch­tig
Ist der Etrusker, wenn entz­weit ist Rom
Durch ver­schiedne Meinung
In unzei­ti­gem Gericht.
Und der erste begrün­dete so seine Meinung :
Ungesprochenes Gespräch
Beschwert den Schwertarm.
Verhehlter Zwiespalt
Macht die Schlachtreihe schüt­ter.
Und die Liktoren trenn­ten zum zwei­ten Mal
Die Umarmung der Horatier, und die Römer bewaff­ne­ten sich
Jeder mit sei­nem Schwert.
Der den Lorbeer hielt und der das Beil hielt
Jeder mit sei­nem Schwert, so dass die Linke jetzt
Den Lorbeer oder das Beil hielt und das Schwert
Die Rechte. Die Liktoren selbst
Legten aus der Hand einen Blick lang
Die Insignien ihres Amts und steck­ten
In den Gürtel jeder sein Schwert und nah­men
In die Hand wie­der Rutenbündel und Beil
Und der Horatier bückte sich
Nach sei­nem Schwert, dem blu­ti­gen, das im Staub lag. Aber die Liktoren
Verwehrten es ihm mit Rutenbündel und Beil.
Und der Vater des Horatiers nahm sein Schwert auch und ging
Aufzuheben mit der Linken das blu­tige
Des Siegers, der ein Mörder war
Und die Liktoren ver­wehr­ten es ihm auch
Und die Wachen wur­den verstärkt an den vier Toren
Und das Gericht wurde fort­ge­setzt
In Erwartung des Feinds.
Und der Lorbeerträger sagte :
Sein Verdienst löscht seine Schuld
Und der Beilträger sagte :
Seine Schuld löscht sein Verdienst
Und der Lorbeerträger fragte :
Soll der Sieger gerich­tet wer­den ?
Und der Beilträger fragte :
Soll der Mörder geehrt wer­den ?
Und der Lorbeerträger sagte :
Wenn der Mörder gerich­tet wird
Wird der Sieger gerich­tet
Und der Beilträger sagte :
Wenn der Sieger geehrt wird
Wird der Mörder geehrt.
Und das Volk blickte auf den unteil­ba­ren einen
Täter der ver­schie­de­nen Taten und schwieg.
Und der Lorbeerträger und der Beilträger frag­ten :
Wenn das eine nicht getan wer­den kann
Ohne das andere, das es unge­tan macht
Weil der Sieger/Mörder und der Mörder/Sieger sind ein Mann, unteil­bar
Sollen wir also von bei­dem keines tun
So dass da ein Sieg/Mord ist, aber kein Sieger/Mörder
Sondern der Sieger/Mörder heißt Niemand ?
Und das Volk ant­wor­tete mit einer Stimme
(Aber der Vater des Horatiers schwieg):
Da ist der Sieger. Sein Name : Horatius.
Da ist der Mörder. Sein Name : Horatius.
Viele Männer sind in einem Mann.
Einer hat gesiegt für Rom im Schwertkampf.
Ein andrer hat seine Schwester getö­tet
Ohne Notwendigkeit. Jedem das Seine.
Dem Sieger den Lorbeer. Dem Mörder das Beil.
Und der Horatier wurde gekrönt mit dem Lorbeer
Und der Lorbeerträger hielt sein Schwert hoch
Mit ges­treck­tem Arm und ehrte den Sieger
Und die Liktoren leg­ten aus der Hand
Rutenbündel und Beil und hoben das Schwert auf
Das zwei­mal blu­tige mit ver­schie­de­nem Blut
Das im Staub lag und reich­ten es dem Sieger
Und der Horatier mit gekrön­ter Schläfe
Hielt sein Schwert hoch so dass für alle sicht­bar war
Das zwei­mal blu­tige mit ver­schie­de­nem Blut
Und der Beilträger legte das Beil aus der Hand, und die Römer alle
Hielten jeder sein Schwert hoch drei Herzschläge lang
Mit ges­treck­tem Arm und ehr­ten den Sieger.
