La vraie vie est d’avoir une voi­ture amie vivre est vivre avec une voi­ture amie il est vrai que la vraie vie est d’avoir avec soi une voi­ture une voi­ture amie que c’est vivre en vie avec une voi­ture amie de vivre avec avec une voi­ture à soi avec une voi­ture amie avec une vraie voi­ture à soi voi­là la vraie vie est d’avoir une voi­ture avec soi une belle voi­ture une voi­ture qui soit une amie la vraie vie est d’avoir une amie une voi­ture d’avoir comme amie une voi­ture amie de vivre avec d’aller avec une belle voi­ture amie une vraie voi­ture voi­là la vraie vie est de vivre avec avec une vraie voi­ture à soi la vraie est vie est là avec cette belle voi­ture qui est une amie voi­là la vie vivre avec une voi­ture amie qui est belle qui est là qui est à soi voi­là la belle voi­ture qui est une amie avec laquelle vivre toute la vraie vie vivre une voi­ture vivre une voi­ture à soi vivre avec une belle amie vivre une vraie vie une vraie vie qui est une vraie voi­ture avec à soi une vraie vie de voi­ture amie à soi avec une vraie belle voi­ture qui va par­tout.

nous for­mons le monde
nous for­mons un monde magique
nous nous goû­tons
nous fai­sons de la magie
nous sommes en conver­sa­tion avec le démon
le fait d’être avec le démon
nous savons
nous avons le ce que nous avons pour avoir conscience
assez de cœur
nous avons assez de cœur
nous avons pour avoir conscience assez de cœur pour savoir
le démon pour être en train de conver­ser avec le assez de
cœur de le démon
nous avons faim
nous avons la ten­ta­tion de faire l’amour
nous sommes heu­reux
nous sommes heu­reux de faire l’amour
nous avons autant de cœur
nous avons tout autant de cœur
nous avons tout ce que le ce cœur nous avons fait un monde avec un démon
nous ava­lons
nous rava­lons
nous avons autant le cœur de le savoir
nous avons une vie
nous avons autant la vie
nous avons autant de vie
nous avons un v vivant dans vou­lu dans vivant dans vie
le démon vient dans le, dans le cœur assez grand
et assez vivant pour qui le savent
nous avons le cœur assez grand pour le savoir
nous avons le tout ce que nous avons pour avoir conscience
nous avons conscience nous avons faim
nous goû­tons
nous avons su valoir nous avons vou­lu savoir
nous avons su avant de com­men­cer
nous avons un grand cœur qui va vou­loir qui veut
tou­jours s’étaler dans la posi­tion d’en venir à revou­loir savoir
tou­jours dans la posi­tion d’être conscient le vou­loir savoir
le démon goûte le cœur
nous avons for­mé le monde avec un démon
le démon goûte le cœur et le cœur demande au démon
le cœur et le démon sont de la même sorte
le cœur et le démon ils font de la magie
nous avons for­mé un monde magique
d’où le fait que nous sommes dans un monde magique
la vie n’est pas à un autre endroit que la vie au cœur
où nous avons assez à boire
d’où le fait que nous sommes dans un monde magique
parce qu’il vogue
parce qu’il n’a pas de volon­té
ni d’avant ni d’avalanche
parce qu’il est avant tout inven­té
et ivre
et avant tout il est inven­té il est inver­sé et il est ivre
sou­le­vons
sou­le­vons-le
nous avons assez de cœur pour sou­le­ver avec le cœur
et le démon et la conver­sa­tion avec le démon et le monde magique
car nous avons for­mé le monde
et le monde est magique
nous pro­dui­sons
nous nous pro­dui­sons
nous pro­cé­dons à notre des­truc­tion
com­ment nous nous pro­cé­dons ?
nous nous pro­dui­sons
nous pro­cé­dons à notre des­truc­tion
où nous nous détrui­sons se pro­duit
la des­truc­tion mas­sive se pro­duit
avec quoi nous ense­ve­lis­sons-nous ?
nous nous ense­ve­lis­sons dans la des­truc­tion
com­ment elle se pro­duit ?
nous nous pro­dui­sons
nous nous sommes faits de la des­truc­tion par ense­ve­lis­sons-nous
où nous nous sommes mis à nous ense­ve­lir
exac­te­ment où nous nous sommes mis à nous ense­ve­lir
nous n’y cou­pons pas
nous avons autant le cœur de le savoir et assez de cœur
pour en avoir conscience
nous qui nous for­mons la des­truc­tion
nous nous met­tons dedans
ce qui nous pro­cède
nous nous met­tons à pro­cé­der
à nous pro­cé­der à la des­truc­tion
nous nous pro­dui­sons et nous for­mons le monde
le monde est magique
et dans quatre mois c’est l’été
mars avril mai juin
un deux trois quatre
quatre mois à tenir avant que ça soit l’été
quatre mois c’est pas long
ça passe assez vite
en atten­dant quatre mois ça passe assez vite et on est
d’un coup
dans l’été chaud
en pleine cha­leur
en plein mois de juin
quand il fait très chaud en plein milieu de la jour­née
dans quatre mois et on est dedans

