L’originalité coquet­te­ment, savam­ment vou­lue, tra­vaillée, self­same.

« Fragment sur Baudelaire »
baudelaire coquetterie dandysme identité originalité self singularité

Le pre­mier qui ne soit pas triom­phant mais s’ac­cuse, montre ses plaies, sa paresse, son inuti­li­té au milieu de ce siècle tra­vailleur et dévoué.

« Fragment sur Baudelaire »
baudelaire dévotion dignité stigmate travail triomphe utilité/inutilité

Le soleil entrait de toutes parts dans la chambre, car il n’était que trois heures de l’après-midi, et ses larges rayons étaient bleus, parce qu’ils tra­ver­saient de grands rideaux de soie de cette cou­leur. Il y avait quatre fenêtres très hautes et quatre rayons très longs ; cha­cun de ces rayons for­mait comme une échelle de Jacob dans laquelle tour­billon­naient des grains de pous­sière dorée, qui res­sem­blaient à des myriades d’esprits célestes mon­tant et des­cen­dant avec une rapi­di­té incal­cu­lable, sans que le moindre cou­rant d’air se fît sen­tir dans l’appartement le mieux tapis­sé et le mieux rem­bour­ré qui fût jamais. La plus haute pointe de l’échelle de chaque rayon bleu était appuyée sur les franges du rideau, et la large base tom­bait sur la che­mi­née. La che­mi­née était rem­plie d’un grand feu, ce grand feu était appuyé sur de gros che­nets de cuivre doré, repré­sen­tant Pygmalion et Ganimède ; et Ganimède, Pygmalion, les gros che­nets et le grand feu brillaient et étin­ce­laient de flammes toutes rouges dans l’atmosphère céleste des beaux rayons bleus.

Stello ou Les diables bleus [1832]
concaténation

Le ton de voix de Heidegger est pro­phé­ti­sé dans la dis­cus­sion schil­le­rienne sur la digni­té comme fer­me­ture sur soi ou comme fixa­tion du soi : « Si on a l’oc­ca­sion d’ob­ser­ver la grâce affec­tée, dans les théâtre de salle de bal, on peut aus­si très sou­vent étu­dier la fausse digni­té dans les cabi­nets des ministres et dans les salles d’é­tudes des hommes de sciences (par­ti­cu­liè­re­ment dans les uni­ver­si­tés). Si la vraie digni­té se satis­fait d’empêcher la domi­na­tion des affects et si elle pose des limites à la pul­sion natu­relle sim­ple­ment là où celle-ci veut jouer le maître, c’est-à-dire, dans les mou­ve­ments invo­lon­taires ; au contraire, la fausse digni­té régit aus­si les mou­ve­ments volon­taires avec un sceptre de fer, elle réprime les mou­ve­ments moraux, les­quels sont sacrés pour la vraie digni­té, aus­si bien que les mou­ve­ments de la sen­si­bi­li­té et elle détruit tout le jeu mimique de l’âme qui s’ex­pose dans les traits du visage. Elle n’est pas seule­ment sévère à l’é­gard de la nature rebelle, mais dure à l’é­gard de la nature sou­mise, et elle cherche sa ridi­cule gran­deur dans l’as­ser­vis­se­ment de celle-ci et, là où cela ne réus­sit pas dans sa dis­si­mu­la­tion. Comme si elle avait voué une haine irré­con­ci­liable à tout ce qui s’ap­pelle nature, elle enve­loppe le corps dans de longs vête­ments à plu qui en cachent tous les membres, elle réduit l’i­mage des membre par un lourd appa­reil d’i­nu­tiles orne­ments et se coupe même les che­veux pour rem­pla­cer le cadeau de la nature par le pro­duit de l’art. Si la vraie digni­té, qui n’a jamais honte de la nature, mais seule­ment de la nature brute, reste tou­jours libre et ouverte, même là où elle se tient en soi, si on voit une sen­sa­tion rayon­ner dans ses yeux et l’es­prit calme et serein se repo­ser sur son front élo­quent ; au contraire, la fausse digni­té ins­crit la gra­vi­té dans les plis du visage, elle est fer­mée et mys­té­rieuse et sur­veille sou­cieu­se­ment ses traits comme un comé­dien. Tous les muscles du visage son ten­dus, toute expres­sion natu­relle et vraie dis­pa­raît et l’homme tout entier est comme une lettre scel­lée. Mais la fausse digni­té n’a pas tou­jours tort de tenir le jeu mimique de ses traits sous une sévère dis­ci­pline ; parce qu’il pour­rait peut-être en dire plus qu’on ne le vou­drait – pré­cau­tion qui n’est certes pas néces­saire pour la vraie digni­té. Celle-ci ne fera que maî­tri­ser la nature et non la cacher ; dans la fausse digni­té au contraire, la nature domine avec d’au­tant plus de vio­lence à l’in­té­rieur qu’elle est d’au­tant plus contrainte à l’ex­té­rieur. » Pour le kan­tien qui croyait à la dis­jonc­tion du prix et de la digni­té, que son maître avait effec­tuée, la digni­té était encore quelque chose de dési­rable. Cela a pri­vé ce grand écri­vain de la pleine intui­tion de ce dont il s’est pour­tant appro­ché de si près : qu’à la digni­té est imma­nente la forme de sa déca­dence – ce qu’on peut obser­ver dès que les intel­lec­tuels deviennent com­plices du pou­voir qu’ils sont pas et auquel ils devraient s’op­po­ser. Dans le jar­gon de l’au­then­ti­ci­té s’ef­fondre, en fin de compte, avec la digni­té kan­tienne, cette huma­ni­té qui a son concept non pas dans la réflexion sur soi, mais dans la dif­fé­rence avec l’a­ni­ma­li­té répri­mée.

