(…) le cher­cheur le plus loyal à l’é­gard de l’es­thé­tique sera de manière néga­tive celui qui se révolte contre le lan­gage et qui, au lieu de rabais­ser la parole au rang de simple para­phrase de ses chiffres, lui pré­fère le gra­phique, qui confesse sans réserve la réi­fi­ca­tion de la conscience et trouve ain­si pour l’ex­pri­mer quelque chose comme une forme, sans emprunts apo­lo­gé­tiques à l’art. (Adorno, L’essai comme forme)

Voici un dia­gramme du logi­ciel poé­tique post­ro­man­tique. Par jeu, il prend comme contrainte l’u­ti­li­sa­tion d’un max d’i­cônes d’iO7, c’est dire si c’est inutile pour pen­ser quoi que ce soit.

 

L’article défi­ni devant les 5 figures (le poète, le pri­mi­tif, le mys­tique, le fou, le enfant) désigne une idéa­li­sa­tion for­ce­née. La matrice cen­trale s’ap­pelle « expé­rience ».

J’ai eu besoin de ce dia­gramme, non pas tant pour car­to­gra­phier que pour obte­nir une vue d’en­semble sur cette repré­sen­ta­tion qui semble avoir été majo­ri­taire jusque dans les années 50 chez les théo­ri­ciens pas pure­ment lit­té­raires de la poé­sie (socio­logues, anthro­po­logues, phi­lo­sophes, eth­no­logues…), avant que le logi­ciel hei­deg­ge­rien ne prenne le relais. Je vois dans le recours de non-spé­cia­listes à ces figures l’in­dice de leur ancrage pro­fond dans la conscience euro­péenne.

Cette repré­sen­ta­tion « du poète » m’in­té­resse sur­tout en ce qu’elle mani­feste une idéa­li­sa­tion de l’ef­fa­ce­ment social (figures ascé­tiques, mar­gi­nales, imper­ver­ties…) et encou­rage des pos­tures qui, elles, sont extrê­me­ment per­for­mantes dans l’es­pace social : ain­si on aime l’en­fant, le pri­mi­tif, le fou ou le mys­tique quand il est pris en charge par une syn­thèse inof­fen­sive et vague­ment somp­tuaire ; on le cor­rige quand il exprime une sauvageté/sauvagerie anti­so­ciale.Continuer

Testa non per­ti­nente, lit­té­ra­le­ment « tête non per­ti­nente » (dans le sens de « non congruente »), est une indi­ca­tion muséo­gra­phique qu’on trouve sur cer­taines sta­tues en Italie. Elle signi­fie que, sur une sta­tue, la tête n’est pas d’o­ri­gine. La pra­tique qui consis­tait à per­mu­ter les têtes des sta­tues a eu cours de l’é­poque romaine impé­riale jus­qu’à la Renaissance dans la région. Pline L’Ancien atteste de sa contem­po­ra­néi­té dans son Histoire Naturelle.

Au début du livre XXXV sur la pein­ture, il donne à pen­ser la repro­duc­tion en des termes où seule est légi­time la res­sem­blance par géné­ra­tion ou par trans­mis­sion (le verbe tra­dere, qui donne tra­di­tion), garante de la péren­ni­té de l’ins­ti­tu­tion gen­ti­lice. Illégitime est pour lui la res­sem­blance par per­mu­ta­tion (du verbe per­mu­tare), qui fout le bor­del dans la loi natu­relle et met en dan­ger l’ins­ti­tu­tion juri­dique 1.

