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L’archive n’est pas non plus ce qui recueille la pous­sière des énon­cés deve­nus inertes et per­met le miracle éven­tuel de leur résur­rec­tion ; c’est ce qui défi­nit le mode d’actualité de l’énoncé-chose ; c’est le sys­tème de son fonc­tion­ne­ment[…] Entre la langue qui défi­nit le sys­tème de construc­tion des phrases pos­sibles, et le cor­pus
qui recueille pas­si­ve­ment les paroles pro­non­cées, l’archive défi­nit un niveau par­ti­cu­lier : celui d’une pra­tique qui fait sur­gir une mul­ti­pli­ci­té d’énoncés comme autant d’événements régu­liers, comme autant de choses offertes au trai­te­ment et à la mani­pu­la­tion. Elle n’a pas la lour­deur de la tra­di­tion ; et elle ne consti­tue pas la biblio­thèque sans temps ni lieu de toutes les biblio­thèques ; mais elle n’est pas non plus l’oubli accueillant qui ouvre à toute parole nou­velle le champ d’exercice de sa liber­té ; entre la tra­di­tion et l’oubli, elle fait appa­raître les règles d’une pra­tique qui per­met aux énon­cés à la fois de sub­sis­ter et de se modi­fier régu­liè­re­ment.

L’archéologie du savoir
Gallimard 1969
p. 171
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