Prophezeit wird der Heideggersche Tonfall in der Schillerschen Diskussion von Würde als einem sich in sich selbst Verschließen oder Festmachen. „Wenn man auf Theatern oder Ballsälen Gelegenheit hat, die affek­tirte Anmuth zu beo­bach­ten, so kann man oft in den Kabinetten der Minister, und in den Studierzimmern der Gelehrten (auf hohen Schulen beson­ders) die falsche Würde stu­di­ren. Wenn die wahre Würde zufrie­den ist, den Affekt an sei­ner Herrschaft zu hin­dern, und dem Naturtriebe blos da, wo er den Meister spie­len will, in den unwillkür­li­chen Bewegungen Schranken setzt, so regiert die falsche Würde auch die willkür­li­chen mit einem eiser­nen Zepter, unter­drückt die mora­li­schen Bewegungen, die der wah­ren Würde hei­lig sind, so gut als die sinn­li­chen, und löscht das ganze mimische Spiel der Seele in den Gesichtszügen aus. Sie ist nicht blos streng gegen die widers­tre­bende, son­dern hart gegen die unterwür­fige Natur, und sucht ihre lächer­liche Größe in Unterjochung, und wo dies nicht ange­hen will, in Verbergung der­sel­ben. Nicht anders, als wenn sie Allem, was Natur heißt, einen unversöhn­li­chen Haß gelobt hätte, steckt sie den Leib in lange fal­tige Gewänder, die den gan­zen Gliederbau des Menschen ver­ber­gen, bes­chränkt den Gebrauch der Glieder durch einen läs­ti­gen Apparat unnüt­zer Zierrath und schnei­det sogar die Haare ab, um das Geschenk der Natur durch ein Machwerk der Kunst zu erset­zen. Wenn die wahre Würde, die sich nie der Natur, nur der rohen Natur schämt, auch da, wo sie an sich hält, noch stets frey und offen bleibt ; wenn in den Augen Empfindung strahlt, und der heitre stille Geist auf der bered­ten Stirn ruht, so legt die Gravität die ihrige in Falten, wird ver­schlos­sen und mys­te­riös, und bewacht sorgfäl­tig wie ein Komödiant ihre Züge. Alle ihre Gesichtsmuskeln sind anges­pannt, aller wahre natür­liche Ausdruck ver­sch­win­det, und der ganze Mensch ist wie ein ver­sie­gel­ter Brief. Aber die falsche Würde hat nicht immer Unrecht, das mimische Spiel ihrer Züge in schar­fer Zucht zu hal­ten, weil es viel­leicht mehr aus­sa­gen könnte, als man laut machen will, eine Vorsicht, welche die wahre Würde frey­lich nicht nöthig hat. Diese wird die Natur nur beherr­schen, nie ver­ber­gen ; bey der fal­schen hin­ge­gen herr­scht die Natur nur des­to gewalt­thä­ti­ger innen, indem sie außen bez­wun­gen ist.“ Dem Kantianer, der die Disjunktion von Preis und Würde sei­nem Meister glaubte, war diese noch ein Wünschbares. Das brachte ihn um die volle Einsicht, wel­cher der große Schriftsteller so nahe rückte : daß der Würde ihre Verfallsform imma­nent ist : durch­schau­bar, sobald Intellektuelle der Macht sich anbie­dern, die sie nicht haben und der sie zu widers­te­hen hät­ten. Im Jargon der Eigentlichkeit stürzt am Ende die Kantische Würde zusam­men, jene Menschheit, die ihren Begriff nicht an der Selbstbesinnung hat son­dern an der Differenz von der unter­drück­ten Tierheit.
Jargon de l’au­then­ti­ci­té [Jargon der Eigentlichkeit, 1964]
trad. Éliane Escoubas
Payot 2009
p. 195–197
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Pour Heidegger, se confondent en se brouillant dans le « on » ce qui est un simple déri­vé idéo­lo­gique du rap­port d’é­change, d’une part : les ido­la fori des dis­cours de condo­léances et des avis de décès et, d’autre part, l’hu­ma­ni­té qui n’i­den­ti­fie pas les autres, mais qui s’i­den­ti­fie à l’autre, qui dépasse la fas­ci­na­tion de l’ip­séi­té abs­traite et pénètre celle-ci dans sa média­tion.

Für Heidegger fließt im Man trüb zusam­men, was bloßes ideo­lo­gisches Derivat des Tauschverhältnisses ist, die ido­la fori von Trauerreden und Todesanzeigen, und die Humanität, die nicht die Anderen, son­dern sich mit dem Anderen iden­ti­fi­ziert, über den Bann der abs­trak­ten Selbstheit hinaus­dringt und diese in ihrer Vermittlung durch­schaut.

Jargon de l’au­then­ti­ci­té [Jargon der Eigentlichkeit, 1964]
trad. Éliane Escoubas
Payot 2009
p. 183
formule heidegger identification ipséité man médiation on salutation