,
« Le monde magique » L’enregistré [1998]
, , ,
p. 297–303

Précisément, les pos­si­bi­li­tés du lan­gage s’arrêtent aux limites du monde, et inver­se­ment ; l’appréhension du monde comme tota­li­té limi­tée coïn­cide pure­ment et sim­ple­ment avec la recon­nais­sance des limites du lan­gage : elle consiste à se rendre compte à « sen­tir » que, d’une cer­taine manière, le der­nier mot n’est pas dit par ce que le lan­gage per­met de dire, bien que l’on ne puisse rien dire de plus que ce que le lan­gage per­met de dire. Toute limite expri­mable est néces­sai­re­ment une limite fac­tuelle, c’est-à-dire intra­mon­daine (…) Les limites du monde ne sont donc pas les limites d’une tota­li­té consi­dé­rée en exten­sion, ce sont les limites de la fac­tua­li­té ; et ce qui est à l’extérieur de ces limites est, comme l’indiquent clai­re­ment cer­taines remarques des Carnets, le « sens » ou la « valeur ».

Et aus­si­tôt le pro­blème se pose : si l’é­non­cé est bien l’u­ni­té élé­men­taire du dis­cours, en quoi consiste-t-il ? Quels sont ses traits dis­tinc­tifs ? Quelles limites doit-on lui recon­naître ? Cette uni­té est-elle ou non iden­tique à celle que les logi­ciens ont dési­gnée par le terme de pro­po­si­tion, à celle que les gram­mai­riens carac­té­risent comme phrase, ou à celle encore que les « ana­lystes » essaient de repé­rer sous le titre de speech act ? Quelle place occupe-t-elle par­mi toutes ces uni­tés que l’in­ves­ti­ga­tion du lan­gage a déjà mises au jour, mais dont la théo­rie est bien sou­vent loin d’être ache­vée tant les pro­blèmes qu’elles posent sont dif­fi­ciles, tant il est mal­ai­sé dans beau­coup de cas de les déli­mi­ter d’une façon rigou­reuse ?

Derrière le sys­tème ache­vé, ce que découvre l’a­na­lyse des for­ma­tions, ce n’est pas, bouillon­nante, la vie elle-même, la vie non encore cap­tu­rée ; c’est une épais­seur immense de sys­té­ma­ti­ci­tés, un ensemble ser­ré de rela­tions mul­tiples. Et de plus, ces rela­tions ont beau n’être pas la trame même du texte, elles ne sont pas par nature étran­gères au dis­cours. On peut bien les qua­li­fier de « pré­dis­cur­sives », mais à condi­tion d’ad­mettre que ce pré­dis­cur­sif est encore du dis­cur­sif, c’est-à-dire qu’elles ne spé­ci­fient pas une pen­sée, ou une conscience ou un ensemble de repré­sen­ta­tions qui seraient, après coup et d’une façon jamais tout à fait néces­saire, trans­crits dans un dis­cours, mais qu’elles carac­té­risent cer­tains niveaux du dis­cours, qu’elles défi­nissent des règles qu’il actua­lise en tant que pra­tique sin­gu­lière. On ne cherche donc pas à pas­ser du texte à la pen­sée, du bavar­dage au silence, de l’ex­té­rieur à l’in­té­rieur, de la dis­per­sion spa­tiale au pur recueille­ment de l’ins­tant, de la mul­ti­pli­ci­té super­fi­cielle à l’u­ni­té pro­fonde. On demeure dans la dimen­sion du dis­cours.