Parmi des récri­mi­na­tions à l’en­droit du contem­po­rain, on trouve men­tion de cette pra­tique à la fois bour­geoise et van­dale, qui brouille la cor­res­pon­dance têtes-toges garante des lignées :Continuer

  1. Je ne fais ici que résu­mer le déve­lop­pe­ment de Didi-Huberman dans Devant le temps (pp 69 & ssq).

« ET CETTE FORCE. LE VISAGE. LA BEAUTÉ DE LA FORCE DU VISAGE.
ET CETTE FFFFFFFOOOOORCE. »

Il y a dans un musée de Londres « la valeur d’un homme » : une longue boîte-cer­cueil, avec de nom­breux casiers, où sont de l’amidon – du phos­phore – de la farine – des bou­teilles d’eau, d’alcool – et de grands mor­ceaux de géla­tine fabri­quée. Je suis un homme sem­blable.1

En 1856, Dumont de Monteux décrit une afflic­tion men­tale dont il se croit atteint, dans son auto­pa­tho­gra­phie Testament médi­cal, phi­lo­so­phique et lit­té­raire, des­ti­né non seule­ment aux méde­cins et aux hommes de lettres, mais aus­si à toutes les per­sonnes éclai­rées qui souffrent d’une manière occulte, ce qui fait beau­coup de monde, sur­tout quand on pense aux per­sonnes éclai­rées qui souffrent d’une manière occulte – pro­po­si­tion qui condense joli­ment le para­doxe de l’illumination, et peut-être aus­si dou­lou­reu­se­ment le drame à l’œuvre dans ce qu’il reste de l’honnête homme au milieu du 19e siècle (la conscience mena­çante que se faire auteur de ses pen­sées, maître de sa rai­son, est une œuvre de refou­le­ment qui ne laisse intacts ni son sujet ni sa per­sonne).

Dumont de Monteux appelle « men­tisme » le mal dont il croit pâtir, et ne peut en décrire à pro­pre­ment par­ler ni les causes ni les condi­tions d’apparition ni les effets ni même à pro­pre­ment par­ler les symp­tômes, mais seule­ment les opé­ra­tions, pour ain­si dire, décrites en termes allé­go­riques :

  • une braise allu­mée qui tour­noie dans la tête,
  • un stra­bisme dans les hémi­sphères céré­braux,
  • le che­val de pen­sée deve­nu fré­né­tique,
  • les oiseaux de la volière men­tale, aux tra­jec­toires ordi­nai­re­ment si nettes, qui sou­dain s’effarouchent,
  • une crampe au mol­let mais dans le cer­veau,
  • des idées qui s’invitent, dis­cutent entre elles dans la tête, sans égards pour le « maître du logis ».

Soit une série d’opérations men­tiques (tour­noyer, biai­ser, squat­ter, déran­ger, impor­tu­ner, engour­dir, enfié­vrer) qu’on peut pro­ba­ble­ment réduire et sim­pli­fier à quelques traits :

  • empor­ter (che­val)
  • dis­per­ser (oiseaux)
  • occu­per (squat­teurs)
  • faus­ser (stra­bisme)
  • rete­nir-empê­cher (crampe).

Et c’est comme s’il y avait une fuite dans l’hon­nête homme, comme si l’au­teur de ses pen­sée, le maître de ses idées, per­dait de son carac­tère la fer­me­té, de ses incli­na­tions la régu­la­ri­té, de ses traits la déter­mi­na­tion. L’homme est là, hagard dans son salon comme dans le cou­loir d’un EHPAD, il balaye du regard et constate, une fois la pièce exa­mi­née des plinthes aux mou­lures, la dis­pa­ri­tion de son « gar­dien pri­vé, pré­fet per­son­nel, garde du corps fami­lier, cura­teur par­ti­cu­lier, garant intime, obser­va­teur infa­ti­gable, juge insé­pa­rable, témoin inévi­table », comme dit Apulée, à pro­pos du démon de Socrate.

Et alors que le démon socra­tique, pré­fi­gure de la « conscience » des modernes, était un régi­ment au garde-à-vous, loyal et réac­tif, la « tête », le « cer­veau », la « pen­sée », le « men­tal » tour­men­tés par le « men­tisme » sont le siège d’un tas d’opérations connais­sables seule­ment par leurs effets – un nom pour chaque opé­ra­tion : che­val quand emporte, crampe quand retient, etc. Or connaître les choses par leurs effets, pour la tête d’un homme du 19e siècle, c’est être sale­ment pris de vitesse. Voilà, l’hon­nête homme est pris de vitesse ou de biais ou d’as­saut par ce qui était son démon et devient ses démons, comme un shrap­nel qui dis­perse ses billes.