Und die Liktoren steck­ten ihre Schwerter
In den Gürtel wie­der, nah­men das Schwert
Des Siegers aus der Hand dem Mörder und war­fen es
In den vori­gen Staub, und der Beilträger riß
Dem Mörder von der Schläfe den Lorbeer
Mit dem der Sieger gekrönt wor­den war und gab ihn
Wieder in die Hand dem Lorbeerträger und warf dem Horatier
Über den Kopf das Tuch in der Farbe der Nacht
In die zu gehen er verur­teilt war
Weil er einen Menschen getö­tet hatte
Ohne Notwendigkeit, und die Römer alle
Steckten jeder sein Schwert in die Scheide
So dass die Schneiden alle bedeckt waren
Damit nicht teil­hat­ten die Waffen
Mit denen der Sieger geehrt wor­den war
An der Richtung des Mörders. Aber die Wachen
An den vier Toren in Erwartung des Feinds
Bedeckten ihre Schwerter nicht
Und die Schneiden der Beile blie­ben unbe­deckt
Und das Schwert des Siegers, das im Staub lag, blu­tig.
Und der Vater des Horatiers sagte :
Dieser ist mein letztes. Tötet mich für ihn.
Und das Volk ant­wor­tete mit einer Stimme :
Kein Mann ist ein andrer Mann
Und der Horatier wurde gerich­tet mit dem Beil
Dass das Blut auf die Erde fiel
Und der Lorbeerträger, in der Hand
Wieder den Lorbeer des Siegers, zer­rauft jetzt
Weil von der Schläfe geris­sen dem Mörder
Fragte das Volk :
Was soll ges­chehn mit dem Leichnam des Siegers ?
Und das Volk ant­wor­tete mit einer Stimme :
Der Leichnam des Siegers soll auf­ge­bahrt wer­den
Auf den Schilden der Mannschaft, heil durch sein Schwert.
Und sie füg­ten zusam­men ungefähr
Das natür­lich nicht mehr Vereinbare
Den Kopf des Mörders und den Leib des Mörders
Getrennt vonei­nan­der mit dem Richtbeil
Blutig aus eige­nem beide, zum Leichnam des Siegers
Auf den Schilden der Mannschaft, heil durch sein Schwert
Nicht ach­tend sein Blut, das über die Schilde floss
Nicht ach­tend sein Blut auf den Händen, und drück­ten ihm
Auf die Schläfe den zer­rauf­ten Lorbeer
Und steck­ten in die Hand mit den gekrümm­ten Fingern
Vom letz­ten Krampf sein stau­big blu­tiges Schwert ihm
Und kreuz­ten über ihm die nack­ten Schwerter
Andeutend, dass nichts ver­seh­ren solle den Leichnam
Des Horatiers, der gesiegt hatte für Rom
Nicht Regen noch Zeit, nicht Schnee noch Vergessen
Und betrauer­ten ihn mit ver­deck­tem Gesicht.
Aber die Wachen an den vier Toren
In Erwartung des Feinds
Verdeckten ihre Gesichter nicht.
Und der Beilträger, in Händen wie­der das Richtbeil
Auf dem das Blut des Siegers noch nicht getro­ck­net war
Fragte das Volk :
Was soll ges­chehn mit dem Leichnam des Mörders ?
Und das Volk ant­wor­tete mit einer Stimme
(Aber der letzte Horatier schwieg):
Der Leichnam des Mörders
Soll vor die Hunde gewor­fen wer­den
Damit sie ihn zer­reißen
Also dass nichts bleibt von ihm
Der einen Menschen getö­tet hat
Ohne Notwendigkeit.
Und der letzte Horatier, im Gesicht
Zweifach die Tränenspur, sagte :
Der Sieger ist tot, der nicht zu ver­ges­sende
Solange Rom über Alba herr­schen wird.