Avant d’a­voir affaire, en toute cer­ti­tude, à une science, ou à des romans, ou à des dis­cours poli­tiques, ou à l’œuvre d’un auteur ou même à un livre, le maté­riau qu’on a à trai­ter dans sa neu­tra­li­té pre­mière, c’est une popu­la­tion d’é­vé­ne­ments dans l’es­pace du dis­cours en géné­ral. Ainsi appa­raît le pro­jet d’une des­crip­tion des évé­ne­ments dis­cur­sifs comme hori­zon pour la recherche des uni­tés qui s’y forment. Cette des­crip­tion se dis­tingue faci­le­ment de l’a­na­lyse de la langue. Certes, on ne peut éta­blir un sys­tème lin­guis­tique (si on ne le construit pas arti­fi­ciel­le­ment) qu’en uti­li­sant un cor­pus d’é­non­cés, ou une col­lec­tion de faits de dis­cours ; mais il s’a­git alors de défi­nir, à par­tir de cet ensemble qui a valeur d’é­chan­tillon, des règles qui per­mettent de construire éven­tuel­le­ment d’autres énon­cés que ceux-là : même si elle a dis­pa­ru depuis long­temps, même si per­sonne ne la parle plus et qu’on l’a res­tau­rée sur de rares frag­ments, une langue consti­tue tou­jours un sys­tème pour des énon­cés pos­sibles : c’est un ensemble fini de règles qui auto­rise un nombre infi­ni de per­for­mances. Le champ des évé­ne­ments dis­cur­sifs en revanche est l’en­semble tou­jours fini et actuel­le­ment limi­té de seules séquences lin­guis­tiques qui ont été for­mu­lées ; elles peuvent bien être innom­brables, elles peuvent bien, par leur masse, dépas­ser toute capa­ci­té d’en­re­gis­tre­ment, de mémoire ou de lec­ture : elles consti­tuent cepen­dant un ensemble fini. La ques­tion que pose l’a­na­lyse de la langue, à pro­pos d’un fait de dis­cours quel­conque, est tou­jours : selon quelles règles tel énon­cé a‑t-il été construit, et par consé­quent selon quelles règles d’autres énon­cés sem­blables pour­raient-ils être construits ? La des­crip­tion des évé­ne­ments du dis­cours pose une tout autre ques­tion : com­ment se fait-il que tel énon­cé soit appa­ru et nul autre à sa place ?

O Piazza Bologna in Rom ! Banca Nazionale Del
Lavoro und Banco Di Santo Spirito, Pizza Mozzarella
Barbiere, Gomma Sport ! Gipsi Boutique und Willi,
Tavola Calda, Esso Servizio, Fiat, Ginnastica,

Estetica, Yoga, Sauna ! O Bar Tabacci und Gelati,
breite Hintern in Levi’s Jeans, Brüste oder Titten,
alles fest, ein­gek­lemmt, Pasticceria, Marcelleria !
O kleine Standlichter, Vini, Oli, Per Via Aerea,

Eldora Steak, Tecnotica Caruso ! O Profumeria
Estivi, Chiuso Per Ferie Agosto, o Lidia Di Firenze,
Lady Wool ! Cinestop ! Grüner Bus ! O Linie 62 und 6,
das Kleingeld ! O Avanti grün ! O wo ? P.T. und Tee Fredo,

Visita Da Medico Ocultista, Lenti A Contatto !
O Auto Famose ! Ritz Cräcker, Nuota Con Noi, o Grazie !
Tutte Nude ! O Domenica, Abfälle, Plastiktüten, rosa !
Vacanze Carissime, o Nautica ! Haut, Rücken, Schenkel

gebräunt, o Ölfleck, Ragazzi, Autovox, Kies ! Und Oxford,
Neon, Il Gatto Di Brooklyn Aspirante Detective, Melone !
Mauern ! Mösen ! Knoblauch ! Geriebener Parmigiano !
O dunk­ler Minimarket Di Frutta, Istituto Pirandello, Inglese

Shenker, Rolläden ! O gelb­brau­ner Hund ! Um die Ecke
Banca Commerziale Italia, Flöhe, Luftdruckbremsen, BP
Coupons, Zoom ! O Eva Moderna, Medaglioni, Tramezzini,
Bollati ! Aperto ! Locali Provvisori ! Balkone, o Schatten

mit Öl, Blätter, Trasferita ! O Ente Communale Di
Consumo, an der Wand ! O eisern ges­chlos­sene Bar Ferranzi !
O Straßenstille ! Guerlain, Hundeköttel, Germain Montail !
O Bar Fascista Riservata Permanente, Piano ! O Soldaten,

Operette, Revolver gegen Hüften ! O Super Pensione !
O Tiergestalt ! O Farmacia Bologna, kaputte Hausecke,
Senso Unico ! O Scusi ! O Casa Bella ! O Ultimo Tango
Pomodoro ! O Sciopero ! O Lire ! O Scheiß !

