Il nous faut maintenant ajouter quelques mots à propos d’un sourire, et qui plus est, d’un sourire d’hommes, accompagné de la barbe indispensable à cette activité d’homme qu’on appelle sourire-dans-sa-barbe : il s’agit du sourire des savants qui avaient donné suite à l’invitation de Diotime et écoutaient parler les illustres beaux esprits. Quoiqu’ils sourissent, gardons-nous bien de croire que ce fût avec ironie. Tout au contraire, c’était leur façon d’exprimer la vénération et l’incompétence dont on a déjà parlé. Mais gardons-nous aussi d’en être dupes. Dans leur conscience, c’était sans doute vrai, mais dans leur subconscient, pour user d’un terme devenu courant, ou, pour mieux dire, dans leur état général, c’étaient des hommes chez qui grondait, comme le feu sous le chaudron, une certaine tendance au Mal.
Bien entendu, cette remarque semble paradoxale, et un professeur d’Université en présence duquel on la risquerait répliquerait probablement qu’il se contente de servir la Vérité et le Progrès, et ne veut rien savoir d’autre : c’est là l’idéologie de sa profession. Toutes les idéologies de profession sont évidemment nobles ; les chasseurs, par exemple, bien loin de s’intituler « bouchers des forêts », se proclament très haut « Amis officiels des animaux et de la nature », de même que les commerçants défendent le principe du profit honorable et que les voleurs, à leur tour, adoptent le dieu des commerçants, à savoir le distingué promoteur de la concorde universelle, l’international Mercure. Il ne faut donc pas faire trop de cas de la forme que prend une activité quelconque dans la conscience de ceux qui l’exercent.
Si l’on se demande sans aucun parti pris comment la science a pu aboutir à sa forme actuelle (chose importante à tous points de vue, puisqu’elle nous domine et que l’analphabète lui-même n’en est pas préservé, qui apprend à vivre dans la compagnie d’innombrables objets produits scientifiquement), on obtient déjà une image fort différente. Selon des traditions dignes de foi, ce serait au cours du XVIe siècle, période d’intense animation spirituelle, que l’homme, renonçant à violer les secrets de la nature comme il l’avait tenté jusqu’alors pendant vingt siècles de spéculation religieuse et philosophique, se contenta, d’une façon que l’on ne peut qualifier que de « superficielle », d’en explorer la surface. Le grand Galilée, par exemple, qui est toujours le premier cité à ce propos, renonçant à savoir pour quelle raison intrinsèque la Nature avait horreur du vide au point qu’elle obligeait un corps en mouvement de chute à traverser et remplir espace après espace jusqu’à ce qu’il atteignît enfin le sol, se contenta d’une constatation beaucoup plus banale : il établit simplement à quelle vitesse ce corps tombe, quelle trajectoire il remplit, quel temps il emploie pour la remplir et quelle accélération il subit. L’Église catholique a commis une grave faute en forçant cet homme à se rétracter sous peine de mort au lieu de le supprimer sans plus de cérémonies : c’est parce que lui et ses frères spirituels ont considéré les choses sous cet angle que sont nés plus tard (et bien peu de temps après si l’on adopte les mesures de l’histoire) les indicateurs de chemin de fer, les machines, la psychologie physiologique et la corruption morale de notre temps, toutes choses à quoi elle ne peut plus tenir tête. Sans doute est-ce par excès d’intelligence qu’elle a commis cette faute, car Galilée n’était pas seulement l’homme qui avait découvert la loi de la chute des corps et le mouvement de la terre, mais un inventeur à qui le Grand capital, comme on dirait aujourd’hui, s’intéressait ; de plus, il n’était pas le seul à son époque qu’eût envahi l’esprit nouveau. Au contraire, les chroniques nous apprennent que la sobriété d’esprit dont il était animé se propageait avec la violence d’une épidémie ; si choquant qu’il soit aujourd’hui de dire de quelqu’un qu’il est animé de sobriété, quand nous penserions plutôt en être saturés, le pas que l’homme fit à cette époque hors du sommeil métaphysique vers la froide observation des faits dut entraîner, si l’on en croit quantité de témoignages, une véritable ardeur, une véritable ivresse de sobriété. Si l’on se demande comment l’humanité a pu penser à se transformer ainsi, il faut répondre qu’elle a agi comme tous les enfants raisonnables quand ils ont essayé trop tôt de marcher ; elle s’est assise par terre, elle a touché la terre avec une partie du corps peu noble sans doute, mais sur laquelle on peut se reposer. L’étrange est que la terre se soit montrée si sensible à ce procédé et qu’elle se soit laissé arracher, depuis cette prise de contact, une telle foison de découvertes, de commodités et de connaissances qu’on en crierait presque au miracle.
