De ce « com­mun », le com­mu­nisme comme son nom l’indique a vou­lu être l’expression et la légi­ti­mi­té conduc­trice. En tant qu’il était un tel pro­jet, il échap­pait aux cri­tères tra­di­tion­nels de légi­ti­ma­tion, révo­quant tous les pou­voirs ins­ti­tués, appe­lant l’humanité à ver­ser en bloc dans le par­tage. Mais ce pro­jet, mal­gré toute la vio­lence de rup­ture qui en accom­pagne l’éclosion, le com­mu­nisme ne l’a pas tiré de nulle part. Le com­mu­nisme non seule­ment pro­vient de la phi­lo­so­phie, mais pro­vient aus­si (ou dérive, ou bifurque à l’intérieur) de toute une tra­di­tion qui se confond avec la tra­di­tion même de l’Occident, où la recherche d’un « com­mun » trame depuis l’origine la tota­li­té de l’activité poli­tique et reli­gieuse : tout l’ontothéologique se déverse dans cette quête d’un « com­mun », dans cette recherche d’une puis­sance mas­sive de convo­ca­tion. Le com­mu­nisme n’apparaît au fond que comme l’effort (déme­su­ré, gauche, bru­tal) de rabattre les motifs d’une telle convo­ca­tion dans l’unique rumeur d’une huma­ni­té déli­vrée de la trans­cen­dance, ne trou­vant plus hors d’elle-même mais en elle-même le tenon de son uni­té. Le com­mu­nisme rend effec­tif dans l’ordre poli­tique le pas­sage qui conduit l’Occident de La Divine Comédie à La Comédie humaine. Ce pas­sage, le capi­ta­lisme l’a effec­tué dans l’ordre éco­no­mique et social – et ce qu’étudie le livre qu’est Le Capital, c’est le nou­veau fonc­tion­ne­ment qui résulte de ce pas­sage et de cette redis­tri­bu­tion sau­vages – mais le mar­xisme est le mou­ve­ment qui cherche à tirer la consé­quence poli­tique logique de cette redis­tri­bu­tion.

C’est la suc­ces­sion pure et simple, la repro­duc­tion de la diver­si­té oppres­sante de la vie sous une forme uni­di­men­sion­nelle, comme dirait un mathé­ma­ti­cien, qui nous ras­sure ; l’alignement de tout ce qui s’est pas­sé dans l’espace et le temps le long d’un fil, ce fameux « fil du récit » jus­te­ment, avec lequel finit par se confondre le fil de la vie. Heureux celui qui peut dire « lorsque », « avant que » et « après que » ! Il peut bien lui être arri­vé mal­heur, il peut s’être tor­du dans les pires souf­frances : aus­si­tôt qu’il est en mesure de repro­duire les évé­ne­ments dans la suc­ces­sion de leur dérou­le­ment tem­po­rel, il se sent aus­si bien que si le soleil lui brillait sur le ventre. C’est ce dont le roman a tiré habi­le­ment pro­fit : le voya­geur peut che­vau­cher à tra­vers les cam­pagnes sous des trombes d’eau ou faire cra­quer la neige sous ses semelles par moins vingt degrés, le lec­teur se sent à son aise. Ce serait assez dif­fi­cile à com­prendre si cet éter­nel tour de passe-passe de l’art nar­ra­tif, à quoi même les nour­rices recourent pour cal­mer les enfants, si cette « pers­pec­tive de l’intelligence », ce « rac­cour­cis­se­ment des dis­tances » ne fai­saient déjà par­tie inté­grante de la vie. La plu­part des hommes sont, dans leur rap­port fon­da­men­tal avec eux-mêmes, des nar­ra­teurs. Ils n’aiment pas la poé­sie, ou seule­ment par moments. Même si quelques « parce que » et « pour que » se mêlent ici et là au fil de la vie, ils n’en ont pas moins en hor­reur toute réflexion qui tente d’aller au-delà. Ils aiment la suc­ces­sion bien réglée des faits parce qu’elle a toutes les appa­rences de la néces­si­té, et l’impression que leur vie suit un « cours » est pour eux comme un abri dans le chaos. Ulrich s’apercevait main­te­nant qu’il avait per­du le sens de cette nar­ra­tion pri­mi­tive à quoi notre vie pri­vée reste encore atta­chée bien que tout, dans la vie publique, ait déjà échap­pé à la nar­ra­tion et, loin de suivre un fil, s’étale sur une sur­face sub­ti­le­ment entre­tis­sée.

