Un nœud de honte en moi : avoir été quelqu’un qui parlait librement, abondamment et passionnément à l’école secondaire, puis arriver à l’université et réaliser que j’étais en passe de devenir une de ces personnes qui font lever les yeux au ciel : et la voilà repartie. Ç’aura pris du temps et du trouble, mais finalement j’ai appris à arrêter de parler, à être une observatrice (à jouer à l’être, en fait). Ce jeu m’a menée à écrire énormément dans les marges de mes cahiers de notes ; du matériel que j’ai ensuite pillé pour faire des poèmes.
Me forcer à me taire, déverser le langage sur le papier à la place : c’est devenu une habitude. Mais maintenant je suis également revenue à une parole abondante, sous la forme de l’enseignement.
Parfois, quand j’enseigne, quand je glisse un commentaire sans que personne ne m’en empêche, sans me préoccuper du fait que j’ai déjà pris la parole il y a un instant, ou quand j’interromps quelqu’un pour rediriger la conversation loin d’une zone que je trouve personnellement stérile, je suis grisée par la certitude que je peux parler autant que je veux, aussi rapidement que je le veux, dans tous les sens, sans que personne ne puisse ouvertement lever les yeux au ciel ou suggérer que j’aille en thérapie. Je ne dis pas que c’est de la bonne pédagogie. Je dis que la satisfaction en est profonde.
Shame-spot : being someone who spoke freely, copiously, and passionately in high school, then arriving in college and realizing I was in danger of becoming one of those people who makes everyone else roll their eyes : there she goes again. It took some time and trouble, but eventually I learned to stop talking, to be (impersonate, really) an observer. This impersonation led me to write an enormous amount in the margins of my notebooks— marginalia I would later mine to make poems.
Forcing myself to shut up, pouring language onto paper instead : this became a habit. But now I’ve returned to copious speaking as well, in the form of teaching.
Sometimes, when I’m teaching, when I interject a comment without anyone calling on me, without caring that I just spoke a moment before, or when I interrupt someone to redirect the conversation away from an eddy I personally find fruitless, I feel high on the knowledge that I can talk as much as I want to, as quickly as I want to, in any direction that I want to, without anyone overtly rolling her eyes at me or suggesting I go to speech therapy. I’m not saying this is good pedagogy. I am saying that its pleasures are deep.