Cette préhistoire terminée, on serait en droit de penser que nous vivons maintenant dans le miracle de l’Antéchrist ; car l’image du contact à quoi l’on vient de recourir ne doit pas être interprétée seulement dans le sens du confort et de la sécurité, mais aussi dans celui de l’inconvenance et du défendu. En effet, avant que les intellectuels ne découvrissent la volupté des faits, seuls les guerriers, les chasseurs et les commerçants, c’est-à-dire précisément les natures rusées et violentes, l’avaient connue. Dans la lutte pour la vie, il n’y a pas de place pour le sentimentalisme de la pensée, il n’y a que le désir de supprimer l’adversaire de la façon la plus rapide et la plus effective ; tout le monde est positiviste ; tout de même, dans le commerce, la vertu n’est point de s’en laisser conter mais de s’en tenir au solide, le profit représentant somme toute une victoire psychologique remportée sur autrui et conditionnée par les circonstances. Si l’on considère d’autre part quelles vertus permettent les grandes découvertes, on trouve l’absence de tout scrupule traditionnel et de toute inhibition, le courage, le plaisir de détruire autant que celui d’entreprendre, l’exclusion de toute considération morale, le marchandage patient des moindres bénéfices, l’attente tenace, quand il le faut, sur le chemin qui mène au but, enfin un respect du nombre et de la mesure qui est l’expression la plus aiguë de la défiance à l’égard de toute espèce d’imprécision ; en d’autres termes, rien, précisément, que les vieux vices des chasseurs, soldats et marchands transposés dans le domaine intellectuel et métamorphosés en vertus. Sans doute ces vices sont-ils ainsi affranchis de la recherche d’un profit personnel et relativement bas, mais l’élément de Mal originel, comme on pourrait le nommer, survit à cette transformation, étant apparemment indestructible et éternel, tout au moins aussi éternel que les grands idéaux humains, puisqu’il n’est finalement rien de moins et rien de plus que le plaisir de tendre un croc-en-jambe aux idéaux pour les voir se casser le nez. Qui ne connaît la maligne tentation qui vous vient à l’esprit devant un beau grand vase de cristal, à l’idée qu’un seul coup de canne le briserait en mille morceaux ? Cette tentation, exaltée jusqu’à cet héroïsme amer né du fait que l’homme ne peut être sûr de rien, dans sa vie, sinon de ce qui tient à fer et à clou, est dans la sobriété spirituelle de la science un sentiment de base ; si les convenances s’opposent à ce qu’on l’identifie avec le Diable, on ne peut nier tout de même qu’elle ne sente un peu le soufre.
On peut rappeler dès l’abord la singulière prédilection de la pensée scientifique pour ces explications mécaniques, statistiques et matérielles auxquelles on dirait qu’on a enlevé le cœur. Ne voir dans la bonté qu’une forme particulière de l’égoïsme ; rapporter les mouvements du cœur à des sécrétions internes ; constater que l’homme se compose de huit ou neuf dixièmes d’eau ; expliquer la fameuse liberté morale du caractère comme un appendice automatique du libre-échange ; ramener la beauté à une bonne digestion et au bon état des tissus adipeux ; réduire la procréation et le suicide à des courbes annuelles qui révèlent le caractère forcé de ce que l’on croyait le résultat des décisions les plus libres ; sentir la parenté de l’extase avec l’aliénation mentale ; mettre sur le même plan la bouche et l’anus, puisqu’ils sont les extrémités orale et rectale d’une même chose… : de telles idées, qui dévoilent en effet dans une certaine mesure les trucs de l’illusionnisme humain, bénéficient toujours d’une sorte de préjugé favorable et passent pour particulièrement scientifiques. C’est sans doute la vérité qu’on aime en elles ; mais tout autour de cet amour nu, il y a un goût de la désillusion, de la contrainte, de l’inexorable, de la froide intimidation et des sèches remontrances, une maligne partialité ou tout au moins l’exhalaison involontaire de sentiments analogues.