Es ist die ein­fache Reihenfolge, die Abbildung der überwäl­ti­gen­den Mannigfaltigkeit des Lebens in einer ein­di­men­sio­na­len, wie ein Mathematiker sagen würde, was uns beru­higt ; die Aufreihung alles des­sen, was in Raum und Zeit ges­che­hen ist, auf einen Faden, eben jenen berühm­ten »Faden der Erzählung«, aus dem nun also auch der Lebensfaden bes­teht. Wohl dem, der sagen kann »als«, »ehe« und »nach­dem«! Es mag ihm Schlechtes wider­fah­ren sein, oder er mag sich in Schmerzen gewun­den haben : sobald er imstande ist, die Ereignisse in der Reihenfolge ihres zeit­li­chen Ablaufes wie­der­zu­ge­ben, wird ihm so wohl, als schiene ihm die Sonne auf den Magen. Das ist es, was sich der Roman künst­lich zunutze gemacht hat : der Wanderer mag bei strö­men­dem Regen die Landstraße rei­ten oder bei zwan­zig Grad Kälte mit den Füßen im Schnee knir­schen, dem Leser wird beha­glich zumute, und das wäre schwer zu begrei­fen, wenn die­ser ewige Kunstgriff der Epik, mit dem schon die Kinderfrauen ihre Kleinen beru­hi­gen, diese bewähr­teste »pers­pek­ti­vische Verkürzung des Verstandes« nicht schon zum Leben selbst gehörte. Die meis­ten Menschen sind im Grundverhältnis zu sich selbst Erzähler. Sie lie­ben nicht die Lyrik, oder nur für Augenblicke, und wenn in den Faden des Lebens auch ein wenig »weil« und »damit« hinein­geknüpft wird, so verab­scheuen sie doch alle Besinnung, die darü­ber hinaus­greift : sie lie­ben das ordent­liche Nacheinander von Tatsachen, weil es einer Notwendigkeit gleich­sieht, und füh­len sich durch den Eindruck, daß ihr Leben einen »Lauf« habe, irgend­wie im Chaos gebor­gen. Und Ulrich bemerkte nun, daß ihm dieses pri­mi­tive Epische abhan­den gekom­men sei, woran das pri­vate Leben noch fes­thält, obgleich öffent­lich alles schon unerzäh­le­risch gewor­den ist und nicht einem »Faden« mehr folgt, son­dern sich in einer unend­lich ver­wo­be­nen Fläche aus­brei­tet.

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t. 1
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chap. 122  : « Le retour »
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trad.  Philippe Jaccottet
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p. 858–859

Il croit qu’il est pos­sible de pro­duire syn­thé­ti­que­ment une vie juste, comme on fabrique du caou­tchouc ou de l’azote.

[E]r glaubt daran, daß es eine Art syn­the­ti­scher Erzeugung des rich­ti­gen Lebens gibt, so wie man einen syn­the­ti­schen Kautschuk oder Stickstoff hers­tel­len kann […].

 

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t. 1
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chap. 116  : « Les deux arbres de la vie. Ulrich réclame la créa­tion d’un Secrétariat géné­ral de l’Âme et de la Précision. »
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trad.  Philippe Jaccottet
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p. 792

