(…) le chercheur le plus loyal à l’égard de l’esthétique sera de manière négative celui qui se révolte contre le langage et qui, au lieu de rabaisser la parole au rang de simple paraphrase de ses chiffres, lui préfère le graphique, qui confesse sans réserve la réification de la conscience et trouve ainsi pour l’exprimer quelque chose comme une forme, sans emprunts apologétiques à l’art.
Auteur : Lecteur
Chaque fois que la philosophie croit pouvoir abolir, par des emprunts à la poésie, la pensée objectivante et son histoire, ce que la terminologie habituelle nomme l’antithèse du sujet et de l’objet, espérant même que l’être lui-même pourrait parler dans une poésie préfabriquée à partir de Parménide et de Jungnickel, elle se rapproche de ce bavardage culturel éculé. Avec une malice paysanne déguisée en langage de l’origine, elle se refuse à respecter les exigences de la pensée conceptuelle auxquelles elle a pourtant souscrit, dès lors qu’elle utilisait des concepts dans l’affirmation et le justement ; en même temps, son élément esthétique reste de seconde main, c sont de pâles réminiscences culturelles de Hölderlin… […] La violence que l’image et le concept se font subir réciproquement donne naissance à ce jargon de l’authenticité, où les mots frémissent d’émotion, sans pour autant dire ce qui les émeut.
L’interprétation ne peut pas faire ressortir ce qu’elle n’aurait pas en même temps introduit. Ses critères, c’est la compatibilité de l’interprétation avec le texte et avec elle-même, et sa capacité de faire parler tous ensemble les éléments de l’objet.
On ne peut assigner un domaine particulier à l’essai. Au lieu de produire des résultats scientifiques ou de créer de l’art, ses efforts mêmes reflètent le loisir propre de l’enfance, qui n’a aucun scrupule à s’enflammer pour ce que les autres ont fait avant elle. Il réfléchit sur ce qu’il aime et ce qu’il hait, au lieu de présenter l’esprit comme une création ex nihilo, sur le modèle de la morale du travail illimitée. Le bonheur et le jeu lui sont essentiels.
Où il y a intensité, il y a labyrinthe, et déterminer les sens du parcours, souffrance ou allégresse, est l’affaire des consciences et de leurs directeurs. Il nous suffit que la barre tourne pour que fusent les spirales imprévisibles, il nous suffit qu’elle ralentisse et s’arrête pour que s’engendrent la représentation et la pensée claire. Donc pas de bonnes et de mauvaises intensités, mais l’intensité ou sa décompression. Et comme on l’a dit et on le redira, l’une et l’autre dissimulées ensemble, le sens caché dans l’émotion, le vertige dans la raison. Ainsi point de morale, plutôt une théâtrique ; point de politique, plutôt un complot.