En d’autres termes, la voix de la vérité est toujours accompagnée de parasites assez suspects, mais ceux qui y sont le plus intéressés n’en veulent rien savoir. Or, la psychologie moderne connaît un bon nombre de ces « parasites » refoulés et nous en offre le remède : les faire sortir et les rendre aussi clairs que possible à la conscience pour annuler leur néfaste influence. Qu’adviendrait-il donc si l’on se décidait à faire l’expérience et qu’on se sentît tenté de révéler publiquement ce goût équivoque de l’homme pour la vérité et ses parasites, misanthropie et satanisme, et qu’on allât même jusqu’à l’introduire avec confiance dans la vie ? Eh bien ! il en résulterait à peu près ce défaut d’idéalisme que l’on a déjà décrit sous le nom d’« utopie de la vie exacte », mode de pensée fondé sur la possibilité de l’essai et de la rétractation, mais soumis néanmoins à l’implacable loi martiale qui régit toute conquête intellectuelle. Cette manière de façonner sa vie n’est nullement faite, il est vrai, pour préserver ou apaiser celui qui l’adopte ; loin de considérer ce qui est digne de vie avec un respect absolu, il n’y verrait plus qu’une simple ligne de démarcation que la lutte pour la vérité intérieure ne cesse de déplacer. Il douterait du caractère sacré de chaque instant du monde, non point par scepticisme, mais dans l’esprit du grimpeur qui sait que le pied le plus sûr est aussi toujours le plus bas placé. Dans le feu de cette Église militante qui hait le dogme pour l’amour de ce qui demeure encore irrévélé et repousse les lois et la tradition au nom d’un amour exigeant de sa prochaine figure, le Diable retrouverait le chemin de Dieu, ou, pour parler plus simplement, la vérité redeviendrait la sœur de la vertu et ne serait plus tentée de lui jouer ces tours sournois qu’une jeune nièce réserve à une tante restée vieille fille.
Tout cela, un jeune homme l’enregistre plus ou moins consciemment dans les amphithéâtres du Savoir ; il y découvre aussi les éléments d’une vaste synthèse où des mondes aussi éloignés l’un de l’autre qu’une pierre qui tombe et un astre qui gravite se voient comme par jeu rapprochés, où un phénomène qui semblait absolument un et indivisible, comme la naissance d’un acte simple dans les centres de la conscience, se trouve divisé en courants dont les sources profondes sont séparées les unes des autres par des millénaires. Mais qu’il prenne envie à quelqu’un d’étendre la mentalité ainsi acquise au-delà des limites de certains problèmes spécialisés, on lui fera vite comprendre que les exigences de la vie ne sont pas celles de la pensée. Dans la vie, c’est presque toujours le contraire de ce dont un esprit cultivé est familier, qui se produit : les différences et les ressemblances naturelles acquièrent un prix infini ; tout ce qui dure, et de quelque façon que ce soit, est considéré jusqu’à un certain point comme naturel, de sorte qu’on n’y touche pas volontiers ; les transformations qui se révèlent nécessaires ne se font qu’avec hésitation et comme en louvoyant. Si donc quelqu’un s’avisait, poussé mettons par une mentalité végétarienne, de voussoyer une vache (parfaitement conscient du fait que l’on manque plus facilement d’égards à un être que l’on tutoie), on le traiterait aussitôt de sot ou même de fou ; non pas à cause de sa mentalité végétarienne ou zoophile, laquelle est jugée « profondément humaine », mais bien parce qu’il l’aurait transposée directement dans le réel. En un mot, il existe entre l’esprit et la vie un compromis assez complexe aux termes duquel l’esprit touche tout au plus 0,5 % de ses créances et y gagne le titre de créancier honoraire.
