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La parole magi­co-reli­gieuse n’est pas sou­mise à la tem­po­ra­li­té ». « À aucun moment, la parole du poète ne cherche l’accord des audi­teurs, l’assentiment du groupe social ; celle du roi de jus­tice pas davan­tage : elle se déploie avec la majes­té d’une parole ora­cu­laire ; elle ne vise pas à éta­blir dans le temps un de ces enchaî­ne­ments de mots qui tirent leur force de l’approbation ou de la contes­ta­tion des autres hommes. Dans la mesure où la parole magi­co-reli­gieuse trans­cende le temps des hommes, elle trans­cende aus­si les hommes : elle n’est pas la mani­fes­ta­tion d’une volon­té ou d’une pen­sée indi­vi­duelle, elle n’est pas l’expression d’un agent, d’un moi. La parole magi­co-reli­gieuse déborde l’homme de toutes parts : elle est l’attribut, le pri­vi­lège d’une fonc­tion sociale.

Les Maîtres de Vérité dans la Grèce archaïque [1967]
Le livre de poche 2006
p. 123