À ce moment-là, une fois de plus, Ulrich inter­pré­tait à sa manière les mots vio­lence et amour. Le mot vio­lence conte­nait tous ses pen­chants au mal et à la dure­té ; il était l’effluence de toute conduite scep­tique, objec­tive, lucide. Sans doute un cer­tain goût de la vio­lence froide et bru­tale avait-il joué jusque dans le choix de sa pro­fes­sion, si bien qu’Ulrich n’était peut-être pas deve­nu mathé­ma­ti­cien sans quelque inten­tion de cruau­té. Tout cela était touf­fu comme le feuillage d’un arbre qui dis­si­mule le tronc lui-même. D’autre part, lorsqu’on ne parle pas sim­ple­ment de l’amour dans le sens cou­rant du mot, mais qu’en l’entendant on aspire à un état qui se dis­tingue, jusque dans les moindres atomes de notre corps, de la misère du non-amour, lorsqu’on se sent à la fois doué et dépour­vu de toutes les qua­li­tés, lorsqu’on a constam­ment l’impression que c’est « tou­jours la même his­toire », les mêmes évé­ne­ments qui se repro­duisent, parce que la vie (pleine à cra­quer de la fier­té de sa pré­sence « ici et main­te­nant », mais en fin de compte si incer­taine, si par­fai­te­ment irréelle !) se pré­ci­pite imman­qua­ble­ment dans les deux ou trois dou­zaines de moules à cake qui consti­tuent la réa­li­té, lorsqu’on estime que manque un mor­ceau à tous les cercles dans les­quels nous tour­nons, que de tous les sys­tèmes que nous avons ins­ti­tués, aucun ne pos­sède le secret du repos, alors, toutes ces choses qui semblent si dif­fé­rentes se confondent elles aus­si comme les branches d’un arbre qui dis­si­mulent de toutes parts le tronc.

In die­sem Augenblick waren Gewalt und Liebe für Ulrich wie­der nicht ganz die gewöhn­li­chen Begriffe. Alles, was er an Neigung zum Bösen und Harten besaß, lag in dem Wort Gewalt, es bedeu­tete den Ausfluß jedes ungläu­bi­gen, sachli­chen und wachen Verhaltens ; hatte doch eine gewisse harte, kalte Gewalttätigkeit auch bis in seine Berufsneigungen hinein­ge­spielt, so daß er viel­leicht nicht ganz ohne eine Absicht auf das Grausame Mathematiker gewor­den war. Das hing zusam­men wie das Dickicht eines Baums, das den Stamm selbst ver­deckt. Und wenn man von Liebe nicht bloß im übli­chen Sinn spricht, son­dern sich bei ihrem Namen nach einem Zustand sehnt, der bis in die Atome des Körpers anders ist als der Zustand der Liebesarmut ; oder wenn man fühlt, daß man eben­so­gut jede Eigenschaft an sich hat wie keine ; oder wenn man unter dem Eindruck steht, daß nur Seinesgleichen ges­chieht, weil das Leben – zum Platzen voll Einbildung auf sein Hier und Jetzt, letz­ten Endes aber ein sehr unge­wis­ser, ja aus­ges­pro­chen unwirk­li­cher Zustand ! – sich in die paar Dutzend Kuchenformen stürzt, aus denen die Wirklichkeit bes­teht ; oder daß an allen Kreisen, in denen wir uns dre­hen, ein Stück fehlt ; daß von allen Systemen, die wir errich­tet haben, keines das Geheimnis der Ruhe besitzt : so hängt auch das, so ver­schie­den es aus­sieht, zusam­men wie die Äste eines Baums, die nach allen Seiten den Stamm ver­ber­gen.

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t. 1
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chap. 116  : « Les deux arbres de la vie. Ulrich réclame la créa­tion d’un Secrétariat géné­ral de l’Âme et de la Précision. »
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trad.  Philippe Jaccottet
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p. 784–785

Pour on ne sait quelle rai­son, Ulrich avait l’impression, bien que ce fût la fin de l’hiver, de contem­pler une de ces nuits d’octobre où la fraî­cheur est encore douce, et il lui sem­blait que la ville y fût rou­lée comme dans une immense, cou­ver­ture. Puis, il pen­sa qu’on pou­vait tout aus­si bien dire d’une cou­ver­ture qu’elle res­semble à une nuit d’octobre.

