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Macpherson, La théorie politique de l’individualisme possessif

Nous sommes désor­mais en mesure d’i­den­ti­fier les pos­tu­lats d’ordre social com­muns aux théo­ries poli­tiques les plus impor­tantes du XVIIe siècle et d’ap­pré­cier le rôle qu’elles y jouent. Du même coup, il est nous est pos­sible de com­prendre les pro­blèmes qu’ils posent à la démo­cra­tie libé­rale aujourd’­hui.

En tant qu’af­fir­ma­tion d’une pro­prié­té, l’in­di­vi­dua­lisme repose sur une série de pos­tu­lats que résument assez bien les sept pro­po­si­tions sui­vantes :

Proposition I : L’homme ne pos­sède la qua­li­té d’homme que s’il est libre et indé­pen­dant de la volon­té d’au­trui.

Proposition II : Cette indé­pen­dance et cette liber­té signi­fient que l’homme est libre de n’en­tre­te­nir avec autrui d’autres rap­ports que ceux qu’il éta­blit de son plein gré et dans son inté­rêt per­son­nel.

Proposition III : L’individu n’est abso­lu­ment pas rede­vable à la socié­té de sa per­sonne ou de ses facul­tés, dont il est le pro­prié­taire exclu­sif.

[…]

Proposition IV : L’individu n’a pas le droit d’a­lié­ner tota­le­ment sa per­sonne, qui lui appar­tient en propre ; mais il a le droit d’a­lié­ner sa force de tra­vail.

Proposition V : La socié­té humaine consiste en une série de rap­ports de mar­ché.

[…]

Proposition VI : Puisque l’homme ne pos­sède la qua­li­té d’homme que s’il est libre et indé­pen­dant de la volon­té d’au­trui, la liber­té de chaque indi­vi­du ne peut être légi­ti­me­ment limi­tée que par les obli­ga­tion et les règles néces­saires pour assu­rer à tous la même liber­té et la même indé­pen­dance.

Proposition VII : La socié­té poli­tique est d’ins­ti­tu­tion humaine : c’est un moyen des­ti­né à pro­té­ger les droits de l’in­di­vi­du sur sa per­sonne et sur ses biens, et (par consé­quent) à faire régner l’ordre dans les rap­ports d’é­change que les indi­vi­dus entre­tiennent en tant que pro­prié­taires de leur propre per­sonne.

[…]

Les pos­tu­lats de l’in­di­vi­dua­lisme […] sont par­ti­cu­liè­re­ment adap­tés aux socié­tés de mar­ché géné­ra­li­sé, car ils en expriment cer­tains aspects essen­tiels. C’est un fait que, dans ce type de socié­té, l’homme n’est homme que dans la mesure où il est son propre pro­prié­taire ; c’est un fait que son huma­ni­té dépend de sa liber­té de n’é­ta­blir avec ses sem­blables que des rap­ports contrac­tuels fon­dés sur son inté­rêt per­son­nel ; c’est éga­le­ment un fait que cette socié­té consiste en une série de rap­ports de mar­ché.

We are now in a posi­tion to consi­der the extent to which some iden­ti­fiable social assump­tions are com­mon to the main seven­teenth-cen­tu­ry poli­ti­cal theo­ries, and how they are rele­vant to the pro­blems of later libe­ral-demo­cra­tic socie­ty. The assump­tions which com­prise pos­ses­sive indi­vi­dua­lism may be sum­ma­ri­zed in the fol­lo­wing seven pro­po­si­tions.

(i) What makes a man human is free­dom from depen­dence on the wills of others.

(ii) Freedom from depen­dence on others means free­dom from any rela­tions with others except those rela­tions which the indi­vi­dual enters volun­ta­ri­ly with a view to his own inter­est.

(iii) The indi­vi­dual is essen­tial­ly the pro­prie­tor of his own per­son and capa­ci­ties, for which he owes nothing to socie­ty.

[…]

(iv) Although the 1nd1v1dual can­not alie­nate the whole of his pro­per­ty in his own per­son, he may alie­nate his capa­ci­ty to labour.

(v) Human socie­ty consists of a series of mar­ket rela­tions.

(vi) Since free­dom from the wills of others is what makes a man human, each indi­vi­dual’s free­dom can right­ful­ly be limi­ted only by such obli­ga­tions and rules as are neces­sa­ry to secure the same free­dom for others.

(vii) Political socie­ty is a human contri­vance for the pro­tec­tion of the indi­vi­dual’s pro­per­ty in his per­son and goods, and (the­re­fore) for the main­te­nance of order­ly rela­tions of exchange bet­ween indi­vi­duals regar­ded as pro­prie­tors of them­selves.

[…]

The assump­tions of pos­ses­sive indi­vi­dua­lism are pecu­liar­ly apro­priate to a pos­ses­sive mar­ket socie­ty, for they state cer­tain essen­tial facts that are pecu­liar to that socie­ty. The indi­vi­dual in a pos­ses­sive mar­ket socie­ty is human in his capa­ci­ty as pro­prie­tor of his own per­son ; his huma­ni­ty does depend on his free­dom from any but self-inter­es­ted contrac­tual rela­tions with others ; his socie­ty does consist of a series of mar­ket rela­tions.