Si l’esprit, sous la forme puissante qu’il a fini par revêtir, est lui-même, comme on vient de l’admettre, un saint tout à fait viril, avec tous les défauts accessoires du guerrier et du chasseur, il faudrait conclure des circonstances évoquées ci-dessus que sa secrète tendance à la perversion ne peut s’épanouir nulle part dans sa totalité (assez grandiose après tout), ni trouver aucune occasion de se purifier au contact du réel ; on ne pourrait la rencontrer que sur des chemins tout à fait étranges, incontrôlés, où elle échappe enfin à sa stérile captivité. Reste à savoir si, jusqu’ici, tout a été jeu illusoire ou non ; toutefois, on ne peut nier que cette dernière supposition ne soit confirmée à sa manière. Il règne aujourd’hui chez beaucoup d’hommes un état d’esprit assez obscur : attente du pire, disposition à la révolte, défiance envers tout ce que l’on vénère. Il y a des hommes qui déplorent le manque d’idéalisme de la jeunesse, mais qui, dans le moment où il leur faut agir, se comportent spontanément comme celui qui, par une très saine défiance des idées, en appuie la trop courtoise puissance par l’action d’une quelconque matraque. Autrement dit, est-il un seul but pie qui ne doive se pourvoir d’un rien de corruption et compter un peu avec les qualités humaines inférieures, s’il veut passer dans ce monde pour sérieux et sincère ? Des expressions comme : « tenir », « forcer », « serrer la vis », « ne pas avoir peur de casser les vitres », « la manière forte », ont un agréable parfum de sérieux. L’idée que le plus grand esprit, fourré dans une cour de caserne, y apprend en huit jours à sauter au seul commandement d’un sous-off, celle qu’un lieutenant et huit hommes suffisent pour mettre en état d’arrestation tous les parlements du monde, n’ont, il est vrai, trouvé leur expression classique que plus tard, lorsqu’on a découvert qu’on pouvait, de quelques cuillerées d’huile de ricin administrées à un idéaliste, ridiculiser les convictions les mieux ancrées ; mais depuis longtemps déjà, bien qu’on les eût bannies avec indignation, elles avaient la même terrible force ascensionnelle que les plus étranges rêves. Le fait est là aujourd’hui que la deuxième pensée, quand ce n’est pas la première, de tout homme qui se trouve confronté à quelque phénomène imposant, fût-ce simplement par sa beauté, est inévitablement celle-ci : « Tu ne vas pas me la faire, je finirai bien par t’avoir ! » Et cette rage de tout abaisser, caractéristique d’une époque qui n’est pas seulement persécutée, mais persécutrice, ne peut plus être simplement confondue avec la distinction naturelle que la vie établit entre le sublime et le grossier ; c’est bien plutôt, dans notre esprit, un trait de masochisme, l’inexprimable joie de voir le bien humilié et même détruit avec une si merveilleuse aisance. On croirait à un désir passionné de se démentir, et peut-être n’est-il pas si désolant, après tout, de faire confiance à une époque qui est venue au monde par les pieds, et ne demande plus qu’à être remise à l’endroit par son Créateur.
Es müssen nun ein paar Worte über ein Lächeln folgen, noch dazu ein Männerlächeln, und es war ein Bart dabei, geschaffen für die männliche Tätigkeit des In den Bart Lächelns ; es handelt sich um das Lächeln der Gelehrten, die der Einladung Diotimas Folge geleistet hatten und den berühmten Schöngeistern zuhörten. Obgleich sie lächelten, darf man beileibe nicht glauben, daß sie es ironisch taten. Im Gegenteil, es war ihr Ausdruck der Ehrerbietung und Inkompetenz, wovon ja schon die Rede gewesen. Aber man darf sich auch dadurch nicht täuschen lassen. In ihrem Bewußtsein stimmte das, jedoch in ihrem Unterbewußtsein, um dieses gebräuchliche Wort zu benützen, oder richtiger gesagt, in ihrem Gesamtzustand waren es Menschen, in denen ein Hang zum Bösen rumorte wie das Feuer unter einem Kessel.