Aus irgen­dei­nem Grund hatte Ulrich auf das stärkste den Eindruck, in eine mild­kalte Oktobernacht hinaus­zus­tar­ren, obgleich es Spätwinter war, und es kam ihm vor, die Stadt sei in sie ein­gehüllt wie in eine unge­heure Wolldecke. Dann fiel ihm ein, daß man eben­so­gut von einer Wolldecke sagen könnte, sie sei wie eine Oktobernacht.

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chap. 115  : « La pointe de tes seins est comme un pétale de pavot »
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trad.  Philippe Jaccottet
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p. 770

Quelle est donc cette vie qu’il fau­drait de loin en loin per­fo­rer de récréa­tions ? Ferions-nous des trous dans un tableau sous pré­texte que sa beau­té exige de nous trop d’efforts ? A‑t-on pré­vu des vacances dans la béa­ti­tude éter­nelle ? Je vous avoue que l’idée même du som­meil m’est par­fois désa­gréable.

Welch ein Leben, das man zeit­wei­lig mit Erholungen dur­chlö­chern muß ! Würden wir in ein Bild Löcher stoßen, weil es zu schöne Ansprüche an uns stellt?! Sind in der ewi­gen Seligkeit etwa Urlaubswochen vor­ge­se­hen ? Ich ges­tehe Ihnen, daß mir sogar die Vorstellung des Schlafs manch­mal unan­ge­nehm ist.

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t. 1
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chap. 114  : « Une crise menace. Arnheim cour­tise le géné­ral Stumm. Diotime prend des mesures pour se rendre dans l’Illimité. Ulrich brode sur la pos­si­bi­li­té de vivre comme on lit. »
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trad.  Philippe Jaccottet
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p. 762

« [Q]ue faites-vous, en lisant ? Je vous répon­drai tout de suite : vos opi­nions omettent ce qui ne leur agrée pas. L’auteur a déjà fait de même. Rêvant ou rêvas­sant, vous omet­tez éga­le­ment. Je constate donc ceci : la beau­té ou l’émotion entrent dans le monde par l’omission. Notre atti­tude au sein de la réa­li­té est évi­dem­ment un com­pro­mis, un état moyen dans lequel les sen­ti­ments s’empêchent mutuel­le­ment d’atteindre au déploie­ment de la pas­sion et se perdent dans la gri­saille ; les enfants, qui ignorent encore cette atti­tude, sont donc plus heu­reux et plus mal­heu­reux que les adultes. Et j’ajouterai tout de suite que les gens bêtes omettent aus­si ; on sait bien que la bêtise rend heu­reux. Voici donc ma pre­mière pro­po­si­tion : que nous essayions de nous aimer comme si vous et moi étions les per­son­nages d’un poète qui se ren­contrent dans les pages de son livre. Négligeons donc, en tout cas, cette enve­loppe de graisse qui vous fait croire que la réa­li­té est chose toute ronde. »

»Was tun Sie da ? Ich will gleich die Antwort geben : Ihre Auffassung läßt aus, was Ihnen nicht paßt. Das gleiche hat schon der Autor getan. Ebenso las­sen Sie im Traum oder in der Phantasie aus. Ich stelle also fest : Schönheit oder Erregung kommt in die Welt, indem man fortläßt. Offenbar ist unsere Haltung inmit­ten der Wirklichkeit ein Kompromiß, ein mit­tle­rer Zustand, worin sich die Gefühle gegen­sei­tig an ihrer lei­den­schaft­li­chen Entfaltung hin­dern und ein wenig zu Grau mischen. Kinder, denen diese Haltung noch fehlt, sind darum glü­ck­li­cher und unglü­ck­li­cher als Erwachsene. Und ich will gleich hin­zufü­gen, auch die Dummen las­sen aus ; Dummheit macht ja glü­ck­lich. Ich schlage also als erstes vor : Versuchen wir einan­der zu lie­ben, als ob Sie und ich die Figuren eines Dichters wären, die sich auf den Seiten eines Buchs bege­gnen. Lassen wir also jeden­falls das ganze Fettgerüst fort, das die Wirklichkeit rund macht.«

