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Ça joue (3/5)

Plus ay desir, crainte d’aultre part sonne.1

At vin­dic­ta bonum vita jucun­dius ipsa.2

1

Quiconque a des yeux pour voir aura l’occasion, foca­li­sant sur le gros de notre cohorte, pro­mo, groupe-classe, géné­ra­tion ; qui­conque fait cré­dit à ses yeux pour­rait esti­mer, au jugé, sans besoin de zoo­mer jusqu’à lire les chiffres sur nos t‑shirts « J’aurai X ans en l’an 2000 » ; qui­conque, levant les yeux juste au-des­sus du Socle com­mun où l’on nous a per­chés, pour­rait consta­ter qu’une majo­ri­té d’entre nous, numé­reuse et com­pacte, a vali­dé, faute de la maî­tri­ser, la com­pé­tence« Je com­mu­nique. », et ses sens ne tra­hi­raient pas qui, ven­ti­lant par sexe et par classe et tom­bant sur un nous plus res­treint mais pas moins assu­ré, consta­te­rait que « J’argumente à l’oral. », l’air facile, pous­sant par­fois le raf­fi­ne­ment jusqu’à « J’adapte mon niveau de langue selon mes inter­lo­cu­teurs et les situa­tions. » Mais ce constat ne pour­rait pas ne pas être dou­blé d’un autre : que c’est pré­ci­sé­ment per­chés, juchés, pleins de mérite et pleins d’honneurs, sur le Socle com­mun de connais­sances et de com­pé­tences (et non bar­bo­tant à son pied dans les encou­ra­ge­ments, ni s’y agrip­pant comme à un radeau dans l’écume) ; que c’est pré­ci­sé­ment juchés, vis­sés, expo­sés sur le Socle que nos com­pé­tences, comme la digni­té de qui vient de se faire shar­ker au milieu du préau, semblent pâles au regard de nos insuf­fi­sances :Je n’ai de dents que pour ma propre chair, de langue que pour ma propre bouche, de bite que pour mes propres doigts.Je ne me connais pas de muscle, sauf peut-être le poi­gnet droit.

Parlons insuf­fi­sance, qua­li­tés déci­sives, dému­ni­tions criantes.

Certifié demi-por­tion depuis la cour d’école, et contem­po­rai­ne­ment diag­nos­ti­qué no life, le pro­jet d’orientation s’appelle Vivre à moi­tié parce que c’est déjà ça. Les larmes, jusqu’ici vaines, sont mises à pro­fit pour divi­ser l’âme : une part qui berce, l’autre qui réveille en sur­saut. Et pour le plan de la jour­née sans lequel il n’y a pas de salut, c’est la divi­sion cou­tu­mière qui s’impose (AM/PM), à condi­tion de s’empêcher de jouir avant treize heures du soir de sa néga­ti­vi­té sans emploi – car Les autres ont une vie., tu sais.

C’est dimanche. Vous êtes dans le chill jusqu’au cou, comme dans un bain mous­sant – par exemple vau­tré sur un mate­las d’acide dans un enche­vê­tre­ment de corps de col­lègues. Ça s’échange des tips et des vues, des reels. Le par­tage est total quels que soient les niveaux de bat­te­rie. Un fris­son com­mu­nau­taire vous par­court, quand tout à coup sans crier ni pré­ve­nir et sans l’avoir pré­mé­di­té une des voix demande, ini­tiant un jeu qui res­semble aux épreuves gra­tuites dont les enfants se font un loi­sir et les adultes une obses­sion : Tu pré­fères qu’une per­sonne sur dix puisse lire dans tes pen­sées ou qu’un clone prenne ta place dans le monde tous les sept ans ? Vous voi­là face une alter­na­tive 1) impro­bable ; 2) qu’aucune néces­si­té ne convoque – trop tard : la machine à rumi­ner sur son sort tourne à plein régime, alors que

Les autres ont une vie., hein, et si à ton image ils ne manquent pas de soi, ils ne sont pas non plus seuls avec leur soi bal­lant : contacts, appels, boxe fran­çaise, DIY, BDSM, auto-défense, Ligue des cham­pions, groupe de lec­ture du Capital… tan­dis qu’abattu chaque jour à la mi-jour­née par une asthé­nie post­pran­diale, nous n’avons jamais eu, et encore qu’une
sai­son, la foi que pour après-midi pis­cine.

(Et le cré­neau matu­ti­nal ? Nos ami·e·s les chômeur·euse·s de caté­go­rie A, B, C, savent depuis long­temps qu’il est consa­cré à dire à des gens qui disent qu’on ne veut pas ce qu’on peut qu’en fait on ne peut
pas ce qu’on veut : Actes posi­tifs de recherche d’emploi. – pré­fère l’impair, ça tient éveillé.)

2

L’offre escha­to­lo­gique était déplo­rable.