Das sieht nun natürlich wie eine paradoxe Bemerkung aus, und ein o. ö. Universitätsprofessor, in dessen Angesicht man sie aufstellen wollte, würde vermutlich entgegnen, daß er schlicht der Wahrheit und dem Fortschritt diene und sonst von nichts wisse ; denn das ist seine Berufsideologie. Aber alle Berufsideologien sind edel, und die Jäger zum Beispiel sind weit davon entfernt, sich die Fleischer des Waldes zu nennen, nennen sich vielmehr den weidgerechten Freund der Tiere und der Natur, ebenso wie die Kaufleute den Grundsatz des ehrbaren Nutzens hegen und die Diebe den Gott der Kaufleute, nämlich den vornehmen und völkerverbindend internationalen Merkur, auch den ihren nennen. Auf die Darstellung einer Tätigkeit im Bewußtsein derer, die sie ausüben, ist also nicht allzuviel zu geben.
Fragt man sich unbefangen, wie die Wissenschaft ihre heutige Gestalt bekommen hat – was an und für sich wichtig ist, da sie uns ja beherrscht und nicht einmal ein Analphabet vor ihr sicher ist, denn er lernt es, mit unzähligen gelehrt geborenen Dingen zusammenzuleben –, so erhält man schon ein anderes Bild. Nach glaubwürdigen Überlieferungen hat das im sechzehnten Jahrhundert, einem Zeitalter stärkster seelischer Bewegtheit, damit begonnen, daß man nicht länger, wie es bis dahin durch zwei Jahrtausende religiöser und philosophischer Spekulation geschehen war, in die Geheimnisse der Natur einzudringen versuchte, sondern sich in einer Weise, die nicht anders als oberflächlich genannt werden kann, mit der Erforschung ihrer Oberfläche begnügte. Der große Galileo Galilei, der dabei immer als erster genannt wird, räumte zum Beispiel mit der Frage auf, aus welchem in ihrem Wesen liegenden Grund die Natur eine Scheu vor leeren Räumen habe, so daß sie einen fallenden Körper solange Raum um Raum durchdringen und ausfüllen lasse, bis er endlich auf festem Boden anlange, und begnügte sich mit einer viel gemeineren Feststellung : er ergründete einfach, wie schnell ein solcher Körper fällt, welche Wege er zurücklegt, Zeiten verbraucht und welche Geschwindigkeitszuwüchse er erfährt. Die katholische Kirche hat einen schweren Fehler begangen, indem sie diesen Mann mit dem Tode bedrohte und zum Widerruf zwang, statt ihn ohne viel Federlesens umzubringen ; denn aus seiner und seiner Geistesverwandten Art, die Dinge anzusehen, sind danach – binnen kürzester Zeit, wenn man historische Zeitmaße anlegt, – die Eisenbahnfahrpläne, die Arbeitsmaschinen, die physiologische Psychologie und die moralische Verderbnis der Gegenwart entstanden, gegen die sie nicht mehr aufkommen kann. Sie hat diesen Fehler wahrscheinlich aus zu großer Klugheit begangen, denn Galilei war ja nicht nur der Entdecker des Fallgesetzes und der Erdbewegung, sondern auch ein Erfinder, für den sich, wie man heute sagen würde, das Großkapital interessierte, und außerdem war er nicht der einzige, der damals von dem neuen Geist ergriffen wurde ; im Gegenteil, die historischen Berichte zeigen, daß sich die Nüchternheit, von der er beseelt war, weit und ungestüm wie eine Ansteckung ausbreitete, und so anstößig das heute klingt, jemand von Nüchternheit beseelt zu nennen, wo wir davon schon zu viel zu haben glauben, damals muß das Erwachen aus der Metaphysik zur harten Betrachtung der Dinge nach allerhand Zeugnissen geradezu ein Rausch und Feuer der Nüchternheit gewesen sein ! Aber wenn man sich fragt, was der Menschheit nun eigentlich eingefallen sei, sich so zu verändern, so ist die Antwort, sie tat damit nichts anderes, als jedes vernünftige Kind tut, wenn es zu früh versucht hat, zu laufen ; sie setzte sich auf die Erde und berührte diese mit einem verläßlichen und wenig edlen Körperteil, es muß gesagt werden : sie tat es mit eben jenem, auf dem man sitzt. Denn das Merkwürdige ist, daß sich die Erde dafür so ungemein empfänglich gezeigt hat und seit dieser Berührung sich Erfindungen, Bequemlichkeiten und Erkenntnisse in einer Fülle entlocken läßt, die ans Wunder grenzt.
