La situation hégémonique des armateurs de Phocée les poussa à la démesure, tant qu’ils évoluaient du médiocre commerce intérieur vers l’acquisition de marchandises venues d’univers nouveaux, leur personnalité s’était modifiée, ils avaient entre leurs mains la chose la plus précieuse, jadis monopole des rois, le métal, et celui qui le gérait avait les moyens de dominer l’État. Mais plus leurs sources s’avéraient inépuisables, plus il s’attachaient à souligner la grâce que leur réservaient les dieux. Eux qui ne faisaient aucun cadeau se vantaient des dons que leur avaient faits les dieux. D’avoir pour guides les divinités les encouragea peut-être au début, mais plus les richesses se concrétisaient, devenaient chiffrables, plus ils surent apprécier matériellement les forces liées au pouvoir, le sublime fut subordonné à leur sens pratique, pour finir ils s’associèrent aux divinités uniquement sur les pièces de monnaie sur lesquelles ils firent graver leur portrait. C’était l’aboutissement parfait de la parabole sur la transmission de la toute-puissance, celui qui possédait les monnaies était également le représentant de la volonté divine. On pouvait désormais déterminer avec précision le niveau des faveurs accordées, la notion de divinité se convertissait en or, en argent, se pesait, rassemblée dans des bourses, des sacs, des coffres-forts. Sachant que les biens ne revenaient pas aux démons mais à ceux qui s’en étaient emparés par la force, en répandant la terreur, et sachant aussi que la magie appartenait encore au royaume des esprits, ils associèrent le concret aux mystères de l’insondable. Si bien qu’à la naissance de l’économie monétaire restèrent liées la croyance au sacré, la vénération des donateurs invisibles – détournant ainsi l’attention du principe de l’exploitation et de l’oppression. Le capitalisme vint des temples, consacré par les formules magiques et les flammes des sacrifices. Les plus célèbres représentations des créatures de l’Olympe ne furent réalisées qu’après la création des banques, le début des spéculations mondiales : jusqu’à nos jours ce furent Athéna et Zeus qui présidèrent les conseils d’administration.
05 02 21
Weiss, L’Esthétique de la résistance
Den Reedern aus Phokaia wurde die gewonnene Vormachtstellung bald zur Hybris, der Durchbruch vom kleinlichen Binnenhandel zur Warengewinnung aus neuen Welten hatte ihre Persönlichkeit verändert, das Wertvollste, vormals Monopol der Könige, hatten sie in ihre Hände gebracht, das Metall, und wer dieses verwaltete, war imstande, den Staat zu beherrschen. Je unerschöpflicher aber ihre Quellen sich zeigten, desto mehr waren sie drauf bedacht, ihre Begnadung durch die Götter zu unterstreichen. Sie, die nichts verschenkten, brüsteten sich damit, von den Göttern beschenkt worden zu sein. Vielleicht ermutigte es sie anfangs tatsächlich, daß die Himmlischen sie führten, doch je greifbarer, errechenbarer die Reichtümer wurden, desto sachlicher wußten sie auch die lenkenden Kräfte zu bewerten, das Sublime wurde ihrem praktischen Sinn unterworfen, schließlich verbanden sie sich den Gottheiten nur noch in den Münzen, in die sie deren Angesicht prägten. Hier war auf vollendete Weise ein Gleichnis vollzogen worden von der Übertragung der Allmacht, wer die Münzen besaß, war auch Träger des göttlichen Willens. Genau ließen die Grade der Bevorteilung sich nun bestimmen, der Götterbegriff wurde nutzbar in Gold, in Silber, wurde ausgewogen, gesammelt in Beuteln, Säcken, Tresoren. Wissend, daß nicht Dämonen die Güter zustanden, sondern ihnen, die sie an sich rissen mit Gewalt, mit der Verbreitung von Schrecken, und wissend auch von der Magie, die dem Reich der Geister noch angehörte, vereinten sie das Faßbare mit dem Unergründlichen. So blieb mit der entstehenden Geldwirtschaft, als Ablenkung vom Prinzip der Ausbeutung und Unterdrückung, der Glaube ans Heilige, die Verehrung unsichtbarer Spender verknüpft. Der Kapitalismus kam aus den Tempeln, geweiht von Zaubersprüchen und Opferfeuern. Die berühmtesten Abbilder olympischer Wesen entstanden erst nach der Gründung der Banken, dem Beginn der weiträumigen Spekulationen, bis in die Gegenwart präsidierten Athena und Zeus in den Aufsichtsräten.
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L’Esthétique de la résistance [Die Ästhetik des Widerstands (1971–1981)]
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trad.
Eliane Kaufholz-Messmer
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p. 311–312