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Le men­tisme est intro­duit dans le cha­pitre 5. Dumont le décrit comme un mal roman­tique (« la mala­die de René »).

Le men­tisme est un cas de dis­cours scien­ti­fique hori­zon­tal sur la perte de contrôle, l’éparpillement, l’incapacité à se scé­na­ri­ser ; à ce titre, les images de Dumont brillent peut-être déjà d’un « éclat poé­tique » trop évident par rap­port aux symp­to­ma­to­lo­gies de Chaslin en 1912 et de Mounier en 1946, par exemple dévi­de­ment rapide et incon­trô­lable d’idées et de pen­sées sté­riles, proche de la rêve­rie diurne, per­çu comme anor­mal, par­fois pénible et angois­sant… ou tor­rent de rumi­na­tion men­tale, pauvres thèmes sans dyna­mique créa­trice, mais vifs et lan­ci­nants, qui s’imposent de manière qua­si auto­ma­tique, tour­billonnent, res­sassent, sur un fond d’inquiétude et de doute angois­sant : bar­rages,‭ ‬coq-à‑l’âne,‭ ‬réponses à côté,‭ ‬ellipses,‭ ‬jeux syl­la­biques,‭ ‬phé­no­mènes psit­ta­ciques,‭ ‬scies ver­bales,‭ ‬mots jacu­la­toires for­tuits,‭ ‬énon­cia­tion des gestes,‭ ‬énon­cia­tion des inten­tions et des com­men­taires sur les actes,‭ ‬éman­ci­pa­tion des abs­traits,‭ ‬ombres anti­ci­pées d’une pen­sée indis­cer­nable.

Sous sa forme dégé­né­rique, « un men­tisme » n’est plus ce mal fatra­sique, gra­nu­lat de thèmes abou­liques, scé­na­ris­ti­que­ment indi­gestes, mena­çant une sin­gu­la­ri­té comme une fan­tai­sie menace l’é­po­pée, mais une sorte de mème lan­ga­gier obsé­dant, un fétiche de langue qui des fois s’ef­fa­rouche, se crampe, s’exor­cise dans la répé­ti­tion. Ces fétiches sont par­fois agi­tés d’une pro­non­cia­tion par­ti­cu­lière, accom­pagnent par­fois un acte par­ti­cu­lier, s’in­vitent à la faveur d’é­tats par­ti­cu­liers. En ce sens, ils sont comme des pedo­bears bien cachés qui, une fois per­çus, iso­lés, objec­ti­vés, lèvent un ges­tus men­tal qui a la clar­té for­melle du symp­tôme (clar­té appe­lant atten­tion) et l’obs­cu­ri­té symp­to­male de ses rap­ports, titres, places, rôles, au sein de l’é­po­pée de la pen­sée conqué­rante (obs­cu­ri­té appe­lant élu­ci­da­tion).

« On dirait qu’il y a dans la tête une braise allu­mée qui tour­noie sans cesse et ne laisse point de repos. Dans la fièvre vous êtes en proie à une foule d’erreurs tou­chant les per­sonnes et les choses ; vous n’avez plus conscience du temps ; vous exa­gé­rez les dis­tances ; vous subis­sez, auto­ma­ti­que­ment, le spec­tacle d’une fan­tas­ma­go­rie interne qui, d’une manière vague, vous fatigue, vous obsède ou vous récrée ; en un mot c’est le délire. Dans le men­tisme, il n’y a pour le moi, ni aber­ra­tion, ni désordre ; seule­ment, nous voyons, avec un sen­ti­ment très net, des pen­sées qui nous sont étran­gères, que nous ne connais­sons pas comme nôtres, et qui, s’étant comme intro­duites du dehors, pul­lulent, se meuvent avec la plus grande rapi­di­té… Je hasar­de­rai cette figure en disant qu’elles sont une seconde vue en état de stra­bisme. »

