13 02 22

Sur les berges du fleuve qui tra­verse la ville, une pièce d’un euro dans la vase, l’effigie du roi d’Espagne au pied du châ­teau d’Amboise, tout crot­té.
Dans les jar­dins autour de nous, l’indésirable, ou le sur­gis­se­ment du prin­temps, se résume à l’apparition de pâque­rettes sur les pelouses.
Cela déferle, une gelée grise, vague for­mée de nano-machines, masse homo­gène et inco­lore de machines invi­sibles à l’œil nu, et qui se répliquent d’une manière effré­née.
La crainte com­mune d’un com­plet rem­plis­sage, le com­plot de la ter­reur-du-rem­plis­sage, et sa réponse, le désir de faire le vide, le désir de vider.
Je ne passe jamais devant un fétiche de bois, un Bouddha doré, une idole mexi­caine sans me dire : c’est peut-être le vrai dieu.
Les sculp­tures de jar­din, les peluches, l’ensemble des ani­maux for­més par les mains de l’homme dans le lotis­se­ment, jetés dans un creu­set, fon­dus tous ensemble jusqu’à deve­nir une masse homo­gène, une lave.

La gelée du vivant
Zoème 2022
p. 52