,
« Hymne auf einen ita­lie­ni­schen Platz » Künstliches Licht
, , ,
p. 110–111

Hier steht ein Gedicht ohne einen Helden.
In die­sem Gedicht gibts keine Bäume. Kein Zimmer
zum Hineingehen und Schlafen ist hier in dem
Gedicht. Keine Farbe kannst du in die­sem

Gedicht hier sehen. Keine Gefühle sind
in dem Gedicht. Nichts ist in die­sem Gedicht
hier zum Anfassen. Es gibt keine Gerüche hier in
die­sem Gedicht. Keiner braucht über einen Zaun

oder über eine Mauer in die­sem Gedicht zu klet­tern.
Es gibt in die­sem Gedicht hier nichts zu füh­len.
Das Gedicht hier kannst du nicht über­zie­hen.
Es ist nicht aus Gummi. Kein weißer Schatten

ist in dem Gedicht hier. Kein Mensch kommt
hier in die­sem Gedicht von einer Reise zurück.
Kein Mensch kommt in die­sem Gedicht hier atem­los
die Treppe herauf. Das Gedicht hier macht keine

Versprechungen. In dem Gedicht stirbt auch kei­ner.
In die­sem Gedicht spürst du kei­nen Hauch. Es gibt
kei­nen Laut der Freude in dem Gedicht hier. Kein
Mensch ist in dem Gedicht hier verz­wei­felt. Hier

in dem Gedicht ist es ganz still. Niemand
klagt in die­sem Gedicht. Niemand redet hier
in dem Gedicht. Hier in die­sem Gedicht schla­gen
sich auch keine Arbeiter wund. Das Gedicht hier

steht ein­fach nur hier. Es enthält keine Schlüssel
zum Aufschließen von Türen. Es gibt keine Türen
in die­sem Gedicht. Das Gedicht hier ist ohne
Musik. Es singt kei­ner in die­sem Gedicht, und

kei­ner macht hier in die­sem Gedicht jeman­den
nach. Keiner schreit hier in dem Gedicht, flucht,
fickt, ißt und nimmt ein Rauschmittel. Es gibt in
die­sem Gedicht keine bom­bas­tische Ausstattung

für dich. Das Gedicht hier geht nicht, liegt nicht,
schläft nicht, es kennt kei­nen Tag, es kennt keine
Nacht. Du brauchst hier in die­sem Gedicht keine
Rechnungen zu bezah­len. Es gibt kei­nen Hausbesitzer

in dem Gedicht hier, der die Miete erhöht. Es gibt
keine Firmen in die­sem Gedicht. Es gibt in dem
Gedicht kei­nen Staat Kalifornien. Es gibt kein
Oregano in dem Gedicht. In die­sem Gedicht gibts

kein Meer. Du kannst in dem Gedicht hier nicht
schwim­men. Das Gedicht, das hier steht, enthält keine
Wärme, das Gedicht enthält keine Kälte. Das Gedicht
hier ist nicht schwarz, es hat keine Fenster und

kennt keine Angst. Das Gedicht hier zit­tert
nicht. Das Gedicht hier ist ohne Spiegel. In die­sem
Gedicht gibts auch kein Spiegelei. Einen Supermarkt
gibt es hier in die­sem Gedicht nicht. Das Gedicht,

das du hier liest, hat keine Titten und keine Fohse,
das Gedicht hier ist völ­lig kör­per­los. Keiner stöhnt
hier in dem Gedicht. Das Gedicht blu­tet nicht, es
ver­sch­weigt nichts, das Gedicht hat keine Regel,

das Gedicht ist kein Zitat, für kei­nen. Hier in
die­sem Gedicht fin­det nie­mand einen Pfennig,
und hier in die­sem Gedicht fährt kein Mensch mit
einem Auto. Keine Reifen quiet­schen um die Ecke.

In die­sem Gedicht lut­scht nie­mand zärt­lich an
einem Schwanz. Es gibt hier in dem Gedicht keine
Lampen. Das Gedicht ist kein gel­ber Schal. Das
Gedicht, auf das du hier schaust, hus­tet nicht.

Hier in dem Gedicht kannst du nicht küs­sen.
Hier in die­sem Gedicht wird auch nicht gepißt. Du
kannst mit die­sem Gedicht nichts anfan­gen. Das
Gedicht bes­teht aus lau­ter Verneinungen. Die

Verneinungen in die­sem Gedicht wer­den immer mehr.
Hier gibts kei­nen Kiff in dem Gedicht. In die­sem
Gedicht lacht kein Mensch. Das Gedicht kennt keine
Arbeit. Niemand sieht in die­sem Gedicht Fernsehen.

Das Gedicht trägt keine Uhr. Das Gedicht ist nicht
zeit­los. Es braucht soviel Zeit, wie du brauchst,
um das Gedicht hier zu lesen. Kein Wasserhahn
tropft in dem Gedicht hier, und kei­ner ver­langt

in dem Gedicht hier nach Zigaretten. Hier das
Gedicht gibt kein Trinkgeld. Keine Toilette ist
hier in dem Gedicht. Es gibt keine Stadt in die­sem Gedicht.
Hier in dem Gedicht wäscht kei­ner sich die