  1. En fai­sant ce que tu dois, tu feras le tri dans ce que tu peux, et tu te lais­se­ras ensei­gner ce que, au fond, tu veux vrai­ment.
    — Mouais…
  2. En fai­sant ce que tu peux (ton maxi­mum), tu feras ce que tu dois (car on ne peut exi­ger de toi plus et mieux que ton maxi­mum), et tu n’auras pas eu à te poser la ques­tion de ce que tu vou­lais.
    — Bof.
  3. En fai­sant ce que tu veux (à ta guise plu­tôt que selon ta volon­té), tu feras ce que tu peux (et c’est quand tu es le mieux dési­rant que tu es le plus puis­sant), et tu auras en fin de compte fait ce que tu devais (mais tu ne t’en ren­dras compte qu’à la fin).
    — J’y réflé­chis et je vous rap­pelle.

Le pro­blème avec les récits de sau­ve­tage, ce n’est pas tant qu’ils s’enchaînent à toute blinde ou se super­posent de sorte que le cata­logue est vite illi­sible – un cer­tain flou quant à son sort passe même pour la condi­tion d’une bonne aven­ture. Le pro­blème avec les récits de sau­ve­tage, c’est plu­tôt qu’on vous les pré­ten­dra dis­po­nibles, au choix, à la carte, sur la Base du Volontariat (qui n’est pas une zone flou­tée dans le désert néva­dien, mais une sta­tion du cœur de chaque Républicain), alors que de toute évi­dence il est facile de consta­ter qu’ils ne sont pas dis­po­nibles comme ça, au sens où on pour­rait y pio­cher et se com­po­ser une rai­son éclec­tique com­po­sée de rai­sons de se lever le matin et conti­nuer à vivre ; ils sont dis­po­nibles au sens où il faut s’en choi­sir un et s’y tenir, ou alors en chan­ger mais pas trop sou­vent, et accom­pa­gner ces chan­ge­ments d’une dra­ma­tique de conver­sion : trom­bones, caisse claire, marée d’archets syn­chro­ni­sés, ou : sou­daine écla­tante varia­tion de registre – bavard deve­nu taci­turne, toxi­co­mane ascète, brave gar­çon meur­trier de masse, demi-por­tion super-héros c’est par­ti, on gonfle la poi­trine, on pousse sur ses jambes, sky is no limit, JE METS MES CHAUSSURES JE METS MA CULOTTE JE METS MA CHEMISE JE METS MON CHAPEAU JE METS MA SOUS-DOUDOUNE JE PRENDS MON UZI et à trois je vais FAIRE DU BIZNESS un, deux, trois : confor­té dans son être de n’être ni plus que TOUT ni moins que rien, on réac­corde sa per­sonne à la per­sonne du monde, on cale ses propres formes sur celles de l’orbe inté­gral, ni plus ni plus moins, pas trop haut pas trop bas comme un cul qui épouse, qui ven­touse par­fai­te­ment la lunette des chiottes, et c’est ain­si que, le cul bor­dé, le torse beur­ré du conten­te­ment d’avoir un monde à soi, à soi ajus­té, pour soi cali­bré, on sort sur le per­ron du monde pour annon­cer que c’est FINI DE JOUER, CAPS LOCK ON, amok ver­bal, fin des paroles à blanc main­te­nant je vais FAIRE ok ? je vais FAIRE PREUVE D’INITIATIVE je vais TUER LA CONCURRENCE je vais CRÉER UNE ENTREPRISE ok ? – et on s’apprête avec éclat, comme tout phra­seur au futur proche s’étant sup­po­sé un public, on s’apprête avec toute notre nou­velle ambi­tion dont le monde est l’écrin, la niche, la forme idoine, à
MONTER UN BIZNESS – une ques­tion de quelques années, un cur­sus un peu coû­teux mais expresse, et sûr, la voie royale on y est né tkt, je vais OUVRIR UN COMPTE PRO je vais LAISSER LES AUTRES DANS LE RÉTRO, après tout je suis un bour­geois, c’est pour ça qu’on m’a fait, c’est pour ça que je suis venu au monde, on voit bien que la plu­part ils n’y sont pas vrai­ment ; on les a fou­tus là sans cher­cher à savoir et ils n’essaient même pas, ils s’agitent autour du pro­jet d’accéder au cré­dit et de poser des RTT, c’est ridi­cule, c’est ter­ri­fiant, ça suf­fit c’est fini main­te­nant, je vais CRÉER UN BESOIN UNE INTERDÉPENDANCE UNE CONNEXION IRRÉMÉDIABLE et ma vie accom­plie sera une faciale inté­grale à la face du monde inté­gral.

L’essentielNous prîmes SIRET
comme nos pères pre­naient femme.

