Le 30 avril dernier, pour Artichoke, une reading series perlinoise, Nathalie Quintane a lu un texte intitulé On va faire quelque chose qui ne se verra pas dans un endroit où il n’y a personne. Traduit en ENG et DE et couché sur PDF, format de propriétaire, le texte est augmenté d’une introduction (reproduite ci-dessous) et d’un appareil de notes qui ne manquent pas de produire leur petit effet French Civ 101. Claquer l’img pour accéd àl” pdf.
La France, autrefois, c’était un nom de pays ; prenons garde que ce ne soit, en 1961, le nom d’une névrose.
Sartre, préface aux Damnés de la Terre de Fanon
Le 8 mai 1945, la France célèbre la fin de la Guerre. À Sétif (Algérie), les célébrations prennent la forme d’émeutes indépendantistes dont la répression fait pour cette seule journée plusieurs milliers de morts. Le jour-même où la France éternelle célèbre une nouvelle victoire des Lumières sur la barbarie, elle poursuit l’air de rien une mission civilisatrice dont la législation et les méthodes ont inspiré tous les fascismes (ainsi du code de l’indigénat de 1881, premier « état d’exception » décrété par la République, qui instaure une citoyenneté de second rang et autorise les sanctions collectives et les déportations à l’écart du droit métropolitain). En Algérie comme en métropole, les méthodes contre-insurrectionnelles reprendront les méthodes protogénocidaires : liquidations, tortures, corps jetés dans la Seine ou entassés au stade.
C’est cette perméabilité historique et la porosité des mémoires en charge de cette histoire que le texte de Nathalie Quintane ici publié explore, s’appuyant sur un corpus de paroles dont l’origine parfois obscure ne fait que souligner qu’elles appartiennent à l’air du temps, un air de rien, une petite musique suggestive qui entretient des rapport étroits avec le style français, celui qui jouit, au boudoir comme au comptoir, de n’être jamais univoque. Celui qui, parlant à “tous”, s’adresse à certains.Continuer