Man könnte nach dieser Vorgeschichte nicht ganz mit Unrecht meinen, es sei das Wunder des Antichrist, in dem wir uns mitten darin befinden ; denn das gebrauchte Berührungsgleichnis ist nicht nur in der Richtung der Verläßlichkeit zu deuten, sondern ebensosehr in der Richtung des Anstandslosen und Verpönten. Und wirklich haben, ehe geistige Menschen ihre Lust an den Tatsachen entdeckten, nur Krieger, Jäger und Kaufleute, gerade also listige und gewalttätige Naturen, diese besessen. Im Kampf ums Leben gibt es keine denkerischen Sentimentalitäten, sondern nur den Wunsch, den Gegner auf dem kürzesten und tatsächlichsten Wege umzubringen, da ist jedermann Positivist ; und ebenso wenig wäre es im Geschäft eine Tugend, sich etwas vormachen zu lassen, statt aufs Feste zu gehn, wobei der Gewinn letzten Endes eine psychologische und den Umständen entspringende Überwältigung des anderen bedeutet. Sieht man andererseits zu, welche Eigenschaften es sind, die zu Entdeckungen führen, so gewahrt man Freiheit von übernommener Rücksicht und Hemmung, Mut, ebensoviel Unternehmungs- wie Zerstörungslust, Ausschluß moralischer Überlegungen, geduldiges Feilschen um den kleinsten Vorteil, zähes Warten auf dem Weg zum Ziel, falls es sein muß, und eine Verehrung für Maß und Zahl, die der schärfste Ausdruck des Mißtrauens gegen alles Ungewisse ist ; mit anderen Worten, man erblickt nichts anderes als eben die alten Jäger‑, Soldaten- und Händlerlaster, die hier bloß ins Geistige übertragen und in Tugenden umgedeutet worden sind. Und sie sind damit zwar dem Streben nach persönlichem und verhältnismäßig gemeinem Vorteil entrückt, aber das Element des Urbösen, wie man es nennen könnte, ist ihnen auch bei dieser Verwandlung nicht verlorengegangen, denn es ist scheinbar unzerstörbar und ewig, wenigstens so ewig wie alles menschlich Hohe, da es in nichts geringerem und anderem als der Lust besteht, dieser Höhe ein Bein zu stellen und sie auf die Nase fallen zu sehn. Wer kennt nicht die boshafte Verlockung, die bei der Betrachtung eines schönglasierten üppigen Topfes in dem Gedanken liegt, daß man ihn mit einem Stockhieb in hundert Scherben schlagen könnte ? Zum Heroismus der Bitterkeit gesteigert, daß man sich im Leben auf nichts verlassen könne, als was niet- und nagelfest sei, ist sie ein in die Nüchternheit der Wissenschaft eingeschlossenes Grundgefühl, und wenn man es aus Achtbarkeit nicht den Teufel nennen will, so ist doch zumindest ein leichter Geruch von verbranntem Pferdehaar daran.
Man kann gleich mit der eigenartigen Vorliebe beginnen, die das wissenschaftliche Denken für mechanische, statistische, materielle Erklärungen hat, denen gleichsam das Herz ausgestochen ist. Die Güte nur für eine besondere Form des Egoismus anzusehen ; Gemütsbewegungen in Zusammenhang mit inneren Ausscheidungen zu bringen ; festzustellen, daß der Mensch zu acht oder neun Zehnteln aus Wasser besteht ; die berühmte sittliche Freiheit des Charakters als ein automatisch entstandenes Gedankenanhängsel des Freihandels zu erklären ; Schönheit auf gute Verdauung und ordentliche Fettgewebe zurückzuführen ; Zeugung und Selbstmord auf Jahreskurven zu bringen, die das, was freieste Entscheidung zu sein scheint, als zwangsmäßig zeigen ; Rausch und Geisteskrankheit als verwandt zu empfinden ; After und Mund als das rektale und orale Ende derselben Sache einander gleichzustellen –: derartige Vorstellungen, die im Zauberkunststück der menschlichen Illusionen gewissermaßen den Trick bloßlegen, finden immer eine Art günstiger Vormeinung, um für besonders wissenschaftlich zu gelten. Es ist allerdings die Wahrheit, was man da liebt ; aber rings um diese blanke Liebe liegt eine Vorliebe für Desillusion, Zwang, Unerbittlichkeit, kalte Abschreckung und trockene Zurechtweisung, eine hämische Vorliebe oder wenigstens eine unfreiwillige Gefühlsausstrahlung von solcher Art.
