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« Vous êtes Tobold, n’est-ce pas, et à par­tir d’au­jourd’­hui, vous entrez au ser­vice de Monsieur le comte comme domes­tique com­tal. On espère que chez nous, ici, donc, vous serez zélé, loyal, ponc­tuel, poli, cour­tois, hon­nête, tra­vailleur, conscien­cieux, et docile en tout temps. Votre aspect est satis­fai­sant, espé­rons que votre conduite don­ne­ra éga­le­ment satis­fac­tion. Dès main­te­nant, vous devez essayer d’at­té­nuer et de raf­fi­ner tous vos mou­ve­ments. Les natures car­rées et bruyantes ne sont pas appré­ciées, ici au châ­teau, et elles ne le seront jamais. Veuillez en prendre note une fois pour toutes. Vous devez abso­lu­ment savoir qu’i­ci, on parle à voix basse, et que chaque geste doit être en tout temps élé­gant et pon­dé­ré. Polissez au plus vite tout ce que votre com­por­te­ment pour­rait encore avoir de rude et de gros­sier. Essayez dès le pre­mier jour, si c’est en votre pou­voir, de poser le pied sur le par­quet avec une extrême cir­cons­pec­tion. Monsieur le comte est par­ti­cu­liè­re­ment sen­sible sur ce point. Soyez rapide, vif, pré­cis, atten­tif et silen­cieux. Pour le reste, je vous recom­mande d’af­fi­cher un air froid et impas­sible. Vous allez apprendre tout cela très vite, car par chance, vous n’a­vez pas du tout l’air inin­tel­li­gence. Vous pou­vez dis­po­ser. »

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« Tobold » Petite prose [1917]
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trad.  Marion Graf
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p. 155