Si nombreux que soient les mots prononcés à chaque instant dans une grande ville pour exprimer les vœux personnels de ses habitants, il en est un qui n’y paraît jamais, c’est le mot « rédimer ». On peut admettre que tous les autres, les mots les plus passionnés, l’expression des relations les plus compliquées et de celles même qui sont tenues pour d’incontestables exceptions, se trouvent criés ou murmurés au même moment à un grand nombre d’exemplaires, ainsi : « Vous êtes le plus grand escroc que j’aie jamais rencontré », ou « Il n’y a pas de femme dont la beauté soit aussi bouleversante que la vôtre » ; de sorte que ces événements extrêmement personnels pourraient être représentés, dans leur répartition sur la ville entière, par de belles courbes statistiques. Mais jamais un homme vivant n’ira dire à un autre : « Tu peux me rédimer ! » ou « Sois mon rédempteur ! » On peut l’attacher à un arbre et le laisser crever de faim ; on peut le déposer dans une île déserte en compagnie de la femme qu’il a vainement poursuivie pendant des mois ; on peut lui faire signer des chèques sans provision et trouver quelqu’un qui le tire d’affaire : tous les mots du monde viendront se bousculer dans sa bouche, mais il est certain qu’il ne dira jamais, tant qu’il sera vraiment ému, « rédimer », « rédempteur » ou « rédemption », bien qu’absolument rien ne s’y oppose du point de vue linguistique.
Et pourtant, les peuples réunis sous la couronne cacanienne se qualifiaient de « nations non rédimées » !
So viele Worte in einer großen Stadt in jedem Augenblick gesprochen werden, um die persönlichen Wünsche ihrer Bewohner auszudrücken, eines ist niemals darunter : das Wort »erlösen«. Man darf annehmen, daß alle anderen, die leidenschaftlichsten Worte und die Ausdrücke verwickeltster, ja sogar deutlich als Ausnahme gekennzeichneter Beziehungen, in vielen Duplikaten gleichzeitig geschrien und geflüstert werden, zum Beispiel »Sie sind der größte Gauner, der mir je untergekommen ist« oder »So ergreifend schön wie Sie ist keine zweite Frau«; so daß sich diese höchstpersönlichen Erlebnisse geradezu durch schöne statistische Kurven in ihrer Massenverteilung über die ganze Stadt darstellen ließen. Niemals aber sagt ein lebendiger Mensch zu einem anderen »Du kannst mich erlösen!« oder »Sei mein Erlöser!« Man kann ihn an einen Baum binden und hungern lassen ; man kann ihn nach monatelangem vergeblichem Werben zusammen mit seiner Geliebten auf einer unbewohnten Insel aussetzen ; man kann ihn Wechsel fälschen und einen Retter finden lassen : alle Worte der Welt werden sich in seinem Mund überstürzen, aber bestimmt wird er nicht, solange er wahrhaft bewegt ist, erlösen, Erlöser oder Erlösung sagen, obgleich sprachlich gar nichts dagegen einzuwenden wäre.
Trotzdem nannten sich die unter Kakaniens Krone vereinigten Völker unerlöste Nationen !