01 08 25

Bloch, Le Principe Espérance

Un corps repu n’aurait aucune rai­son de se plaindre. S’il n’était pri­vé ni de vête­ments, ni d’abri, autre­ment dit de presque tout. S’il n’était pri­vé d’amis et si la vie se dérou­lait faci­le­ment et pai­si­ble­ment au lieu d’être la tour­mente qu’elle est deve­nue pour la plu­part des hommes. Mais voi­là, ce n’est que dans la fable, tou­jours très révé­la­trice, et le conte poli­tique que l’on ren­contre les petites-tables-qui-se-dressent-toutes-seules et le pays de cocagne. Tout comme la Fontaine de Jouvence dans l’image-souhait médi­cale, le pays de cocagne confine lui aus­si à l’utopie sociale, il en est le pré­lude joyeux. Tous les hommes y sont égaux, c’est-à-dire qu’ils y sont tous bien lotis, et il n’y est ques­tion ni d’effort pénible, ni de tra­vail. Les alouettes rôties leur tombent dans la bouche et ce qui y est espé­ré est déjà gagné ; tout rêve et toute chose s’offrent d’eux-mêmes comme des biens d’usage courant.

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trad.  Françoise Wuilmart
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p. 36