3

Je compte sur mes doigts (dif­fi­cile au-delà de 20).Je compte sur mes forces (jamais au-delà de 1).Je recompte mes points à la récré jusqu’à la fin de la récré.(comme Lutgarde de Tongres, future sainte qui, crai­gnant régu­liè­re­ment d’avoir bafouillé sa prière (et qu’une prière bafouillée fût irré­gu­lière), réci­tait plu­sieurs fois chaque prière du jour, de sorte qu’à la fin d’une prière exi­gée par telle heure, elle était ren­due sur le seuil de l’heure de la sui­vante.)
Je suis le même per­so à chaque reboot matu­ti­nal

LE SCRUPULEUX PETIT COMPTABLE

, comp­tant recomp­tant tout le cours jusqu’au quart de point, cher­chant la faille dans le barème, le mou dans la consigne, la moindre occa­sion de grap­piller ; et la nuit pareil comp­tant recomp­tant jusqu’au moindre mou­ton de l’exercice hyp­na­go­gique, puisqu’au moment tant espé­ré du com­men­ce­ment du lâcher prise, la frayeur nous prend d’en avoir sau­té un ; ou alors on s’égare dans la consi­dé­ra­tion des par­ti­cu­la­ri­tés de chaque mou­ton, le mou­ton géné­rique sur lequel repose l’efficacité de la méthode s’effritant en une série de mou­tons tou­jours plus sin­gu­liers, et de sin­gu­liers tou­chants, et de tou­chants atta­chants, et voi­là que nous voi­là, 00h43 au comp­teur, qui au lieu de dor­mir nous angois­sons d’avoir déve­lop­pé un nou­veau faible émo­tif pour une bête à poil. (Nous sommes de la pre­mière géné­ra­tion du mignon, celle pour qui est bel et bon ce qui est inno­cent des yeux, c’est-à-dire sur­tout igno­rant de sa condi­tion, et nous avons glo­ba­le­ment tou­jours jugé des bon­tés et des beau­tés sur ce mode : S’il ne sait pas qu’il est beau, il est d’autant plus beau.S’il ne se rend pas compte qu’il est bon, il est meilleur d’autant.Toute conscience mani­feste d’être l’un ou l’autre gâchait la qua­li­té en annu­lant la ver­tu.)

Au début du 20e, lors d’interrogatoires qui ser­vi­ront à éta­blir les tests d’âge men­tal, des petits Parisiens nor­maux de dix à douze ans, qui sou­vent n’ont jamais vu ni un papillon, ni même la Seine, tentent de répondre à une ques­tion simple :« — Quelle dif­fé­rence y a‑t-il entre le papier et le car­ton ?— L’autre, c’est du papier ; l’autre, c’est du car­ton aus­si.— Non.— Le papier c’est blanc ; y’en a aus­si qu’est blanc du car­ton.— Non. »Et à la ques­tion de la dif­fé­rence entre une mouche et un papillon :« — La mouche n’est pas faite comme le papillon.— Précisez.— La mouche vole ; le papillon aus­si. »

Une lec­ture lit­té­rale (symp­to­male ?) de ces réponses – obtuses en appa­rence en ce qu’elles semblent amal­ga­mer dif­fé­rence et res­sem­blance – révé­le­rait peut-être une véri­té idio­ma­tique supé­rieure, aus­si expri­mant, dans son accep­tion de cour d’école, autant la dis­tinc­tion que la simi­la­ri­té, et moi aus­si une pro­tes­ta­tion de sin­gu­la­ri­té aus­si vive, aus­si valide, aus­si fon­dée que « moi plus » ou « moi d’abord » – comme tendent à le prou­ver cer­tains usages de pointe :
« Eh ben moi aus­si d’abord. »

4

Avant, avant, et même avant avant, les gens ne vou­laient que ce qu’ils pou­vaient ; du coup ils pou­vaient tout ce qu’ils vou­laient. L’orgueil était impos­sible, de même que la frus­tra­tion. Nulle schize, zéro nudge. La volon­té mor­dait l’action, d’ailleurs c’était sa queue. Vivre éga­lait agir, et ça suf­fi­sait à être soi-même. De nos jours, pour la per­sonne P1, c’est poème confes­sion­nel ou TED Talk – glo­rieux symp­tôme ou fail bet­ter… Comment vou­lez-vous qu’on VEUILLE

?

Ah mais que tu le veuilles ou non tu auras été un né-puis-mort-quelque-part-à-deux-moments-don­nés et, quels que soient tes efforts pour ne pas bou­ger, cette simple tra­jec­toire aura attes­té un mou­ve­ment. Avoir été chaque jour plus-près-de-la-fin-que-la-veille aura été ton œuvre en vue de te sau­ver. Souvent nous crûmes pou­voir – gar­dant le lit, cou­pant le tél, par­tant éle­ver des chèvres dans le Cantal… – éga­ler la belle impas­si­bi­li­té de la nature et ne pas avoir à comp­ter. Souvent nous crûmes pou­voir ne pas avoir à faire. Mais de jour en jour tu t’es réveillé plus vieux, la barbe plus four­nie, les poils plus longs dans tes oreilles. La nature est en toi ; elle y res­te­ra. Elle n’engraissera pas le jar­din des rai­sons d’être. Elle ne ren­floue­ra pas le parc des rai­sons d’agir. Elle n’aidera pas à évi­ter les des­tins qui frôlent, et pas que rétros­pec­ti­ve­ment :Sans vie de 13 à 93 ans, puis la mort.Fatale crise d’épilepsie après 35 h sur Half-life.Incel de forum Aviation sui­ci­dant avec lui les 20 % les plus bg de la pro­mo, plus ou moins altruis­te­ment puisque s’ils sont ce qu’ils sont c’est qu’ils sont de[C]es autres [qui] ont une vie., ayant leur vie comme ils ont leur beau­té : sans y pen­ser