« Lorsque ces pen­sées intruses sont en exal­ta­tion, c’est alors qu’on sent la braise allu­mée ; mais lorsqu’elles sont calmes, elles se réduisent dans leur mul­ti­pli­ci­té, de telle sorte qu’il n’en est plus que quelques-unes qui dis­cutent, pré­disent, pro­jettent sans tenir compte du maître du logis. Se remuent-elles ? alors elles tra­versent la tête en décri­vant des lignes bri­sées comme le font des oiseaux tran­quille­ment enfer­més dans une cage. Cette com­pa­rai­son don­née, j’ajoute : – Effarouchez les oiseaux et vous aurez l’approximation du men­tisme éle­vé à sa plus haute por­tée. »

« Encore une fois, ces étran­ge­tés vous arrivent, et vous les subis­sez en sachant bien que vous n’avez pas la fièvre, que vous n’avez pris aucune liqueur capable de les engen­drer ; ce qui fait qu’elles ont un carac­tère tout par­ti­cu­lier pour le consen­sus ; et au lieu de pou­voir jamais vous char­mer, elles ne cessent de vous impor­tu­ner d’une dou­leur pro­fonde. »

« Dans la condi­tion que je décris l’âme, est engois­sée pro­por­tion­nel­le­ment au degré de pas­si­vi­té qu’elle endure, parce que les phé­no­mènes qui se pro­duisent dans son habi­tacle y sont engen­drés sans sa coopé­ra­tion, au mépris de sa volon­té, de sa puis­sance, et qu’elle les consi­dère comme une inva­sion de la folie… Ce n’est pas cela, cepen­dant, car elle n’est point l’agent scé­nique, elle n’en est que la spec­ta­trice for­cée. »

« J’insiste sur la dis­tinc­tion qu’il convient de faire entre l’inté­gri­té d’une part et l’aber­ra­tion de l’autre. Celle-ci existe dans le cer­veau, sans contre­dit, mais ne doit-on pas la consi­dé­rer comme un simple pro­duit de sur­ex­ci­ta­tion de la pulpe cor­ti­cale ? sur­ex­ci­ta­tion qui, dans le tra­jet des pro­lon­ge­ments de cette sub­stance, sur un point éloi­gné du foyer spi­ri­tuel, pro­dui­rait un four­mille­ment dans la jambe comme elle pro­duit l’anxiété pré­cor­diale, ou tout autre malaise pure­ment orga­nique. Dans ces exemples, on me l’accordera d’emblée, le symp­tôme n’a aucune prise sur le sen­ti­ment intime de notre rai­son ; car, dépla­cez l’irritation qui engendre le men­tisme, et vous aurez une crampe dans le mol­let… votre moi intel­lec­tuel n’en sera ni plus ni moins bien assis. »

« Il faut avoir subi la confla­gra­tion dont je parle pour être péné­tré de l’insuffisance de la réac­tion. J’affirme que, quelque effort que je fisse, ma volon­té ne pou­vait maî­tri­ser mes pen­sées, car celles-ci rico­chant de sujets en sujets, il m’était impos­sible de les tenir en bride. Donc, il y a entre nos facul­tés et nous-même toute la dif­fé­rence qu’il y a entre un cava­lier et son che­val deve­nu fré­né­tique. »

« On ne peut réflé­chir ou il y est for­cé, for­cé de réflé­chir à ce qui se passe dans sa tête, sous une forme ana­logue à la folie de doute. Parfois, quelques-unes s’arrêtent et forment une ébauche d’obsession (voyez plus loin), ou le cou­rant tend à for­mer une sorte de tour­billon (voyez plus loin), c’est dire que ces états se rap­prochent insen­si­ble­ment de l’obsession et du doute, dont ils seraient des variantes, éten­dues pour ain­si dire à un grand nombre d’idées suc­ces­sives défi­lant sans arrêt. »

« C’est comme un dimi­nu­tif de l’excitation maniaque, mais recon­nu patho­lo­gique par le malade lui-même et sous­trait à l’influence dévia­trice de l’attention externe. Cela ne se ren­contre que dans la neu­ras­thé­nie psy­chique. Dans quelques cas rares il y a exci­ta­tion psy­cho­mo­trice, comme dans la manie, mais recon­nue aus­si par le malade lui-même. Parfois, tout se borne à ce bavar­dage men­tal, semé de temps en temps de mots chu­cho­tés ou encore pro­non­cés à mi-voix. »

