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Le lan­gage des œuvres d’art est, comme tout lan­gage, consti­tué par un cou­rant col­lec­tif sou­ter­rain ; sur­tout celui des œuvres que le cli­ché cultu­rel consi­dère comme soli­taires, comme emmu­rées dans une tour d’i­voire ; leur sub­stance col­lec­tive s’ex­prime à par­tir de leur carac­tère ima­geant lui-même, et non pas comme le déclare le bavar­dage habi­tuel, à par­tir de ce qu’elles aime­raient dénon­cer au regard de la col­lec­ti­vi­té. L’accomplissement spé­ci­fi­que­ment artis­tique consiste à pré­sen­ter la force d’o­bli­ga­tion qui lui est inhé­rente, non pas en l’hy­po­sta­siant par la thé­ma­tique ou par l’ef­fet pro­duit dans sa sphère de « récep­tion », mais pas immer­sion dans ses expé­riences fon­da­men­tales, et donc de pré­sen­ter sous forme de monade ce qui se situe au-delà de la monade. Le résul­tat de l’oeuvre est à la fois la voie qui mène à son ima­go et cette ima­go qu’elle vise ; l’oeuvre est à la fois sta­tique et dyna­mique. L’expérience sub­jec­tive pro­duit des images qui ne sont pas des images de quelque chose, mais pré­ci­sé­ment des images d’es­sence col­lec­tive ; c’est ain­si et pas autre­ment que l’art est en rela­tion avec l’ex­pé­rience. Grâce à ce conte­nu d’ex­pé­rience et non seule­ment par fixa­tion et mise en forme dans l’ac­cep­tion usuelle, les œuvres d’art divergent de la réa­li­té empi­rique ; réa­li­té empi­rique par défor­ma­tion empi­rique. C’est là leur affi­ni­té avec le rêve, même si leur loi for­melle les éloigne de l’o­ni­risme. Cela ne signi­fie pas moins que le moment sub­jec­tif des œuvres d’art est média­ti­sé par leur être-en-soi. Sa col­lec­ti­vi­té latente libère l’oeuvre mona­do­lo­gique de la contin­gence de son indi­vi­dua­tion. La socié­té, « déter­mi­nante » de l’ex­pé­rience, consti­tue les œuvres en tant que sujet véri­table de celle-ci. C’est ce que l’on peut objec­ter au reproche de sub­jec­ti­visme adres­sé habi­tuel­le­ment de gauche et de droite. A tous les stades esthé­tiques, se renou­velle l’an­ta­go­nisme entre l’ir­réa­li­té de l’i­ma­go et la réa­li­té du conte­nu his­to­rique appa­rais­sant. Mais les images esthé­tiques s’é­man­cipent des images mythiques en se subor­don­nant à leur propre irréa­li­té ; la loi for­melle ne signi­fie rien d’autre. Cela consti­tue leur par­ti­ci­pa­tion à la Raison. Le point de vue de l’oeuvre d’art enga­gée ou dia­lec­tique est régres­sif par rap­port à cela. Sans tenir compte de la réa­li­té des images esthé­tiques, il réduit l’an­ti­thèse de l’art à la réa­li­té et l’in­tègre dans celle-ci, contre laquelle lutte l’art. Sont « éclai­rées » les œuvres d’art qui, dans une dis­tance inflexible par rap­port à la réa­li­té empi­rique, témoignent d’une conscience véri­dique.

Die Sprache der Kunstwerke ist wie eine jegliche vom kol­lek­ti­ven Unterstrom kons­ti­tuiert, zumal die sol­cher, die vom Kulturcliché als ein­sam, in den elfen­bei­ner­nen Turm ver­mauert sub­su­miert wer­den ; ihre kol­lek­tive Substanz spricht aus ihrem Bildcharakter selbst, nicht aus dem, was sie im direk­ten Hinblick auf Kollektive, wie die Phrase lau­tet, aus­sa­gen möch­ten. Die spe­zi­fisch künst­le­rische Leistung ist es, ihre über­grei­fende Verbindlichkeit nicht durch Thematik oder Wirkungszusammenhang zu erschlei­chen, son­dern durch Versenkung in ihre tra­gen­den Erfahrungen, mona­do­lo­gisch, vor­zus­tel­len, was jen­seits der Monade ist. Das Resultat des Werks ist eben­so die Bahn, die es zu sei­ner ima­go durch­mißt, wie diese als Ziel ; es ist sta­tisch und dyna­misch in eins. Subjektive Erfahrung bringt Bilder ein, die nicht Bilder von etwas sind, und gerade sie sind kol­lek­ti­ven Wesens ; so und nicht anders wird Kunst zur Erfahrung ver­mit­telt. Kraft sol­chen Erfahrungsgehalts, nicht erst durch Fixierung oder Formung im übli­chen Verstande wei­chen die Kunstwerke von der empi­ri­schen Realität ab ; Empirie durch empi­rische Deformation. Das ist ihre Affinität zum Traum, so weit sie auch ihre Formgesetzlichkeit den Träumen entrückt. Das besagt nicht weni­ger, als daß das sub­jek­tive Moment der Kunstwerke von ihrem Ansichsein ver­mit­telt sei. Seine latente Kollektivität befreit das mona­do­lo­gische Kunstwerk von der Zufälligkeit sei­ner Individuation. Gesellschaft, die Determinante der Erfahrung, kons­ti­tuiert die Werke als deren wahres Subjekt ; das ist dem rechts und links kur­ren­ten Vorwurf des Subjektivismus ent­ge­gen­zu­hal­ten. Auf jeder ästhe­ti­schen Stufe erneuert sich der Antagonismus zwi­schen der Unwirklichkeit der ima­go und der Wirklichkeit des erschei­nen­den ges­chicht­li­chen Gehalts. Von den mythi­schen Bildern aber eman­zi­pie­ren die ästhe­ti­schen sich dadurch, daß sie ihrer eige­nen Unwirklichkeit sich unte­rord­nen ; nichts anderes heißt Formgesetz. Das ist ihre Methexis an der Aufklärung. Dahinter regre­diert die Ansicht vom enga­gier­ten oder didak­ti­schen Kunstwerk. Unbekümmert um die Wirklichkeit der ästhe­ti­schen Bilder, ord­net sie die Antithesis der Kunst zur Realität ein und inte­griert sie in die Realität, die sie befeh­det. Aufgeklärt sind die Kunstwerke, welche in unnach­gie­bi­ger Distanz von der Empirie rich­tiges Bewußtsein bezeu­gen.

Théorie esthé­tique [1970]
Klincksieck 1974
adorno collectivité dialectique empirisme hypostasie imago légalité monade opinion rêve statique/dynamique subjectivité