15 09 20

Tout en s’ap­puyant sur la dis­tinc­tion dyo­ni­sienne des trois voies – néga­tion, émi­nence, cau­sa­li­té –, Hugues [Ripelin de Strasbourg] pro­pose une théo­rie de la contem­pla­tion fon­dée sur une noé­tique d’ins­pi­ra­tion essen­tiel­le­ment augus­ti­nienne.
Le nom que porte l’âme ne lui est pas essen­tiel mais, si l’on peut dire, extrin­sèque. C’est la diver­si­té de ses fonc­tions ou opé­ra­tions qui fait qu’elle est appe­lée ici « âme », là « mens », là encore « rai­son », « esprit », « sens » ou « mémoire ».
Cette exté­rio­ri­té de la dési­gna­tion rap­pelle en un sens celle de Dieu lui-même, connu et nom­mé d’a­près ses effets. Hugues est ici très proche du motif avi­cen­no-alber­ti­nien, plus tard repris par Eckhart, selon lequel l’âme est elle-même « sans nom ». La poly­ny­mie de l’âme n’at­teint pas son essence, elle ne dit que ses fonc­tions : « On l’ap­pelle ‘âme’ quand elle anime et vivi­fie un corps. ‘Mens’ en tant qu’elle exa­mine (reco­lit). ‘Animus’ quand elle veut. ‘Raison’ quand elle juge droi­te­ment. ‘Esprit’ quand elle spire ou parce qu’elle est de nature spi­ri­tuelle. ‘Volonté’ quand elle décide. Tous ces noms ne reviennent pas à l’âme à cause d’une plu­ra­li­té dans son essence mais seule­ment à cause de la mul­ti­pli­ci­té de ses effets et à cause de son acti­vi­té même. »
[…] La pré­sence de l’âme au corps n’est donc pas d’ordre onto­lo­gique. Elle est d’ordre opé­ra­toire.

« Hugues Ripelin de Strasbourg »
La mys­tique rhé­nane
Seuil 1994
p. 84
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