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Grade die schwächs­ten Leistungen der Kunst bezie­hen sich auf das unmit­tel­bare Gefühl des Lebens, die stärks­ten aber, ihrer Wahrheit nach, auf eine dem Mythischen ver­wandte Sphäre : das Gedichtete. Das Leben ist all­ge­mein das Gedichtete der Gedichte — so ließe sich sagen ; doch je unver­wan­del­ter der Dichter die Lebenseinheit zur Kunsteinheit über­zufüh­ren sucht, des­to mehr erweist er sich als Stümper. Diese Stümperei als »unmit­tel­bares Lebensgefühl«, »Herzenswärme«, als »Gemüt« ver­tei­digt, ja gefor­dert zu fin­den, sind wir gewohnt.
Trad 1 : Les plus faibles pro­duc­tions de l’art ren­voient au sen­ti­ment immé­diat de la vie, tan­dis que les plus fortes, selon leur véri­té, à une sphère parente de l’élément mythique : le poé­ma­tique. Le vivant est com­mu­né­ment le poé­ma­tique des poèmes – pour­rait-on dire ; cepen­dant plus le poète s’efforce de trans­po­ser la viva­bi­li­té en artis­ti­sable, plus il est un bou­silleur. Ce bou­sillage nous avons l’habitude de le récla­mer et de le défendre comme « vivant immé­diat », « cha­leur du cœur », « vigueur ».
Trad 2 : Le noyau poé­tique se révèle donc comme pas­sage de l’u­ni­té fonc­tion­nelle de la vie á celle du poème. En lui la vie se déter­mine par le poème, la tâche par la solu­tion. Le fon­de­ment n’est pas la tona­li­té indi­vi­duelle qui enve­loppe la vie de l’ar­tiste, mais un hori­zon de vie déter­mi­né par l’art. Les caté­go­ries dans les­quelles il est pos­sible d’ap­pré­hen­der cette sphère, la sphère du pas­sage entre les deux uni­tés fonc­tion­nelles, ne sont pas for­mée d’a­vance, et s’ap­puient peut-être en pre­mier lieu sur les concepts du mythe. Ce sont pré­ci­sé­ment les plus faibles pro­duc­tions de l’art qui se réfèrent au sen­ti­ment immé­diat de la vie, tan­dis que les plus puis­santes, selon leur véri­té, ren­voient à une sphère parente de l’élé­ment mythique : au noyau poé­tique. La vie, pour­rait-on dire, est glo­ba­le­ment le noyau poé­tique des poèmes ; pour­tant, plus le poète s’ef­force de trans­po­ser telle quelle l’u­ni­té de vie en uni­té artis­tique, plus il se révèle un bou­silleur. Ce bou­sillage, nous sommes accou­tu­més à le voir défen­du, voire récla­mé, comme « sen­ti­ment immé­diat de la vie », « cha­leur du cœur », « pro­fon­deur d’âme ».

« Deux poèmes de Friedrich Hölderlin »
Œuvres [1914]
t. 1
Folio 2000
p. 91sv.
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