– alors qu’il ne nous faut pas, nous, beau­coup plus de 2 choix pour, comme poly-aller­gique devant la carte des des­serts, nous mettre à la tor­ture qu’on appel­le­ra chi­po­ter :Nous vou­drions ne vou­loir que ce que nous pou­vons, sans avoir le sen­ti­ment de jamais le devoirmais nous ne pou­vons pas savoir ce que nous pou­vons avant d’avoir essayé de le pou­voir,et nous ne pou­vons pas essayer de le pou­voir sans avoir vou­lu le pou­voir. Ô ! Combien de degrés abrupts, com­bien de virages ser­rés nous séparent de l’action dont nous sommes présumé·s capable·s, de l’accomplissement qui égale la valeur qu’on se ou qu’on nous prête dans le monde, qui réa­lise les capa­ci­tés dont on déplo­rait l’inexploitation sur les bul­le­tins sco­laires ?

5

Ce que nous devrions : le maxi­mum.Ce que nous pour­rions : mieux.Ce que nous vou­drions : autant pour le même prix.Ce que nous devrions vou­loir : plus.Ce que nous vou­drions pou­voir : plus.Ce que nous devrions savoir : les efforts fini­ront par payer.Ce que nous sau­rions si nous pou­vions y croire : rien de sal­va­teur que des récits de sau­ve­tage.

Et voi­là que, à force et à l’occasion d’embarras de ce genre, com­mence à s’exhiber, de nous, un contour figu­rable. Notre tra­vail : ne jamais en tra­cer les bords, au risque de se faire une place sur le par­king des exis­tences ou au musée des formes de vie. On nous a forgé·s dans l’école, sa cour ; de là nous tenons notre unique cer­ti­tude : la ven­geance est meilleure que la vie (meilleure affaire, meilleur goût dans la bouche) ;
et voi­là que prend forme, in-sen­si­ble­ment, c’est-à-dire dans la région basse de notre per­cep­tion tou­jours prise de vitesse par les len­teurs cos­miques, par les len­teurs nature (lunai­sons, feuillai­sons, matu­ra­tions, révo­lu­tions…) ;
voi­là que s’impose le pro­nom qui com­prime et résume, qui lexi­ca­lise le refuge, le retrait, la séces­sion pru­dente et presque inaper­çue ;
voi­là que se déclare le sujet du pro­nom qui démarre les for­mules par les­quelles une dam­na­tion se fait choix, un stig­mate est retour­né, bran­di au centre de la cour comme le scalp du DJ de la ker­messe ;
voi­là que nous en venons, parais­sant, para­dant, com­pa­rais­sant mine de rien (mais l’air d’avoir une opi­nion sur nos juges et per­sé­cu­teurs) ;
voi­là que nous en venons à dire (c’est-à-dire à pro­cla­mer mine de rien)

NOUS LES [NIN-NIN-NIN-NIN]
point d’exclamation caps lock on

voi­là que nous voi­là gagné·s par le fris­son de la ten­ta­tion de paraître, depuis une sorte de per­ron, non : de pro­mon­toire ver­bal où les bolos­sés ont des airs d’Opprimés ;
voi­là que nous for­mons l’entreprise exem­plaire de notre temps à notre tour, ras­sem­blant sous le vieux pro­nom d’autorité, sous lui c’est-à-dire sous nous qui l’employons main­te­nant, d’autorité, ras­sem­blant sous ce nous la plus avouable, la plus cou­lante, la plus arran­geante des com­mu­nau­tés, la com­mu­nau­té des frères d’âme et qui, sou­vent, s’ignorent, ayant aus­si peu le goût du par­tage des tares que celui du par­tage tout court :

chro­no­phobes (anc. mélan­co­liques)
cli­no­philes (anc. mélan­co­liques)
hypo­con­driaques (anc. mélan­co­liques)
abou­liques (anc. mélan­co­liques)
dys­pho­riques (anc. mélan­co­liques)
hyper­sen­sibles (anc. mélan­co­liques)

qu’iels approchent, qu’iels laissent der­rière elleux toute l’inhibition, l’appréhension qui les a faits fra­giles et inaptes à for­mu­ler des vœux d’orientation et des options de défense stra­té­gique, inac­ces­sibles aux pré­fé­rences et aux goûts posi­tifs, qu’iels approchent et qu’iels viennent à nous, qu’iels nous rejoignent : nous les accueille­rons – déjà en les nom­mant nous les incor­po­rons – nous les incor­po­rons main­te­nant et main­te­nant nous les cares­sons, nous nous cares­sons du doux pro­nom de nous, le nous de qui, de tout temps, ne peut pas, ne veut pas… – ici les inca­pables rejoignent les réfrac­taires, et les réfrac­taires les vel­léi­taires, for­mant un cor­tège uni­taire épars, sans tête, ni queue, ni tronc com­muns : le sujet géné­rique mar­tyr des bot­tins diag­nos­tiques.

