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Derrière le sys­tème ache­vé, ce que découvre l’a­na­lyse des for­ma­tions, ce n’est pas, bouillon­nante, la vie elle-même, la vie non encore cap­tu­rée ; c’est une épais­seur immense de sys­té­ma­ti­ci­tés, un ensemble ser­ré de rela­tions mul­tiples. Et de plus, ces rela­tions ont beau n’être pas la trame même du texte, elles ne sont pas par nature étran­gères au dis­cours. On peut bien les qua­li­fier de « pré­dis­cur­sives », mais à condi­tion d’ad­mettre que ce pré­dis­cur­sif est encore du dis­cur­sif, c’est-à-dire qu’elles ne spé­ci­fient pas une pen­sée, ou une conscience ou un ensemble de repré­sen­ta­tions qui seraient, après coup et d’une façon jamais tout à fait néces­saire, trans­crits dans un dis­cours, mais qu’elles carac­té­risent cer­tains niveaux du dis­cours, qu’elles défi­nissent des règles qu’il actua­lise en tant que pra­tique sin­gu­lière. On ne cherche donc pas à pas­ser du texte à la pen­sée, du bavar­dage au silence, de l’ex­té­rieur à l’in­té­rieur, de la dis­per­sion spa­tiale au pur recueille­ment de l’ins­tant, de la mul­ti­pli­ci­té super­fi­cielle à l’u­ni­té pro­fonde. On demeure dans la dimen­sion du dis­cours.

L’archéologie du savoir
Gallimard 1969
p. 101