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Walser, L’Institut Benjamenta

J’adore empê­cher mon rire d’éclater. C’est un cha­touille­ment si mer­veilleux que de ne pas pou­voir lâcher ce qui aime­rait tel­le­ment jaillir. J’aime ce qui ne doit pas être, ce qui doit ren­trer en moi. La chose étouf­fée en devient plus pénible, mais aus­si plus pré­cieuse. Oui, oui, je l’avoue, j’aime bien être oppri­mé. Certes. Non, pas tou­jours certes. Que M. Certes dis­pa­raisse de ma vue. Voici ce que je vou­lais dire : être obli­gé de répri­mer quelque chose, cela signi­fie le faire dou­ble­ment autre part. Rien n’est plus fade qu’une per­mis­sion indif­fé­rente obte­nue rapi­de­ment et à bon compte. J’aime bien tout méri­ter, tout connaître par l’expérience, et un rire, par exemple, a besoin d’être expé­ri­men­té. Quand je crève inté­rieu­re­ment de rire, quand je ne sais plus où mettre toute cette poudre stri­dente, je sais alors ce que rire signi­fie, c’est alors que je ris en rieur consom­mé, c’est alors que j’ai une repré­sen­ta­tion par­faite de ce qui m’a secoué. Il suit de là qu’il me faut sup­po­ser, et me tenir fer­me­ment à cette convic­tion, que les règles rendent l’existence argen­tée, peut-être même dorée, en un mot pleine d’attraits.

Ich mag mich sehr, sehr gern am Herausschallen des Lachens verhin­dern las­sen. Das kit­zelt so wun­der­bar : es nicht los­las­sen zu dür­fen, was doch so gern heraus­schießen möchte. Was nicht sein darf, was in mich hinab muß, ist mir lieb. Es wird dadurch pein­li­cher, aber zugleich wert­vol­ler, dieses Unterdrückte. Ja ja, ich ges­tehe, ich bin gern unter­drückt. Zwar. Nein, nicht immer zwar. Herr Zwar soll mir abmar­schie­ren. Was ich sagen wollte : etwas nicht tun dür­fen, heißt, es irgend­wo anders dop­pelt tun. Nichts ist fader als eine gleichgül­tige, rasche, billige Erlaubnis. Ich ver­diene, erfahre gern alles, und z. B. ein Lachen bedarf auch der Durch-Erfahrung. Wenn ich inner­lich zers­pringe vor Lachen, wenn ich kaum noch weiß, wo ich all das zischende Pulver hin­tun soll, dann weiß ich, was Lachen ist, dann habe ich am läche­rig­sten gelacht, dann habe ich eine voll­kom­mene Vorstellung des­sen gehabt, was mich erschüt­terte. Ich muß dem­nach unbe­dingt anneh­men und es als feste Überzeugung auf­be­wah­ren, daß Vorschriften das Dasein ver­sil­bern, viel­leicht sogar ver­gol­den, mit einem Wort reiz­voll machen.

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trad.  Marthe Robert
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p. 151–152