Füße. In die Schule zu gehen, ist hier in dem Gedicht
nicht nötig. In dem Gedicht leckt auch kei­ner eine
Möhse. Dein Geschlechtsteil rich­tet sich hier in
dem Gedicht nicht auf. Du kannst hier in dem Gedicht

dich nicht hin­set­zen und den­ken. Das Gedicht hier
ist nicht der Staat. Es ist nicht die Gesellschaft.
Es ist kein Flipperautomat. Das Gedicht hier hat
kei­nen Hund. Mit die­sem Gedicht kann sich kei­ner

iden­ti­fi­zie­ren. Keine Polizisten fah­ren in die­sem
Gedicht herum und suchen nach einem Bruch. Eine Kuh
liegt hier in die­sem Gedicht nicht. Das Gedicht hier
ist nicht gedan­ken­los. Das Gedicht hier ist nicht

gedan­ken­voll. In dem Gedicht erscheint auch kein
Sommertag. Es ist nie­mals Dienstag in die­sem Gedicht,
es gibt kei­nen Mittwoch in die­sem Gedicht, es herr­scht
nicht Freitag in die­sem Gedicht und kein Donnerstag

fehlt in dem Gedicht hier. Es ist nicht Montag,
Samstag und Sonntag in hier dem Gedicht. Das Gedicht
hier ist nicht die Verneinung von Montag oder
Donnerstag. Das Gedicht hört hier ein­fach auf.