6

Chez les Monsieurs, quand il s’agit de TOUT DIRE, l’ambiance est judi­ciaire, apo­lo­gé­tique – ceux qui veulent comp­ter dans l’Histoire com­pa­raissent au tri­bu­nal de l’Histoire ; et, pré­ten­dant TOUT DIRE, ils ne disent jamais que rien que tout. On les quitte géné­ra­le­ment posant devant le « monu­ment de [leur] inno­cence » (Rousseau) – c’est de bonne guerre vu que c’est le jeu.

Pour en trou­ver qui suivent le pro­gramme rigou­reu­se­ment, avec conscience (et avec la mau­vaise des deux) ; pour en trou­ver qui, sans pré­face ni céré­mo­nie d’affranchissement, traquent le reste-à-dire même quand on leur assure que TOUT a été DIT, il convient d’aller voir du côté d’elles et pas d’ils – elles : les Scrupuleuses du 17e. TOUT DIRE, chez elles, c’est du sérieux : du lit­té­ral – le dogme est clair : confes­sion régu­lière, dès l’âge de dis­cré­tion, de tous et des moindres péchés, véniels et mor­tels, contre soi-même et contre l’Autre.

Dans le demi-jour du confes­sion­nal, elles lâchent TOUT et sans hié­rar­chie – « tout » : ce qui a pas­sé dans la cage à men­tal (mau­vaises pen­sées), cage à cor­dial (vilains élans), cage à ver­bal (paroles impies ou mal­heu­reuses) ; « sans hié­rar­chie », car c’est jus­te­ment à la hié­rar­chie qu’il revient de clas­ser les péchés avant de les absoudre en bloc.

Les confes­seurs perdent che­veux, patience, moyens – ou bandent en conti­nu : les Scrupuleuses sont accu­sées de com­plai­sance des­crip­tive ; avoir fait du sale en pen­sée leur sert de pré­texte à faire du sale en parole, et le récit détaillé du pen­se­ment salace ajoute au péché contre l’esprit un péché de langue (c’est le hui­tième et tar­dif capi­tal, et depuis la liste n’a pas bou­gé).

Bientôt, évêques et direc­teurs publient des trai­tés, des exer­cices pour inci­ter leurs ouailles lit­té­ra­listes à ne dire le sale et le tor­du (« ordes et sales cogi­ta­tions soit de blas­phème soit de luxure ») que de manière euphé­mique (« en gar­dant l’honnesteté de par­ler »), « car qui des­cend trop spe­ci­fic­que­ment et trop scru­pu­leu­se­ment entour ces confes­sions ne recep­vra pas paix de cueur et conscience, mais plus tost oppo­sée et contraire plus fort, et don­ne­ra l’occasion à l’ennemi de le beau­coup inquié­ter et vexer, comme il advient à qui s’efforce appai­ser l’abay des chiens et leur gectent du pain pour les faire ces­ser abayer, mais sou­vent les chiens infestent plus fort et assaillent plus dure­ment qui leur gecte le pain »3.

Parce que c’est l’été. Parce qu’il fait chaud. Parce que le caou­tchouc ne sera inven­té que deux mille ans plus tard. Parce que Mongénéral (appe­lons-le Claudius) n’a pas pré­vu de vous infli­ger plus qu’une petite cam­pagne. Les rai­sons de la hié­rar­chie sont nom­breuses, et toutes sont excel­lem­ment moti­vées, de vous faire por­ter des san­dales pour aller à la guerre. La san­dale a des ouver­tures, presque autant que des fer­me­tures ; il est par consé­quent plus facile aux petites choses d’y entrer que d’en sor­tir. Par exemple un caillou : dans la marche il s’invite entre votre peau et le cuir ; agi­tez le pied à chaque pas, trop tard : le caillou est dans la san­dale. Le caillou est dans la san­dale : dans la langue de Claudius on appelle ça un scru­pu­lus. Il est petit, il est poin­tu, il est sup­pli­ciant. Plus il est petit, plus il est poin­tu ; plus il est poin­tu, plus il est sup­pli­ciant. Le caillou est dans la san­dale : trop tard. Soit vous vous arrê­tez et vous per­dez le rang, soit vous conti­nuez et vous per­dez le pied.