Mit einem anderen Wort, die Stimme der Wahrheit hat ein verdächtiges Nebengeräusch, aber die am nächsten Beteiligten wollen nichts davon hören. Nun, die Psychologie kennt heute viele solcher unterdrückten Nebengeräusche, und sie hat auch den Rat bereit, daß man sie hervorholen und sich so deutlich wie möglich machen solle, um ihre schädlichen Wirkungen zu verhindern. Wie wäre es also, wenn man die Probe machen wollte und sich versucht fühlte, den zweideutigen Geschmack an der Wahrheit und ihren boshaften Nebenstimmen des Menschengehässigen und Höllenhundsmäßigen offen zur Schau zu tragen, ihn gleichsam vertrauend ins Leben zu wenden ? Nun, es käme ungefähr jener Mangel an Idealismus heraus, der unter dem Titel einer Utopie des exakten Lebens schon beschrieben worden ist, eine Gesinnung auf Versuch und Widerruf, aber dem eisernen Kriegsgesetz der geistigen Eroberung unterstehend. Dieses Verhalten zur Lebensgestaltung ist nun freilich keineswegs pflegend und befriedend ; es würde das Lebenswürdige keineswegs nur mit Ehrfurcht ansehen, sondern eher wie eine Demarkationslinie, die der Kampf um die innere Wahrheit beständig verschiebt. Es würde an der Heiligkeit des Augenblickszustandes der Welt zweifeln, aber nicht aus Skepsis, sondern in der Gesinnung des Steigens, wo der Fuß, der fest steht, jederzeit auch der tiefere ist. Und in dem Feuer einer solchen Ecclesia militans, welche die Lehre haßt um des noch nicht Geoffenbarten willen und Gesetz und Gültiges beiseite schiebt im Namen einer anspruchsvollen Liebe zu ihrer nächsten Gestalt, würde der Teufel wieder zu Gott zurückfinden, oder, einfacher gesprochen, die Wahrheit wäre dort wieder die Schwester der Tugend und müßte nicht mehr gegen sie die versteckten Bosheiten verüben, welche eine junge Nichte gegen eine altjüngferliche Tante ausheckt.
Alles das nimmt nun, mehr oder weniger bewußt, ein junger Mensch in den Lehrsälen des Wissens in sich auf, und er lernt dazu die Elemente einer großen konstruktiven Gesinnung kennen, die das Entfernte wie einen fallenden Stein und einen kreisenden Stern spielend zusammenbringt und etwas, das scheinbar eins und unteilig ist, wie das Entstehen einer einfachen Handlung aus den Zentren des Bewußtseins, in Ströme zerlegt, deren innere Quellen um Jahrtausende voneinander verschieden sind. Wollte sich aber jemand einfallen lassen, von so erworbener Gesinnung außerhalb der Grenzen besonderer Fachaufgaben Gebrauch zu machen, so würde ihm alsbald begreiflich gemacht werden, daß die Bedürfnisse des Lebens andere seien als die des Denkens. Im Leben spielt sich ungefähr von allem, was der ausgebildete Geist gewohnt ist, das Gegenteil ab. Die natürlichen Unterschiede und Gemeinsamkeiten werden hier sehr hoch geschätzt ; das Bestehende, mag es sein, wie es will, wird bis zu einem gewissen Grad als natürlich empfunden und nicht gern angetastet ; die notwendig werdenden Veränderungen vollziehen sich nur zögernd und gleichsam in einem hin und her walzenden Vorgang. Und wenn jemand etwa aus reiner vegetarischer Gesinnung zu einer Kuh Sie sagen würde (in richtiger Erwägung des Umstandes, daß man sich gegen ein Wesen, dem man du sagt, viel leichter rücksichtslos benimmt), so würde man ihn einen Gecken, wenn nicht einen Narren schelten ; aber nicht wegen seiner tierfreundlichen oder vegetarischen Gesinnung, die man hoch human findet, sondern wegen ihrer unmittelbaren Übertragung in die Wirklichkeit. Mit einem Wort, zwischen Geist und Leben besteht ein verwickelter Ausgleich, bei dem der Geist höchstens ein Halb vom Tausend seiner Forderungen ausbezahlt erhält und dafür mit dem Titel eines Ehrengläubigers geschmückt wird.