Vergesst den Mörder, wie ich ihn ver­ges­sen habe
Der erste im Verlust.
Und von den Römern einer ant­wor­tete ihm :
Länger als Rom über Alba herr­schen wird
Wird nicht zu ver­ges­sen sein Rom und das Beispiel
Das es gege­ben hat oder nicht gege­ben
Abwägend mit der Waage des Händlers gegen einan­der
Oder rein­lich schei­dend Schuld und Verdienst
Des unteil­ba­ren Täters ver­schie­de­ner Taten
Fürchtend die unreine Wahrheit oder nicht fürch­tend
Und das halbe Beispiel ist kein Beispiel
Was nicht getan wird ganz bis zum wirk­li­chen Ende
Kehrt ins Nichts am Zügel der Zeit im Krebsgang.
Und der Lorbeer wurde dem Sieger abge­nom­men
Und von den Römern einer ver­neigte sich
Vor dem Leichnam und sagte :
Gestatte, dass wir aus der Hand bre­chen, Sieger
Dir nicht mehr Empfindendem
Das Schwert, das gebraucht wird.
Und von den Römern ein andrer spie auf den Leichnam und sagte :
Mörder, gib das Schwert heraus.
Und das Schwert wurde ihm aus der Hand gebro­chen
Nämlich seine Hand mit der Totenstarre
Hatte sich ges­chlos­sen um den Schwertknauf
So dass die Finger gebro­chen wer­den muss­ten
Dem Horatier, damit er das Schwert heraus­gab
Mit dem er getö­tet hatte für Rom und ein­mal
Nicht für Rom, das blu­tige ein­mal zu viel
Damit gebraucht wer­den konnte von andern bes­ser
Was gut gebraucht hatte er und ein­mal nicht gut.
Und der Leichnam des Mörders, entz­weit vom Richtbeil
Wurde vor die Hunde gewor­fen, damit sie
Ganz ihn zer­ris­sen, so dass nichts bleibe von ihm
Der einen Menschen getö­tet hatte
Ohne Notwendigkeit, oder so viel wie nichts.
Und von den Römern einer fragte die andern :
Wie soll der Horatier genannt wer­den der Nachwelt ?
Und das Volk ant­wor­tete mit einer Stimme :
Er soll genannt wer­den der Sieger über Alba
Er soll genannt wer­den der Mörder sei­ner Schwester
Mit einem Atem sein Verdienst und seine Schuld.
Und wer seine Schuld nennt und nennt sein Verdienst nicht
Der soll mit den Hunden woh­nen als ein Hund
Und wer sein Verdienst nennt und nennt seine Schuld nicht
Der soll auch mit den Hunden woh­nen.
Wer aber seine Schuld nennt zu einer Zeit
Und nennt sein Verdienst zu ande­rer Zeit
Redend aus einem Mund zu ver­schied­ner Zeit anders
Oder für ver­schiedne Ohren anders
Dem soll die Zunge aus­ge­ris­sen wer­den.
Nämlich die Worte müs­sen rein blei­ben. Denn
Ein Schwert kann zer­bro­chen wer­den und ein Mann
Kann auch zer­bro­chen wer­den, aber die Worte
Fallen in das Getriebe der Welt unein­hol­bar
Kenntlich machend die Dinge oder unkennt­lich.
Tödlich dem Menschen ist das Unkenntliche.
So stell­ten sie auf, nicht fürch­tend die unreine Wahrheit
In Erwartung des Feinds ein vorläu­figes Beispiel
Reinlicher Scheidung, nicht ver­ber­gend den Rest
Der nicht auf­ging im unauf­halt­ba­ren Wandel
Und gin­gen jeder an seine Arbeit wie­der, im Griff
Neben Pflug, Hammer, Ahle, Schreibgriffel das Schwert.
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trad.  Jean Jourdheuil trad.  Heinz Schwarzinger
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p. 29–42