Le pro­blème des Scrupuleuses est le sui­vant : le dogme com­mande d’absolument TOUT DIRE, et tant que je n’aurai pas TOUT DIT autant dire que je n’aurai rien dit. D’où la frin­gale confes­sion­nelle, sa sur­fré­quence, dont le pen­dant est la per­pé­tui­té du temps de consti­tu­tion du dos­sier : je ne serai en mesure d’être conve­na­ble­ment jugée, cor­rec­te­ment absoute, que lorsque tous les élé­ments auront été ver­sés. Or le dos­sier ne sera jamais com­plet – pas seule­ment parce que le récit d’une mau­vaise pen­sée ravive cette pen­sée (une infi­nie rechute), mais parce que la liste des péchés recen­sés n’est jamais tout à fait à jour ; et que faire d’un péché que votre direc­teur s’obstine à négli­ger ?

En vrai, pas d’inquiétude : toute inno­va­tion per­son­nelle en la matière peut être rever­sée dans la caté­go­rie Orgueil. (La Formation pré­fère le men­songe à la fan­tai­sie.)

7

Plus tard, avant, d’autres fois, quelque part entre Les hommes rentrent de la chasse tan­dis que les femmes raclent les peaux. et Le Concorde s’écrase au décol­lage à Gonesse., dans des situa­tions dis­tinctes du genre insom­nie, rumi­na­tion anxieuse, Carambar :
Tu pré­fères devoir faire tou­jours la même chose ou n’être jamais en mesure de refaire quoi que ce soit ?Tu pré­fères reti­rer ta plainte auprès du CPE ou qu’on te brûle les che­veux au tip­pex ?

Nous-autre·s qui n’avons pas de vie (mais toute l’appréhension que le monde peut four­nir), nous avons déve­lop­pé une pas­sion pour l’escapisme. Imaginer le pire, nous pla­cer sur le grill d’une sanc­tion absurde, nous mettre à la ques­tion que per­sonne ne nous pose, c’est ten­ter de dis­si­per une menace réelle, latente, omni­re­pré­sen­tée dans l’univers des faits, en ceci que chaque fait, en planque ou en acte, est au moins l’annonce de faits plus redou­tables ; or plus grande la ter­reur exer­cée pré­ven­ti­ve­ment sur nous Tu pré­fères avoir une mémoire de moins de trois semaines, ou que chaque évé­ne­ment vieux de plus d’une seconde devienne un sou­ve­nir ?, plus sup­por­table l’attentat de faits dont nous fini­rions par être victime·s : Refus d’une glace ou d’un deuxième tour de manège.Encouragements humi­liants sur le bul­le­tin tri­mes­triel.Physique mal noté à la cour.quand nous n’en serions pas aus­si les auteur·s :Usage désas­treux de l’argot des classes dan­ge­reuses.Port osten­sible d’une imi­ta­tion de sous-marque.Question ingé­nue tra­his­sant la pucel­le­rie.

Et c’est pour­quoi on peut nous voir, sou­vent, à n’importe quelle heure, sem­bler nous amu­ser dans quelque endroit où en fait seul·s, pra­ti­que­ment seul·s, nous nous occu­pons à faire comme Rousseau des « pro­nos­tics sur [notre] salut », par­fois aus­si sur le salut des autres :Si je touche les bandes blanches du pas­sage clou­té, maman mour­ra.Si cette bulle de che­wing-gum éclate, il ne res­te­ra rien de lui dans dix ans.

8

Au registre des cer­ti­tudes pra­tiques, com­ment expli­quer que celles du Socle com­mun de connais­sances, de com­pé­tences et de culture « Je sais prendre des ini­tia­tives, entre­prendre et mettre en œuvre des pro­jets, après avoir éva­lué les consé­quences de mon action. »« Je gère mon acti­vi­té phy­sique et ma pro­duc­tion artis­tique pour les amé­lio­rer. »« Je construis des stra­té­gies pour réa­li­ser une per­for­mance spor­tive. »aient pour la plu­part été rem­pla­cées par à peu près celles-ci :Le monde pro­saïque de l’activité m’est inhos­pi­ta­lier.Je ne sais d’autre salut que le cheat code HOME RUN dans Age of Empires.J’ai plus de rage en moi que d’euros sur mon CPF.?

(Lutgarde, répé­tant ses prières d’heure en heure par acquit de conscience, avait vain­cu par le scru­pule : n’ayant plus le temps de vivre, elle n’eut plus le temps de pécher.)

Évidemment, n’ayant rien de spé­cial à faire et ne dési­rant pas faire si faire est entre­prendre ; cher­chant alors à se sous­traire à faire (à échap­per à la mis­sion d’avoir-à-faire, comme au regret d’auroir-dû-faire), et consi­dé­rant déjà rien que se bou­ger comme un fait de col­la­bo­ra­tion, s’offre tou­jours à soi l’option des poètes et des phi­lo­sophes – l’option des sages : non pas faire, mais être. Or quand on a de connais­sances que celles qu’un petit défi­ci­taire d’attention peut déduire de nouer, cou­per, tordre ou limer ce qui reste d’ongles contre son épi- puis son hypo­derme, on sai­sit mal pour­quoi on vou­drait lâcher ces petits faire et tout mélan­ger dans de l’Être – être par­mi les Êtres, la dépres­sion.