  1. Stéphane Mallarmé, lettre à Eugène Lefébure, lun­di 27 mai 1867

« Das ewige Zögern in Gottes Kopf kurz vor der Weltschöpfung. »

Le shoe­bill, ce dieu son­gif, sa longue hési­ta­tion mais avant quoi, sa cause demeure impé­né­trable, ou peut-être a‑t-il for­got­ten to name his cause enough et depuis c’est la merde, il cherche en vain sa cause, il ne cherche pas vrai­ment ce qu’il vou­lait faire, ce qu’il était gerade dabei zu machen, plu­tôt pour­quoi il allait le faire. Il fau­drait pro­po­ser à cha­cun de four­nir une inter­pré­ta­tion de la pla­ci­di­té shoe­bille ; on ne fait pas les son­dages sur les bonnes choses.

Memo :
die schoe­billige Sanftheit
name your cause
gerade pas dieu
eugène dabei
pen­sif, son­geur, son­gif
liste des ani­maux pla­cides
liste des ani­maux cir­cons­pects

 

shoebill-duck2

original

Texte

Les rimes chi­ra­quiennes est un recueil de rimes, un chien sub­jec­tif aujourd’­hui.

AVANT PROPOS

Les rimes chi­ra­quiennes sont pro­met­teuses, sont fan­tai­sistes, sont canines et sont ordu­rières, sou­vent déçoivent les chi­ra­quiennes, ce sont des ramas clin­quants de brics mathé­tiques et tru­qués1 pris au cours sur la pré­pa­ra­tion du roman de Roland Barthes et de brocs pillés à la Vita Nuova de Dante lue en VOSTFR.

Les rimes chi­ra­quiennes s’in­té­ressent au patri­moine divers de chuin­tantes, sif­flantes, vélaires, pépiantes, piau­lantes qui font le bon­heur com­mun du poète et des deux chan­son­niers cités.

Chaques rimes sont accom­pa­gnées d’une prose (essence de prose) et d’un com­men­taire en prose (étoffe de vers), qui, comme dans Dante, forment un étau autour des vers tor­chiés.

La prose ouvrante (essence) n’ex­plique pas, elle contex­tua­lise, donne des indi­ca­tions scé­na­ris­tiques, tan­gente la nar­ra­tive. C’est la cause ration­nelle (ragio­na­ta cagione) des vers qui minaudent à sa suite.

Le com­men­taire fer­mant (étoffe) n’ex­plique pas non plus, il découpe pour élu­ci­der la fas­ci­na­tion qui condui­sit aux vers (dichia­rare cotale dubi­ta­zione), donne des indi­ca­tions sco­las­tiques et pro­so­diques béton.

Attenzione. Attenzione. Attentivi ensem­bi­li. Les rimes chi­ra­quiennes sont contin­gem­ment ita­lia­ni­santes ; l’i­ta­lien n’est pas ita­lien connu, ce n’est qu’un ita­lien per­çu, et plu­tôt per­çu comme une langue dans laquelle on ne se refuse rien.

Ne rien se refu­ser est pris comme comble de l’ho­mo­lo­gie per­çue entre Roland Barthes et Jacques Chirac, deux beaux par­leurs du 20e siècle aux­quels on a tis­sé des bou­bous et deman­dé fina­le­ment peu de comptes.

Le mot bou­bou fait rire, comme une fois le bruit et l’o­deur firent pouf­fer une foule de pantres punais ; le poème conti­nue dans cette odeur de merde. Le poème porte ses puns empois­sants au lec­teur ; les puns du poème se disent dans des mots qui sont des éclats, des épi­pha­nies de fait-rire que j’ap­pel­le­rai par com­mo­di­té d’un nom latin : les risi­bi­lia. Le poème pré­sente ses risi­bi­lia, et si éven­tuel­le­ment un risi­bile échoue à faire rire, le poème s’ar­rê­te­ra. C’est la règle que je me fixe, c’est l’en­ga­ge­ment que je prends devant vous.Continuer

  1. « Mathésis tru­quée » est une expres­sion que Barthes invente, dans son inter­ven­tion au col­loque Bataille (1972), pour dési­gner un détour­ne­ment sub­jec­tif du savoir au ser­vice d’une « fic­tion inter­pré­ta­tive ».

