18 04 21

Depuis le temps que vous vou­liez qu’on se parle et qu’on se tai­sait, cette fois on va par­ler. On sait bien que pour la plu­part d’entre vous, vous vou­lez sim­ple­ment nous aider. Chacun à votre manière, vous avez tout essayé. Vous avez été sévère, laxiste, patient, impa­tient, pré­ve­nant ou loin­tain ; vous avez réflé­chi, dis­cu­té entre vous, avec nous, avec l’ad­mi­nis­tra­tion.

Vous nous avez dit tel­le­ment de choses, nous on disait rien ou si peu, on se tai­sait, on sou­riait. Vous nous disiez : chez moi ça rigole pas on tra­vaille, ou bien ici on rigole mais on bosse, ou bien si vous ne faites rien ne déran­gez pas vos cama­rades qui eux… ou bien faites un effort ! ou bien Monsieur Untel vous croyez qu’au tra­vail vous pour­rez arri­ver en retard ? ou bien ah c’est toi va t’as­seoir, ou bien répon­dez ? per­sonne ne sait ? ou bien en dix ans de car­rière je n’ai jamais vu ça ! ou bien si vous avez un pro­blème pas­sez me voir à la fin du cours, ou bien allez‑y posez des ques­tions ! et aus­si j’ai une fille de votre âge, on se tait quand je parle, Messieurs, pre­nez une feuille, répé­tez ce que je viens de dire, allez me cher­cher un billet, je vous pré­viens avec moi ça ne sera pas comme avec Monsieur Machin.

Et bien si ! C’est pareil, vous avez tout essayé ça n’a rien chan­gé. Vous nous avez sou­te­nus au conseil, vous avez vu nos parents, vous vous êtes dit : « et si c’é­tait mon fils », vous avez tra­vaillé, recom­men­cé, pré­pa­ré des cours, des visites, des stages, des expo­sés, des sor­ties, on a bu des cafés ensemble, vous avez fait grève, vous avez gueu­lé, pleu­ré peut-être, ça n’a rien chan­gé.

Années après années, nous étions ava­lés par le lami­noir social, les élèves que vous avez sau­vés, vous les por­tez comme des déco­ra­tions, elles sont méri­tées, quel bou­lot pour cha­cun d’eux ! Mais c’est pas pos­sible pour tout le monde !

Le pro­blème c’é­tait pas nous, c’é­tait pas vous, c’est tout le reste !

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