Être, contrai­re­ment aux dits de la plu­part des sages, c’est tou­jours être quelque chose ou quelqu’un quelque part. Être c’est en être il n’y a pas le choix, et en être est un move qui signale au moins tes coor­don­nées, ça joue ça par­ti­cipe ça col­la­bore c’est impli­qué ça EST – phy­sique, sco­pique, dis­po­nible pour les regards et pour les éva­lua­tions, à dis­po­si­tion pour les coups dont tous sont per­mis : de pied, de poing, de feu, de boule, de pute, de crosse – dis­po­nible pour les coups de pres­sion, petit gibier de game intré­pide et vaillant, brillant de tout son Être dans le viseur des Autres ou de la camé­ra ther­mique, à moins qu’il ne soit , AIR MAX PLUS dans le piège à loups, à pigner qu’il n’a rien deman­dé – mais per­sonne n’a rien deman­dé mon lapin, c’est juste que c’est comme ça que c’est, c’est la matière et la manière uniques du vivant, le code de base de la nature : rien n’est sans concou­rir, rien n’est sans cou­rir le risque de n’être plus, rien n’est né pour ne pas être et puis le ces­ser, c’est l’histoire de la vie, le cycle éter­nel, la ronde infi­nie, c’est l’histoire, l’histoire de, la vie.

Mais que faire alors main­te­nant désor­mais ?
on se demande avec effroi. C’est un grand mot se deman­der. C’est beau­coup dire que faire. C’est encore beau­coup trop par­ler, beau­coup poser. Alors on arrête tout. On fige comme une gelée, dans l’espoir de ne tra­hir aucune de nos coor­don­nées. On s’arrête net, l’air médu­sé mais médi­tant. On regarde son poi­gnet droit et on dit VOICI MON VÉRITABLE COMPTE FORMATION, QUE LA PUISSANCE DE L’ESPRIT DESCENDE DANS CE POIGNET PUIS DANS CE STYLO BIC ET QU’IL Y ENFANTE UNE ŒUVRE MÉMORABLE QUI EXPLOSERA À LA FACE DU MONDE INTÉGRAL. Et alors on ÉCRIT. Pas beau­coup de choses pour com­men­cer, mais quand même voi­là que nous voi­là écri­vant, et se disant J’ÉCRISJE VAIS ÉCRIRE plu­tôt, méfiant et cona­tant, voyant dans ÉCRIRE l’occasion d’échapper et à être et à faire, et pour acquit­ter les dettes contrac­tées auprès d’être et faire on ÉCRIT – mais pas n’importe quoi : pour com­men­cer, comme pro­to­co­lai­re­ment pour déga­ger la voie à de futurs ÉCRITS, une lettre de rup­ture à ne_pas_repondre_dialogue@caf.fr.

