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Défonçant le mur d’une sub­jec­ti­vi­té déjà empri­son­née par l’histoire, l’économie poli­tique déborde à l’intérieur de chaque être ; rapi­de­ment elle comble tout vide, en le cachant tout sim­ple­ment. Au moment où l’identique se repro­duit de façon homo­gène, il perd les traits de la pri­son qu’il a tou­jours été, et prends les traits de l’entreprise capi­ta­liste. Chaque entre­prise pro­duc­tive est un hôtel des mon­naies depuis que l’argent s’est trans­sub­stan­tia­li­sé en cré­dit, et le capi­tal fic­tif valo­ri­sé grâce au « bon » renom de l’entreprise. Chaque entre­prise frappe sa mon­naie inexis­tante ; on lit par trans­pa­rence, au-delà de la façade, l’addition tru­quée de son châ­teau d’escompte. De la même façon en cha­cun le capi­tal crée un entre­pre­neur de lui-même : en fon­dant toute « per­son­na­li­té » à l’image d’une entre­prise, la lan­çant dans la cir­cu­la­tion apo­plec­tique du cré­dit, là où il n’y a pour cir­cu­ler que la géné­ra­li­té du non avoir. Le capi­tal qui se fait homme fait de chaque homme le capi­tal, de toute vie l’entreprise de la valeur, de chaque « per­sonne » une firme débi­trice en per­ma­nence de son sens, cré­di­trice en per­ma­nence du non-sens géné­ra­li­sé.

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Apocalypse et révo­lu­tion [Invariance, année IX, série III, n°2 et 3, 1976–1977]
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chap. 4  : « Chirurgie esthé­tique »
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trad.  Lucien Laugier
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p. 102 § 47