Die Geschichtenerzähler machen wei­ter, die Autoindustrie macht wei­ter, die Arbeiter machen wei­ter, die Regierungen machen wei­ter, die Rock’n’Roll-Sänger machen wei­ter, die Preise machen wei­ter, das Papier macht wei­ter, die Tiere und Bäume machen wei­ter, Tag und Nacht macht wei­ter, der Mond geht auf, die Sonne geht auf, die Augen gehen auf, Türen gehen auf, der Mund geht auf, man spricht, man macht Zeichen, Zeichen an den Häuserwänden, Zeichen auf der Straße, Zeichen in den Maschinen, die bewegt wer­den, Bewegungen in den Zimmern, durch eine Wohnung, wenn nie­mand außer einem selbst da ist, Wind weht altes Zeitungspapier über einen lee­ren grauen Parkplatz, wilde Gebüsche und Gras wach­sen in den lie­gen­ge­las­se­nen Trümmergrundstücken, mit­ten in der Innenstadt, ein Bauzaun ist blau ges­tri­chen, an den blauen Bauzaun ist ein Schild gena­gelt, Plakate ank­le­ben Verboten, die Plakate, Bauzäune und Verbote machen wei­ter, die Fahrstühle machen wei­ter, die Häuserwände machen wei­ter, die Innenstadt macht wei­ter, die Vorstädte machen wei­ter. Einmal sah ich eine Reklame für elek­trische Schreibmaschinen in einem Schaufenster, worin Büromöbel aus­ges­tellt waren. Ein Comicbildchen zeigte, wie jemand Zeichen in eine Steinplatte schlug, und eine Fotografie zeigte eine Schreibmaschine. Ich war ver­blüfft. Wo ist der Unterschied, fragte ich mich. Sie woll­ten mir doch damit einen Unterschied klar machen. Hier sitze ich, an der Schreibmaschine, und schlage Wörter auf das Papier, allein, in einem klei­nen engen Mittelzimmer einer Altbauwohnung, in der Stadt. Es ist Samstagnachmittag, es ist Sonntag, es ist Montag, es ist Dienstagmorgen, es ist Mittwoch, es ist Donnerstag, es ist Freitagnachmittag, es ist Samstag und Sonntag. Es ist ein ers­taun­liches Gefühl, meine ich, das den Verstand ers­taunt. Nun erin­nere ich mich, an mich selbst, und da gehe ich eine lange Strecke zurück, gehe|über warme Asphaltschichten von Seitenstraßen, die Turnschuhe kle­ben daran, aus einer Musikbox, ganz weit zurück, kommt Rock’n’Roll-Musik und läßt mich die latei­nische Übersetzung ver­ges­sen. Ich haue ab, trete über verhar­schte Wiesen im Winter, auße­rhalb des Ortes, schleppe die Schultasche mit den Büchern mit mir herum, bis Mittag ist und ich zum Mittagessen kann, hell­weiße kalte Vormittage in Norddeutschland mit den Wetterberichten nach den Nachrichten. Zwischen den weißen, fri­schen, zusam­men­ge­leg­ten Bettlaken im Schlafzimmerschrank lag immer eine kleine matt­sch­warz glän­zende Pistole, bequem für eine Handtasche. Und wie war das Wetter, als ich gebo­ren wurde ? Meine Eltern waren jung, sie spra­chen deutsch. Ich mußte das erst ler­nen, man wächst immer in eine schon ges­pro­chene Welt rein. Das Lernen macht wei­ter. Deutsch macht wei­ter. Wiesen im Winter und warme Asphaltstraßen machen wei­ter, die Straßenecke macht wei­ter, die Wetterberichte machen wei­ter, die Bücher machen wei­ter, Pistolen, Schultaschen, Turnschuhe machen wei­ter. Die Nachrichtensprecher machen wei­ter. Der Sonntag macht wei­ter. Der Montag macht wei­ter. Der Postbote macht wei­ter. Der Dill macht wei­ter, und die Blätter machen wei­ter, die Zwiebeln, die Kuh, die Steine, der Film. Der Schallplattenspieler, repa­riert, macht wei­ter. Auch die Interpretationen machen wei­ter. Es sind die Bücher. Ich muß bei die­sem Satz sehr lachen. Das Lachen ist ange­nehm. Als ich in einem gräß­lich ein­ge­rich­te­ten Apartment in Austin mor­gens gegen fünf Uhr auf dem voll­ge­pack­ten Koffer kniete und die Kofferschlösser zuzu­krie­gen ver­suchte, hörte ich aus dem Radio ein Lied, das mir sofort, nach­dem es ange­fan­gen hatte, gefiel. Ich stelle das Lied, so wie ich es nach der Schallplatte auf­ges­chrie­ben habe, als erstes Gedicht hie­rher, denn mir gefällt es noch immer, und ich denke, daß das Lied gut als Zitat für meine Gedichte paßt. Der Beifall macht wei­ter, die Wörter machen wei­ter, die Knöpfe machen wei­ter, der Stoff macht wei­ter, das Marihuana macht wei­ter, was hat die Grammatik mit Marihuana zu tun ? Das Marihuana war sanft und wür­zig. Die teue­ren Vororte sind durch Stille gesi­chert. Manchmal gibt es dort keine Fußgängerwege, und nur manch­mal sieht man, beim Hindurchgehen, ein erhelltes Fenster, ganz oben, unterm Dach. Davor wer­den Bäume bewegt. Im Moment habe ich kei­nen Hunger, obwohl ich weiß, daß der Hunger wei­ter­macht, der Moment wei­ter­macht, die Erde wei­ter­macht, die sozia­len Lagen machen wei­ter, und der Hund, der in der Nachbarwohnung ein­ges­perrt ist und schon den gan­zen Morgen bellt, macht wei­ter. »Die Erklärung ist sinn­los. Der Finger ist spra­chlos«, wie R.D. Laing sagt. Ich blät­tere durch Bücher. Ich fliege etwas und sehe : »So wie der Nahrungstrieb sich sub­jek­tiv als Hunger und objek­tiv als »Tendenz« zur Erhaltung des Individuums prä­sen­tiert, so der Sexualtrieb sub­jek­tiv als Bedürfnis nach Sexualbefriedigung und objek­tiv als »Tendenz« zur Erhaltung der Art. Diese objek­ti­ven Tendenzen< sind aber keine kon­kre­ten Gegebenheiten, son­dern bloß Annahmen. Es gibt in Wirklichkeit eben­so­we­nig eine Tendenz zur Erhaltung der Art wie eine solche zur Erhaltung des Individuums.« Erstaunlicher Wilhelm Reich, schöne Sexualität, die wei­ter­macht, und tatsä­chlich, Utopia ist eine Kiste. Das Geld macht wei­ter, und die Zusammenbrüche, wie die Songs wei­ter­ma­chen. Ich hätte gern viele Gedichte so ein­fach ges­chrie­ben wie Songs. Leider kann ich nicht Gitarre spie­len, ich kann nur Schreibmaschine schrei­ben, dazu nur stot­ternd, mit zwei Fingern. Vielleicht ist mir aber manch­mal gelun­gen, die Gedichte ein­fach genug zu machen, wie Songs, wie eine Tür auf­zu­ma­chen, aus der Sprache und den Festlegungen raus. Mag sein, daß deutsch bald eine tote Sprache ist. Man kann sie so schlecht sin­gen. Man muß in die­ser Sprache meis­tens immer­zu den­ken, und an einer Stelle hörte ich, wie jemand fluchte : Ihr Deutschen mit Euren Todeswünschen, wenn Ihr sprecht ! Bezogen auf die Erfindung der Psychoanalyse stimmt das. Was für Entzückungen eine Straße ent­lang­zu­ge­hen, wäh­rend die Sonne scheint. Die Gedichte, die ich hier zusam­men­ges­tellt habe, sind zwi­schen 1970 und 1974 ges­chrie­ben wor­den, zu den ver­schie­dens­ten Anlässen, an den ver­schie­de­nen Orten, ob sie gut sind ? frag­st Du. Es sind Gedichte. Auch alle Fragen machen wei­ter, wie alle Antworten wei­ter­ma­chen. Der Raum macht wei­ter. Ich mache die Augen auf und sehe auf ein weißes Stück Papier.

