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Ces mondes de légende étaient crus vrais, en ce sens qu’on n’en dou­tait pas, mais on n’y croyait pas comme on croit aux réa­li­tés qui nous entourent. Pour le peuple des fidèles, les vies de mar­tyrs rem­plies de mer­veilleux se situaient dans un pas­sé sans âge, dont on savait seule­ment qu’il était anté­rieur, exté­rieur et hété­ro­gène au temps actuel.
[…] [Pour les Grecs], le monde mythique n’é­tait pas empi­rique : il était noble. Ce n’est pas à dire qu’il ait incar­né ou sym­bo­li­sé les « valeurs » : on ne voit pas que les géné­ra­tions héroïques aient davan­tage culti­vé les ver­tus que les hommes d’au­jourd’­hui ; mais elles avaient plus de « valeur » que ceux-ci : un héros est plus qu’un homme, de même qu’aux yeux de Proust une duchesse a plus de valeur qu’une bour­geoise.

Les Grecs ont-ils cru à leurs mythes ?
Seuil 1983
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