Ist aber der Geist, in der mächtigen Gestalt, die er zuletzt gefunden hat, wie vorhin angenommen worden, selbst ein sehr männlicher Heiliger mit kriegerischen und jägerischen Nebenuntugenden, so wäre aus den geschilderten Umständen zu schließen, daß die in ihm steckende Neigung zum Lästerlichen nirgends in ihrer immerhin großartigen Gänze herauskönne, noch die Gelegenheit finde, sich an der Wirklichkeit zu läutern, und darum auf allerhand recht sonderbaren, unkontrollierten Wegen anzutreffen sein dürfte, auf denen sie der unfruchtbaren Eingeschlossenheit entschlüpft. Es mag nun offen bleiben, ob bis hieher alles ein Spiel mit Einbildungen gewesen sei oder nicht ; so läßt sich doch nicht leugnen, daß diese letzte Vermutung ihre eigenartige Bestätigung hat. Es gibt eine namenlose Lebensstimmung, die nicht gerade wenig Menschen heute im Blut liegt, ein Gewärtigsein des Böseren, eine Tumultbereitschaft, ein Mißtrauen gegen alles, was man verehrt. Es gibt Menschen, die über die Ideallosigkeit der Jugend klagen, aber in dem Augenblick, wo sie handeln müssen, sich ganz von selbst nicht anders entscheiden wie jemand, der aus gesündestem Mißtrauen gegen die Idee deren sanfte Kraft durch die Wirkung irgendeines Knüttels verstärkt. Gibt es, anders gesagt, irgendeinen frommen Zweck, der sich nicht mit ein klein wenig Korruption und Berechnung der niederen menschlichen Eigenschaften ausstatten müßte, um in dieser Welt für ernst und ernst gemeint zu gelten ? Worte wie : binden, zwingen, in die Schraube nehmen, vor zerbrochenen Fensterscheiben nicht zurückscheuen, starke Methode, haben einen angenehmen Klang von Verläßlichkeit. Vorstellungen von der Art, daß der größte Geist, in einen Kasernhof gesteckt, binnen acht Tagen vor der Stimme eines Feldwebels springen lernt, oder daß ein Leutnant und acht Mann genügen, um jedes Rednerparlament der Welt zu verhaften, haben zwar erst später ihren klassischen Ausdruck in der Entdeckung gefunden, daß man mit einigen Löffeln Rhizinusöl, die man einem Idealisten einflößt, die unbeugsamsten Überzeugungen lächerlich machen kann, aber sie hatten schon lange, obgleich sie mit Entrüstung verfemt wurden, den wilden Auftrieb unheimlicher Träume. Es ist nun einmal so, daß zumindest der zweite Gedanke eines jeden Menschen, der vor eine überwältigende Erscheinung gestellt wird, und sei es auch, daß sie ihn durch ihre Schönheit überwältige, heute der ist : du wirst mir nichts vormachen, ich werde dich schon kleinkriegen ! Und diese Verkleinerungswut einer nicht nur mit allen Hunden gehetzten, sondern auch hetzenden Zeit ist wohl kaum noch die dem Leben natürliche Zweiteilung in Rohes und Hohes, weit eher ein selbstquälerischer Zug des Geistes, eine unaussprechliche Lust an dem Schauspiel, daß sich das Gute erniedrigen und wunderbar einfach zerstören lasse. Es sieht einem leidenschaftlichen Sich-selbst-Lügen-strafen-Wollen nicht unähnlich, und vielleicht ist es gar nicht das Trostloseste, an eine Zeit zu glauben, die mit dem Steiß voraus zur Welt gekommen ist und von des Schöpfers Händen bloß gewendet zu werden braucht.