 

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chap. 114  : « Une crise menace. Arnheim cour­tise le géné­ral Stumm. Diotime prend des mesures pour se rendre dans l’Illimité. Ulrich brode sur la pos­si­bi­li­té de vivre comme on lit. »
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trad.  Philippe Jaccottet
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p. 761

« Avez-vous jamais vu un chien ? deman­da-t-il. Vous le croyez seule­ment ! Vous n’avez jamais vu que quelque chose qui vous est appa­ru, à plus ou moins bon droit, comme un chien. Quelque chose qui ne pos­sède pas toutes les qua­li­tés canines et qui a, au contraire, un élé­ment per­son­nel qu’aucun autre chien ne pos­sède. Comment donc pour­rions-nous jamais faire, dans la vie, ce qu’il faut faire ? Nous ne pou­vons jamais que quelque chose qui n’est jamais ce qu’il faut, mais qui est tou­jours un peu plus ou un peu moins que ce qu’il fal­lait. […] »

»Haben Sie schon je einen Hund gese­hen?« fragte er. »Das glau­ben Sie bloß ! Sie haben immer nur etwas gese­hen, das Ihnen mit mehr oder weni­ger Recht als ein Hund vor­kam. Es hat nicht alle Hundeeigenschaften, und irgen­det­was Persönliches hat es, das wie­der kein ande­rer Hund hat. Wie sol­len wir da je im Leben ›das Richtige‹ tun ? Wir kön­nen nur etwas tun, das nie­mals das Richtige und immer mehr und weni­ger als etwas Richtiges ist. […]«

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t. 1 : « 1 »
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chap. 114  : « Une crise menace. Arnheim cour­tise le géné­ral Stumm. Diotime prend des mesures pour se rendre dans l’Illimité. Ulrich brode sur la pos­si­bi­li­té de vivre comme on lit. »
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trad.  Philippe Jaccottet
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p. 759

Il s’ensuivit entre eux une conver­sa­tion qui aurait fait sur un tiers une impres­sion bizarre, assez sem­blable à celle d’une conver­sa­tion en langue verte, bien que le lan­gage uti­li­sé ici ne fût autre que le sabir de l’amour spi­ri­tuel laïque. C’est pour­quoi nous pré­fé­rons rendre l’esprit plu­tôt que la lettre de ce dia­logue.

La « com­mu­nau­té des par­faits altruistes », c’était une for­mule décou­verte par Hans ; elle était cepen­dant com­pré­hen­sible : plus un homme se sent altruiste, plus les choses du monde deviennent claires et fortes, plus il se fait léger, plus il se sent exal­té. Chacun connaît ce genre d’expériences ; mais il ne faut pas les confondre avec le conten­te­ment, la gaie­té, l’insouciance et cæte­ra, car ne ce sont là que des suc­cé­da­nés pour un usage vul­gaire, sinon même cor­rom­pu. Peut-être même devrait-on réser­ver à l’état authen­tique non pas le terme d’élévation, mais celui de « décui­ras­se­ment », « décui­ras­se­ment du Moi », expli­quait Hans. Il fal­lait dis­tin­guer entre les deux rem­parts de l’homme. L’un est déjà fran­chi chaque fois qu’il fait un acte bon ou gra­tuit, mais ce n’est là que le plus petit des deux murs. Le plus grand est bâti de l’égoïsme de l’homme même le plus altruiste ; c’est, tout bon­ne­ment, le Péché ori­gi­nel. Toute impres­sion sen­suelle, tout sen­ti­ment, même celui de l’abandon, est davan­tage, dans notre manière d’agir, une prise qu’un don, et il est presque impos­sible d’échapper à cette cui­rasse bar­dée d’égoïsme. Hans énu­mé­rait : le savoir n’est que l’appropriation d’un objet étran­ger ; on le tue ; on le déchi­quette, on le dévore comme une bête. Le concept, cadavre figé. La convic­tion, rela­tion pétri­fiée à jamais immuable. La recherche, affir­ma­tion. Le carac­tère, refus des méta­mor­phoses. La connais­sance d’un être, indif­fé­rence à son égard. L’introspection, ins­pec­tion. La véri­té, ten­ta­tive réus­sie pour pen­ser objec­ti­ve­ment et inhu­mai­ne­ment. Il y a dans tout cela un goût de meurtre et de gel, un désir de pos­ses­sion et de rigi­di­té, un mélange d’égoïsme et de dés­in­té­res­se­ment objec­tif, c’est-à-dire lâche, sour­nois, inau­then­tique ! « Et quand donc l’amour lui-même, deman­da Hans bien qu’il ne connût que l’innocente Gerda, sera-t-il autre chose que le désir de pos­ses­sion, ou d’abandon dans l’attente d’une contre­par­tie ? »

