23 01 17

Libera, Entretien avec Actu philosophia

l’archéologie arti­cule l’étude des struc­tures à une forme d’ensemble de type nar­ra­tif qui induit un récit dans la longue durée, au sens de Fernand Braudel. L’une de mes ambi­tions avec cette méthode archéo­lo­gique (et en par­ti­cu­lier avec mon Archéologie du sujet) est d’introduire le long cours en his­toire de la phi­lo­so­phie. Il s’agit donc de déga­ger des struc­tures pour les nar­ra­ti­vi­ser, d’où cette notion d’intrigue que je reprends à Paul Veyne. Comme tout autre his­to­rien, l’historien de la phi­lo­so­phie « raconte des intrigues », qui sont « autant d’itinéraires qu’il trace » à tra­vers un champ évé­ne­men­tiel objec­tif « divi­sible à l’infini » : il ne peut « décrire la tota­li­té de ce champ, car un iti­né­raire doit choi­sir et ne peut pas­ser par­tout » ; aucun des iti­né­raires qu’il emprunte « n’est le vrai », aucun « n’est l’Histoire ». Le champ évé­ne­men­tiel de la phi­lo­so­phie « ne com­prend pas des sites qu’on irait visi­ter et qui s’appelleraient évé­ne­ments » : « un évé­ne­ment n’est pas un être, mais un croi­se­ment d’itinéraires pos­sibles ». Voilà ce que dit Veyne. J’essaie, sur ses pas, de croi­ser le maxi­mum d’itinéraires.
[…] Trop sou­vent, en his­toire de la phi­lo­so­phie, où est cen­sée régner la Problemgeschichte, il n’y a pas vrai­ment d’histoire des pro­blèmes, dans la mesure ou ce que les his­to­riens de la phi­lo­so­phie appellent « his­toire des pro­blèmes » coïn­cide plu­tôt, me semble-t-il, avec l’histoire des réponses appor­tées à un archi­pro­blème sup­po­sé « per­ma­nent ». Or l’une de mes convic­tions est qu’il n’y a pas de pro­blème éter­nel ou inva­riant et que chaque pro­blème peut (et doit) faire l’objet d’une genèse. C’est ce que je disais tout à l’heure en invo­quant chez Guéroult le croi­se­ment de l’évolution et de la struc­ture.

,
« Entretien avec Actu phi­lo­so­phia »
, , lien