L’érotisme est, je crois, l’approbation de la vie jusque dans la mort. La sexualité implique la mort, non seulement dans le sens où les nouveaux venus prolongent et remplacent les disparus, mais parce qu’elle met en jeu la vie de l’être qui se reproduit. Se reproduire est disparaître, et les êtres asexués les plus simples se subtilisent en se reproduisant. Ils ne meurent pas, si, par la mort, on entend le passage de la vie à la décomposition, mais celui qui était, se reproduisant, cesse d’être celui qu’il était (puisqu’il devient double). La mort individuelle n’est qu’un aspect de l’excès proliférateur de l’être. La reproduction sexuée n’est elle-même qu’un aspect, le plus compliqué, de l’immortalité de la vie gagée dans la reproduction asexuée. De l’immortalité, mais en même temps de la mort individuelle. Nul animal ne peut accéder à la reproduction sexuée sans s’abandonner au mouvement dont la forme accomplie est la mort. De toute façon, le fondement de l’effusion sexuelle est la négation de l’isolement du moi, qui ne connaît la pâmoison qu’en s’excédant, qu’en se dépassant dans l’étreinte où la solitude de l’être se perd.
19 01 16