Un sophisma est une proposition qui met en jeu certaines caractéristiques d’un (ou plusieurs) syncatégorème(s) donné(s). Le jeu consiste à distinguer différents sens à cette proposition, déterminer pour chacun d’entre eux sa valeur de vérité et, surtout, la mesure dans laquelle il peut être justifié par une action syncatégorématique. En principe, donc, chaque sophisma – ou chaque famille de sophismata – est une occasion d’évaluer une situation sémantique impliquant le fonctionnement de certains mots du langage. La littérature des sophismata, c’est la ligne de front, le lieu où l’analyse logique rencontre les phénomènes sémantiques. Si la prudence invite à ne pas convoquer hâtivement l’idée de sémantique (formelle) du langage naturel, il convient néanmoins de reconnaître les ambitions descriptives de l’approche médiévale : on recense plus de mille sophismata différents, répartis en quelques trois mille occurrences et représentant une impressionnante gamme de problèmes. Or, selon le constat des tenants de la philosophie du langage ordinaire, chercher à intégrer le plus de phénomènes possibles peut – doit ? – conduire à s’interroger sur les limites d’une analyse logique, sur l’intérêt d’intégrer des critères pragmatiques. Si donc il y a au XIIIe siècle une frontière claire entre sémantique et pragmatique, si certains veulent la repousser ou y ouvrir des passages, c’est là que les choses devraient se passer.
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Goubier, Dire et vouloir dire dans la logique médiévale : Quelques jalons pour situer une frontière
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« Dire et vouloir dire dans la logique médiévale : Quelques jalons pour situer une frontière »
, Methodos n° 14
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