Bonjour à tous les pro­blèmes actuels. Rien n’est nor­mal. Les par­ti­ci­pants se lassent. La per­sonne perd en géné­ral. Cordialement caprine, la per­sonne perd en géné­ral. Je veux qu’on puisse savoir le pour­quoi réel (le sum­mum), et pour par qui nous buse, ma chère amie, je te crois toi et pas yahoo ; tes pro­blèmes sont les miens : des cen­taines de réserves tech­niques. Mais ils t’ont envoû­tée, du jour au len­de­main, leurs robots à la noix. Maintenant, tu as le moral des tur­bos sym­pa­thiques. Autrefois la ques­tion était écrite. La rubrique Algérie répon­dait très bien. C’était un énorme chan­ge­ment. Du jour au len­de­main, pas besoin d’ouvrir les ques­tions : une simple lec­ture nous savions si le sujet inté­res­sait. Désormais, ce que j’ignore est entrain de : PÉRIR À PETIT FEU. Je pense à Nikolai ; je pense à l’homme de Sparte.

* source

* poé­sie ser­vice action (cut-ups uni­sour­cés, lus à la manière d’un célé­brant – aujourd’­hui : à la manière de Michel Deguy) :

goutte à goutte où va-t-il ?
dans une veine du pied de la salade
avec les drogues qui contri­buent
à contri­buer à ces réac­tions de défense
sans qu’elles fris­sonnent notam­ment
un modèle récent de ?-rateur
le com­pres­seur s’ap­pelle mas­tère
ou tubu­lure : c’est un cock­tail
sous une tente qui couvre le corps
nue, la salade est pour ain­si dire bom­bar­dée
par de l’air mar­qué
« sté­ri­li­sa­tion qu’est-ce que c’est ? »
un air que l’on
souffle sur la salade
qui n’a pas tou­jours dis­po­sé d’aus­si si zap­pa­reils.

Il s’a­git d’une salade déjà épui­sée
dans son entier
la ten­sion s’a­baisse
chez l’hi­ber­née nous la notons sur une feuille
spé­ciale
en comp­tant le pouls bana­le­ment
pouls qui nous donne : un élec­tro­ni­cien
plan­té dans la tête avec des aiguilles avec notre hiber­née.

À « c’est quoi ça ? » : « c’est un tra­cé
d’un cer­veau
qui souffre »
la salade on pour­rait lui plan­ter
des aiguilles dans le corps
elle est com­plè­te­ment indif­fé­rente au monde
c’est exté­rieur et c’est heu­reux
parce que les neu­ro­toxi­coses du nour­ris­son
les téta­nos
des sujets par­ti­cu­liè­re­ment épui­sés
déchoquent les grands bles­sés

Texte

HTML : Le che­vau­chant cra­va­chant le galo­pant

Un texte sur Marcel Jousse, son anthro­po­lo­gie de la connais­sance par le geste. Pour Jousse (le prêtre anthro­po­logue artilleur mys­tique sar­thois au voca­bu­laire bour­geon­neux), l’an­thro­pos fait des drames pour soi-même – est mimo­dra­ma­tiste. Ses drames consistent en des jeux erra­tiques. L’anthropos jouit de l’indétermination de ces jeux et de la pos­si­bi­li­té pré­ser­vée d’une reprise, d’un recom­men­ce­ment. Mais la ten­ta­tion du par­tage des règles est forte, et les jeux erra­tiques se cris­tal­lisent en jeux ordon­nés. Le ruis­sel­le­ment et le scé­na­rio sont deux aspects anta­go­nistes de ces jeux ; cha­cun exerce une pres­sion et une séduc­tion avec les­quelles notre mimo doit com­po­ser, notam­ment dans ses rap­ports à l’image et à la légende.