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On ne dira pas que le géo­mètre ou le gram­mai­rien, ensei­gnant ces véri­tés aux­quelles ils croient, sont des par­rè­siastes. Pour qu’il y ait par­rê­sia (…) il faut que le sujet, [en disant] cette véri­té qu’il marque comme étant son opi­nion, sa pen­sée, sa croyance, prenne un cer­tain risque, risque qui concerne la rela­tion même qu’il a avec celui auquel il s’adresse. Il faut pour qu’il y ait par­rê­sia que, en disant la véri­té, on ouvre, on ins­taure et on affronte le risque de bles­ser l’autre, de l’irriter, de le mettre en colère et de sus­ci­ter de sa part un cer­tain nombre de conduites qui peuvent aller jusqu’à la plus extrême vio­lence. C’est donc la véri­té, dans le risque de la vio­lence.
[…] La par­rê­sia risque donc non seule­ment la rela­tion éta­blie entre celui qui parle et celui à qui est adres­sée la véri­té, mais, à la limite, elle risque l’existence même de celui qui parle, si du moins son inter­lo­cu­teur a un pou­voir sur lui et s’il ne peut sup­por­ter la véri­té qu’on lui dit. Ce lien entre la par­rê­sia et le cou­rage est fort bien indi­qué par Aristote lorsque, dans l’Éthique à Nicomaque, il lie ce qu’il appelle la mega­lop­su­khia (la gran­deur d’âme) à la pra­tique de la par­rê­sia.

Le cou­rage de la véri­té
p. 12–13
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