Vous m’avez fait venir pour que je vous raconte quelque chose sur un poète de ce temps ou bien encore sur quelques poètes ou sur la poésie en général. Vous aimez entendre, pense-t-on certainement, ce dont j’aime parler. Nous sommes tous jeunes et ainsi, rien ne saurait apparemment être plus commode et plus anodin. Je crois réellement qu’il ne me serait pas très difficile d’assembler quelques centaines d’adjectifs et de verbes de telle façon qu’ils nous feraient plaisir un quart d’heure. En premier lieu, je le crois précisément parce que je sais que nous sommes tous jeunes et que je peux à peu près m’imaginer par qui vous aimez être menés. Il est passablement facile d’entrer par la flatterie dans les bonnes grâces de la génération à laquelle on appartient. « Nous » est une belle parole, les pays des contemporains de notre vie se déroulent comme de grands arrière-plans jusqu’aux océans et même jusqu’aux étoiles et, sous nos pieds, reposent les passés, allongés dans des abîmes transparents comme des prisonniers. Et de parler de la littérature de notre temps, il y a différentes façons qui sont plaisantes.
20 07 24
Hoffmanstall, Lettre de Lord Chandos et autres textes
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trad.
Albert Kohn
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p. 21