R.D.B. 11./12. Juli 1974, Köln

,
« Vorbemerkung » Künstliches Licht [Westwärts (1975)]
, , ,
p. 98–101
Idée fixe

Contrairement à ce qui se passe dans le men­tisme, l’idée dont il s’agit s’implante dans le front comme un clou dans le mur ; elle est tou­jours là… c’est la tache e sang qui renaît sans cesse sous la main homi­cide de Macbeth ! Elle le symp­tôme domi­nant et obli­gé de la nos­tal­gie, de la mono­ma­nie homi­cide et de la plu­part des sui­cides ; elle est l’élément des déter­mi­na­tions cri­mi­nelles et celui, par­fois, des grandes décou­vertes.

J’ai vécu dans l’intimité d’un savant fort redou­table sur le ter­rain de la dia­lec­tique, qui finit par m’avouer que toutes les fois qu’il se fai­sant les ongles des orteils, il lui par­tait du front une mul­ti­tude de fils qui s’étendaient aux extré­mi­tés de ses pieds ; fils d’autant plus nom­breux que les ciseaux avaient empié­té sur le corps de l’ongle. À mesure que celui-ci pous­sait, l’hallucination dimi­nuait, puis dis­pa­rais­sait. Mr. X… savait très bien qu’il ne s’agissait là que d’une chi­mère, mais cette chi­mère l’obsédait, et, par-des­sus tout, le mor­ti­fiait en ne lui lais­sant, pen­dant une dizaine de jours, ni repos ni trêve. C’est dans la soi­rée du 4 novembres 1856 qu’il me fit cette confes­sion ; avant de la faire, il étei­gnit sa lampe pour me dis­si­mu­ler une par­tie de sa honte. Bossuet, ce cer­veau si ferme et si satu­ré de génie, eut à sup­por­ter, dans les der­niers temps de sa vie, ce genre de fixi­té. Sa mémoire était, en dépit de lui-même, sans cesse occu­pée des Odes d’Horace. Il ne pou­vait son­ger à autre chose, il s’en plai­gnait à ses amis, et se fai­sait lire les vers du poëte pour allé­ger la peine que lui cau­sait cette néces­si­té intel­lec­tuelle.

[…]

L’idée dont je parle a sa plus grande impor­tu­ni­té durant la nuit, car alors on la sent plus épi­neuse et on la voit, sans reflet d’aucune autre, comme Damoclès voyait l’épée du tyran de Syracuse. Ce qu’il y a à noter, c’est que cette fixi­té n’a pas tou­jours lieu pen­dant le som­meil : chez moi, du moins, elle n’envahissait le rêve que de loin en loin. Mes moyens pour la miti­ger étaient de chan­ton­ner, de décla­mer les pas­sages les plus vigou­reux de nos auteurs tra­giques, de lire les mots suc­ces­sifs d’un dic­tion­naire afin d’accabler, par super­sti­tion, celui dont le sens me tor­tu­rait. Enfin, quand je ne pou­vais ni lire, ni me sou­ve­nir, je tirais de fines mèches de che­veux en vue de diri­ger mon atten­tion sur le mal que me pro­dui­sait un tel manège. Oh ! misère ! archi-misère ! J’ai dit, dans les pre­mières pages du pré­sent livre, les res­sources que je met­tais en œuvre pen­dant la jour­née afin d’écarter ce symp­tôme. La seule chose qui puisse le modi­fier, le sus­pendre et même l’anéantir, c’est la venue ins­tan­ta­née d’une per­sonne qui nous est chère.

Il m’arrivait quel­que­fois d’avoir affaire à deux idées qui se fai­saient si bien équi­libre que je ne pou­vais en choi­sir une pour sup­plan­ter l’autre. C’est ce qu’éprouvent ceux de mes pauvres pri­son­niers [Dumont est à cette époque méde­cin en pri­son, ndr] qui se savent por­tés sur le tableau des grâces ; ils sont bal­lot­tés entre le oui et le non ; c’est-à-dire entre la conti­nua­tion de leur escla­vage et la liber­té, le déses­poir et l’espérance !… lutte abo­mi­nable à laquelle j’en ai vu suc­com­ber !

