Suppose qu’un homme ait cette notion qu’il existe [quelque chose qu’on appelle] un navire, sans pourtant savoir si la choses à laquelle s’applique ce nom est une substance ou un accident ; qu’ensuite une autre individu ait reconnu que ce n’est point un accident ; un autre ensuite, que ce n’est point un minéral ; un autre, que ce n’est pas non plus un animal ; un autre, que ce n’est pas non plus un végétal encore attaché à la terre ; un autre, que ce n’est pas non plus un seul corps formant un ensemble naturel ; un autre, que ce n’est pas non plus quelque chose qui ait une forme plane, comme les planches et les portes ; un autre, que ce n’est pas non plus une sphère ; un autre, que ce n’est pas non plus quelque chose de [forme conique] ; un autre, que ce n’est pas non plus quelque chose de circulaire, ni quelque chose qui ait des côtés plans ; un autre enfin, que ce n’est pas non plus un solide plein ; – il est clair que ce dernier sera arrivé à peu près, au moyen de ces attributs négatifs, à se figurer le navire tel qu’il est, et qu’il se trouvera, en quelque sorte, au niveau de celui qui se le figure comme un corps de bois, creux, oblong et composé de nombreux morceaux de bois, et qui se le représente au moyen d’attributs affirmatifs. Quant aux précédents dont nous avons parlé dans notre exemple, chacun d’eux est plus loin de se faire une idée du navire que celui qui le suit, de sorte que le premier, dans notre exemple, n’en sait autre chose le nom seul.
C’est ainsi que les attributs négatifs te rapprochent de la connaissance de Dieu et de sa perception.
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Maïmonide, Le Guide des égarés
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Le Guide des égarés [מורה נבוכים ; دلالة الحائرين 1190]
,
t. 1
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chap. 60
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trad.
de l’arabe par Salomon Munk (1856–1866), nouvelle édition revue et mis à jour sous la dir. de René Lévy, avec la coll. de Maroun Aouad
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p. 286–287