Ulrich approu­vait pru­dem­ment, amen­dant par­fois ces affir­ma­tions sou­vent inco­hé­rentes. Il était exact que même la souf­france et le des­sai­sis­se­ment de soi nous laissent tou­jours quelque argent de côté ; une pâle ombre d’égoïsme, une ombre gram­ma­ti­cale pour ain­si dire, res­te­rait atta­chée à tout acte tant qu’il n’y aurait pas d’attribut sans sujet.

Mais Hans pro­tes­ta vio­lem­ment. Lui et ses amis lut­taient pour savoir com­ment on doit vivre. Parfois ils admet­taient que cha­cun dût com­men­cer par vivre pour soi, et ensuite pour tous ; un autre jour, ils étaient convain­cus que chaque homme ne pou­vait réel­le­ment avoir qu’un ami, mais que celui-ci à son tour en avait besoin d’un autre, de sorte que la com­mu­nau­té se des­si­nait à leurs yeux comme une union des âmes en forme de cercle, à la manière du spectre solaire ou d’autres enchaî­ne­ments du même ordre ; mais de pré­fé­rence, ils croyaient qu’il exis­tait une loi psy­chique du sens com­mu­nau­taire que l’égoïsme ne fai­sait qu’obombrer, une énorme source de vie inté­rieure, inuti­li­sée encore, à laquelle ils attri­buaient des pos­si­bi­li­tés fan­tas­tiques. L’arbre qui lutte dans la forêt et que la forêt pro­tège ne peut pas avoir une plus vague conscience de lui-même, que les hommes sen­sibles d’aujourd’hui de l’obscure cha­leur de la masse, de sa puis­sance dyna­mique, des pro­ces­sus molé­cu­laires imper­cep­tibles qui assurent sa cohé­rence incons­ciente et lui rap­pellent à chaque res­pi­ra­tion que le plus grand, comme le plus petit, n’est jamais seul. Il en allait de même pour Ulrich. Sans doute voyait-il clai­re­ment que l’égoïsme dis­ci­pli­né, maî­tri­sé, sur lequel se fonde la vie, pro­duit une struc­ture orga­ni­sée, alors que le souffle de la com­mu­nau­té demeure le point d’intersection de rela­tions fort vagues ; per­son­nel­le­ment, il se sen­tait plu­tôt atti­ré par l’isolement, mais il n’en était pas moins tou­ché lorsque les jeunes amis de Gerda expo­saient leur extra­va­gante idée du grand mur qu’il fal­lait à tout prix fran­chir.