Voici une remarque qui m’est propre et que j’insère en rai­son de la valeur pra­tique que je lui attri­bue. Mr de X… appar­te­nait à la haute aris­to­cra­tie et pos­sé­dait plus de cent mille livres de rentes pour sou­te­nir l’éclat de son bla­son. Marié depuis six ans, il n’avait pu se pro­cu­rer qu’un seul enfant, et encore était-ce une fille ! Le jeune ménage fut affec­té de cette peine que le bon Dieu, dans sa jus­tice, ne manque pas d’envoyer à la plu­part de ceux qui, étant dans cette condi­tion, ont un nom et une for­tune à trans­mettre ; il lui fal­lait un héri­tier… Le mari me dit un jour avec un peu d’embarras : « Docteur, que pour­rais-je donc bien faire pour don­ner un enfant de plus à ma femme ?… » Je sou­ris et mar­mot­tai : « Mais il faut, il faut… — Pardieu ! ripos­ta-t-il, soyez assu­ré que je… — Eh, mon­sieur le Comte, faites beau­coup moins… et, par-des­sus tout, faites en sorte que votre com­pagne se dégage de la constante pré­oc­cu­pa­tion que vous accu­sez ; car, à mon sens, cette pré­oc­cu­pa­tion consti­tue un véri­table élé­ment de sté­ri­li­té. » Je fai­sais là l’application de mon expé­rience en ce qui regarde les pro­duc­tions de la pen­sée, puisque j’étais sous le coup de cette véri­té que plus je cher­chais à venir à bout d’une œuvre de l’esprit, si minime qu’elle fût, et plus je m’éloignais de sa réa­li­sa­tion. Je conseillai une sépa­ra­tion de quelques mois, des bains de mer, beau­coup de dis­trac­tions prises de part et d’autre. M. de X… ne tar­da pas à enton­ner le Nunc dimit­tis.

Sous tous les rap­ports ont doit se défier de l’idée fixe, si douce qu’elle puisse quel­que­fois se pré­sen­ter. […]

Chique ner­veuse

L’idée fixe est sus­cep­tible de trans­for­ma­tion et de dépla­ce­ment. Elle sié­geait tout à l’heure sous le front, et, par une méta­stase, la voi­là sur la langue, obli­geant celle-ci à répé­ter conti­nuel­le­ment, ou à peu près, le mot qui la repré­sente. À ce phé­no­mène en sur­vient un autre, que je n’ai vu dési­gné en aucun ouvrage du genre ; c’est-à-dire que le mot, d’abstrait qu’il était, semble se maté­ria­li­ser et pro­duit la sen­sa­tion que déter­mi­ne­rait, je sup­pose, le noyau d’une cerise conser­vée dans la bouche après l’avoir dépouillé de sa pulpe. C’est ce que je nomme la chique ner­veuse. Aujourd’hui, je ne me trouve que rare­ment sou­mis à cette aber­ra­tion ; quand elle me sur­prend, c’est comme avant-cour­rière d’un accès de spleen. J’ai, en 1861, répé­té invo­lon­tai­re­ment pen­dant trois jours le nom de M. Pitre-Chevalier, que j’avais ren­con­tré des­cen­dant du châ­teau. Ce phé­no­mène me sai­sit en appre­nant l’accident de voi­ture qui avait failli tuer cet homme de lettres en s’en retour­nant à Paris et que je venais de voir au Mont-Saint-Michel. De sem­blables mots n’ont rien de pénible, si ce n’est en ce qu’ils témoignent d’une irré­gu­la­ri­té phy­sio­lo­gique ; tan­dis qu’il n’en est pas de même à l’égard de ceux qui expriment mes plus grands objets de notre répu­gnance. Ceux-ci reten­tissent dans l’universalité de nos sen­sa­tions : tels sont, ou ont été pour moi : folie, sui­cide, téta­nos, rage, épi­lep­sie, céci­té, mort.

À l’époque dont je parle, mon mau­vais génie ne se bor­nait pas à me tra­cas­ser au moyen d’un seul mot ; il m’imposait des phrases entières. Un homme de mon voi­si­nage venait de se marier en délais­sant une jeune fille qu’il avait trom­pée ain­si que l’enfant qui était né de leur com­merce. Ce trait de félo­nie, mal­heu­reu­se­ment si com­mun et si impu­ni, avait don­né lieu à une scène popu­laire que j’approuvais tant elle me sem­blait légi­time. Or, ce dis­tique de Victor Hugo me reve­nant à la pen­sée, je le répé­tai à tout ins­tant durant près de trois semaines.

Ah ! n’insultez jamais une femme qui tombe…
Qui sait sous quel far­deau sa pauvre âme suc­combe !…

Eh bien, mes maîtres, que dites-vous de ces vétilles, de ces minu­ties dont le méca­nisme échappe à votre inves­ti­ga­tion tout autant que les plus effrayants et les plus mor­tels désordres ? Pour ceux-ci comme pour les autres, mieux vaut s’en tenir à l’avis de Rabelais, qui est : de « se aller frot­ter le cul aux pani­cauts, » plu­tôt que de se mor­fondre sur de pareils mys­tères. Ne vous deman­dez pas com­ment cela peut être ; recon­nais­sez – c’est tout ce que je sol­li­cite – que cela EST, et faites-en part à vos dis­ciples. […]