18 06 17

Nietzsche ne dit pas que la pen­sée de l’Éternel Retour et de la pré­exis­tence qu’elle sup­pose achève à elle seule le fata­lisme. Il dit qu’en second lieu c’est pour avoir éli­mi­né le concept de volon­té que son fata­lisme est inté­gral. Si déjà la pen­sée de l’Éternel Retour dans ses pro­lon­ge­ments abo­lit avec l’identité du moi le concept tra­di­tion­nel du vou­loir, Nietzsche semble, sous le second aspect de son fata­lisme, faire allu­sion à sa propre phy­sio­lo­gie. Selon celle-ci, il n’y a pas de vou­loir qui n’en soit un de puis­sance et sous ce rap­port la volon­té n’est autre chose que l’impul­sion pri­mor­diale dont aucune inter­pré­ta­tion morale à par­tir de l’intellect ne sau­rait jamais sus­pendre les innom­brables méta­mor­phoses qu’elle tra­verse, les figures qu’elle adopte, les pré­textes qui les pro­voquent, soit le but invo­qué, soit le sens que, dans ces méta­mor­phoses, cette impul­sion, au niveau de la conscience, pré­tend se don­ner. De la sorte, la fata­li­té se confon­drait avec la force impul­sion­nelle qui, pré­ci­sé­ment, excède le « vou­loir » du sup­pôt et déjà le modi­fie, donc menace son iden­ti­té stable.

Nietzsche et le cercle vicieux
Mercure de France 1969
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