Chère Caisse,
Tu m’as encore deman­dé ce dont j’ai peur : de toi. Je n’ai pas su te le dire sur le moment de notre entre­tien, jus­te­ment parce que j’avais peur, et que c’est tou­jours déli­cat quand un tyran vous demande « ce que je peux faire pour vous ».
Maintenant, j’essaye de te dire ces choses par écrit, mais ce n’est pas facile, parce que j’ai tou­jours peur, et que c’est un sujet beau­coup trop grand pour moi à com­prendre et à ras­sem­bler en quelques mots valides.
De ton point de vue les choses se sont tou­jours pré­sen­tées sim­ple­ment, du moins pour ce que tu as vou­lu en dire devant moi : Je mène une vie de pata­chon. Je vis au-des­sus de mes moyens. Notre modèle social n’y sur­vi­vra pas. Je devrais aérer ma chambre. La vie ce n’est pas ça. Il faut secouer l’arbre pour jouir de ses fruits mûrs ; ceux qui se contentent d’attendre qu’ils tombent meurent ou n’ont plus le temps que d’aller aux toi­lettes.
En dépit de l’engagement réci­proque qui nous lie contrac­tuel­le­ment, je ne t’ai jamais par­lé à cœur ouvert. D’une manière géné­rale je n’ai jamais eu l’esprit de fran­chise requis en socié­té. Je n’aime pas trop qu’on exige de moi du res­pect, je n’en réclame pas de mes pro­chains, mais sur­tout je m’agace quand ils com­mencent à la jouer conci­toyen­ne­té.
Si tu résumes ton juge­ment sur moi, il s’ensuit que ce que tu me reproches n’est pas un défaut posi­tif, mais un regim­be­ment géné­ral, une absence de volon­té de vou­loir. Tu me crois « capable de mieux ». Tu vois tous les jours des gens qui eux « n’ont pas mes moyens », « pro­fitent du sys­tème », « ne s’en sor­ti­ront jamais ». Tu te trompes. Tu m’as for­gé à ton image : dur à bou­ger. Quoi que je fasse pour gagner en moti­va­tion, je sèche, et en cela je suis ton débi­teur.
Je ne dis pas, natu­rel­le­ment, que ton action sur moi est seule cause de ce que je suis. Sans doute sans la per­sé­cu­tion de nos rap­ports aurais-je tout de même été un être souf­fre­teux, crain­tif, hési­tant, inquiet. Je n’ai pas l’allant de ta République. Ma volon­té est plus secrète, plus timide, plus fourbe aus­si ; elle s’exerce dans d’autres direc­tions, et sou­vent même cesse tout à fait.
Tu vou­drais face à toi d’authentiques Français, des gens avec de l’appétit, le sens de la conquête, le don d’élocution, le conten­te­ment de soi, le sen­ti­ment d’être supé­rieur au reste du monde. Alors que je me fous de nos pay­sages et de nos valeurs, je veux juste que tu m’arroses, au lieu de faire ruis­se­ler au compte-goutte, avec ce qu’il te reste de pros­pé­ri­té sus­pecte. Tu nous connais moi et les miens : nous fer­mons les yeux sur la pro­ve­nance.
Je songe encore avec cha­grin quel­que­fois aux dému­ni­tions régu­lières où tu m’as plon­gé. Qu’il fut dif­fi­cile pour moi d’admettre que « Ma Caf », l’ultime ins­tance, pou­vait sans motif appa­rent me cou­per les vivres. On aurait pu sup­po­ser, de là, que tu allais me réduire en pous­sière et qu’il ne res­te­rait rien de moi. Cela ne s’est pas pro­duit ; mais il s’est pro­duit autre chose, plus grave peut-être : tu as tri­mes­tria­li­sé ma vie. Je t’en vou­drai jusqu’à la mort – toi d’abord.

Rappel

Ça joue !
Ça engage sur la taille des bites et la hau­teur des âges men­tals ! Ça ne s’arrêtera plus jamais ! Ça fait la blague « ça va ? » – et, quoi que tu répondes (flat­té de tenir dans cette ques­tion la preuve que tu existes) – « non mais je par­lais pas à toi ».
Tu peux cher­cher les prin­cipes et les causes, les pro­to­coles, la notice, les régu­la­ri­tés, rien.
Tu peux cher­cher dans les archives les traces d’une par­tie blanche, d’un tour à jeu ouvert, d’une juris­pru­dence arbi­trale, rien. Rien dans la com­po­si­tion des atmo­sphères ne le signale ; rien dans la com­po­si­tion des traî­nées, des eaux miné­rales, des vac­cins BCG ; rien dans la forme des nuages ou de ton île flot­tante ; rien dans le regard de tes enne­mis, rien sur le corps de tes amis ; rien dans les âges men­tals ni dans les âges osseux ; rien dans les conte­nus péda­go­giques ne le signale, mais rien ne t’en fera dou­ter : ça joue.
ça joue quand tu dors, ça joue quand tu fuis, ça joue quand tu pleures, ça joue quand tu triches.
Ça joue quand tu te chies des­sus liquide au self.
Ça joue quand tu cours après quelque chose ou quelqu’un que tu désires ; ça joue quand tu te fais cour­ser jusqu’aux chiottes du bâti­ment B.
Ça joue quand tu es hors ligne, sous ten­sion, sur les nerfs, dans le dur.
Ça joue quand tu te fais taper des­sus, pas­ser devant, rou­ler des­sus, ren­trer dedans.
Ça règle les per­sonnes. Ça déplace des rap­ports. Ça nique des mères même si tu veux. Ça éta­blit des dis­tinc­tions et ça sta­bi­lise les contrastes.
Si tu veux tu peux invo­quer des « règles », une « éti­quette », un « juge », un « algo­rithme éthique » ; tu peux, les yeux mouillés d’honneur, en appe­ler à un sur­saut géné­ral de fair play, c’est ok, c’est noté, c’est joué – bien ou mal on ver­ra.
Ça joue chaque fois que tu opères un life change et que tu dis « nique ça », chaque fois que tu prends quand même ta carte à la salle alors que les frais d’inscription étaient cachés dans l’astérisque.
Ça joue quand tu te fais prendre à part, quand tu te fais bai­ser sans, quand tu te fais jouir avec.
Ça joue quand tu tiens le regard dans le métro de 7h15 (ça joue aus­si quand tu le baisses, c’est juste moins intense pour tout le monde, bolos).

  1. Jean Meschinot, « Ballade de la Dame loin­taine », vers 1460.
  2. La ven­geance est un bien plus doux que la vie elle-même. (Juvénal, Satires, 13)
  3. Jean Gerson, De Remediis contre pusil­la­ni­mi­ta­tem