Il existe depuis des siècles un thème dont la banalité porte jusqu’au dégoût, c’est le thème que tout le monde finalement est un peu philosophe.
Thème que le discours philosophique écarte aussitôt pour faire apparaître celui-ci, à savoir que la philosophie est une tâche spécifique, en retrait et à distance de toutes les autres et qui ne peut se réduire à aucune autre. Mais thème que le discours philosophique reprend non moins régulièrement pour affirmer que la philosophie n’est rien d’autre que le mouvement de la vérité elle-même, qu’elle est la conscience prenant conscience de soi – ou qu’il est déjà philosophe celui qui s’éveille au monde. […]
Le vieux thème millénaire du « tout le monde est plus ou moins philosophe » a une fonction précise et assignable dans l’histoire occidentale : il ne s’agit ni plus ni moins que du bouclage du désir de connaître dans la connaissance elle-même.
[Ce que Foucault reformule au début du cours suivant :] De sorte que la connaissance était préalable à ce désir qui la concernait ; et que ce désir lui-même n’était rien d’autre qu’une sorte de retard de la connaissance par rapport à soi, désir corrélatif au délai qui la retardait pour atteindre d’un coup sa vraie nature, à savoir la contemplation.