25 08 25

Theweleit, La possibilité d’une vie non-fasciste

L’élan est venu, poli­ti­que­ment, en 1967, des langues du mar­xisme, de la langue de la psy­cha­na­lyse en train de se publi­ci­ser, des langues d’un inter­na­tio­na­lisme en voie de déve­lop­pe­ment qui se reliaient aux modes d’expression du ciné­ma et aux langues de la pop culture. Une nou­velle façon de par­ler d’une inso­lence sexua­li­sée dans son ensemble en sor­tit, qui répli­quait aux exi­gences de la « socié­té domi­nante », à chaque argu­ment ou non-argu­ment adverse, que la vie était ici et main­te­nant, que le savoir était ce qu’on avait soi-même, et qu’on se fichait du reste.
De nom­breuses autres langues se sont mélan­gées, de tous les coins et recoins ima­gi­nables, de 1967 à 1970 : avec des bouts scien­ti­fiques, action­nistes, per­for­més, spon­ta­néistes extraits de la langue du mou­ve­ment ouvrier, des langues et façons de par­ler péda­go­giques, pédantes, viru­lentes, didac­tiques, eupho­riques, cabo­tines, magouilleuses, impi­toya­ble­ment ouvertes, auto­pro­mo­tion­nelles, para­noïaques, nar­cis­siques, relax, confuses, tou­chantes, reven­di­ca­tives, ali­men­tées par des notes d’amour. On peut éti­rer la série, dans plein de direc­tions, et c’est jus­te­ment là que ça se passe : dans ce brou­ha­ha de tout ce qui avait, comme d’un coup d’un seul, réus­si à deve­nir public, il y avait pour la pre­mière fois (et tel qu’il appa­rais­sait, pas juste « pour moi ») quelque chose comme la pos­si­bi­li­té d’une connexion de son propre par­ler avec un espace public, avec un nou­veau type de réa­li­té s’imposant publi­que­ment, connexion aupa­ra­vant seule­ment pos­tu­lée, pres­sen­tie, vou­lue, labo­rieu­se­ment construite dans des dis­cus­sions de bars.