Hans, tan­tôt psal­mo­diant, tan­tôt per­cu­tant, dévi­dait les articles de sa foi, en regar­dant fixe­ment droit devant lui, sans rien voir. Une fêlure anor­male divi­sait la créa­tion et la par­ta­geait comme une pomme dont les deux moi­tiés aus­si­tôt se des­sèchent ; c’est pour­quoi l’on était contraint, aujourd’hui, de s’approprier d’une manière arti­fi­cielle et contre nature ce avec quoi l’on n’avait for­mé jadis qu’un seul être. Mais on pou­vait abo­lir cette divi­sion par une sorte d’ouverture de soi-même, un chan­ge­ment d’attitude. Plus un homme pou­vait s’oublier, s’effacer, se reti­rer de lui-même, plus il libé­re­rait de force en lui pour la com­mu­nau­té, comme s’il la déli­vrait d’une fausse rela­tion ; et en même temps, plus il se rap­pro­che­rait de la com­mu­nau­té, plus il devien­drait, inévi­ta­ble­ment, lui-même. Si l’on sui­vait Hans, on appre­nait aus­si que la véri­table ori­gi­na­li­té ne se mesu­rait pas à la simple et vaine sin­gu­la­ri­té, mais nais­sait de l’ouverture de soi-même et, pas­sant par des degrés ascen­dants de par­ti­ci­pa­tion et de dévoue­ment, attein­drait peut-être au degré suprême, à la com­mu­nau­té des altruistes par­faits, tota­le­ment absor­bés par le monde, degré que l’on pou­vait atteindre par cette voie !

En écou­tant ces phrases que rien ne sem­blait pou­voir rem­plir, Ulrich se deman­dait com­ment on pour­rait leur don­ner un conte­nu réel […]. Quand on pos­sède par­fai­te­ment cette langue, on peut conti­nuer à par­ler à l’infini sans aucun effort. On s’avance comme avec une lumière à la main, dont le rayon déli­cat tombe sur un aspect de la vie après l’autre, et l’on dirait que tous ces aspects, sous la forme ordi­naire qu’ils avaient dans la lumière quo­ti­dienne, n’ont été que de gros­siers mal­en­ten­dus. Comme la fonc­tion du mot « pos­sé­der », par exemple, paraît insou­te­nable lorsqu’on l’applique à des amants ! Mais cela tra­hit-il de plus nobles dési­rs de vou­loir pos­sé­der des prin­cipes ? le res­pect des enfants ? des connais­sances ? soi-même ? Ce geste agres­sif et bru­tal de quelque énorme bête écra­sant sa proie de tout le poids de son corps est pour­tant, à bon droit, l’expression pré­fé­rée et fon­da­men­tale du capi­ta­lisme ; ain­si appa­raît le rap­port entre les pos­sé­dants du monde bour­geois et ces pos­ses­seurs de connais­sances toutes faites en qui la bour­geoi­sie a trans­for­mé ses pen­seurs et ses artistes, alors que l’amour et l’ascèse se tiennent à l’écart, frère et sœur. Et ce frère et cette sœur, lorsqu’ils se réunissent, ne sont-ils pas sans but, oppo­sés aux buts de la vie ? Mais le terme de « but » est emprun­té au lan­gage des tireurs : être sans but ne signi­fie­rait-il donc pas, à l’origine, se refu­ser à tuer ? Ainsi, en sui­vant sim­ple­ment les traces de la langue (traces brouillées, mais révé­la­trices), on com­prend mieux déjà com­ment une gros­sière alté­ra­tion du sens a usur­pé par­tout la place de rela­tions plus cir­cons­pectes qui se sont per­dues défi­ni­ti­ve­ment. C’est là une situa­tion par­tout sen­sible, nulle part tan­gible.

Es ergab sich daraus ein Gespräch zwi­schen den bei­den, das auf einen Fernstehenden einen son­der­ba­ren Eindruck gemacht haben müßte, nicht unähn­lich der Unterhaltung in einem Verbrecherjargon, obwohl die­ser kein ande­rer war als eben die Mischsprache welt­lich-geist­li­cher Verliebtheit. Es ist darum vor­zu­zie­hen, diese Unterredung mehr dem Sinn nach wie­der­zu­ge­ben als in ihrem Wortlaut : die Gemeinschaft der vol­len­det Ichlosen, das war ein von Hans ent­decktes Wort, es ist aber trotz­dem zu vers­te­hen, denn je selbst­lo­ser sich ein Mensch fühlt, des­to hel­ler und stär­ker wer­den die Dinge der Welt, je leich­ter er sich macht, des­to mehr fühlt er sich geho­ben, und Erfahrungen von sol­cher Art kennt wohl jeder ; man darf sie bloß nicht mit Fröhlichkeit, Heiterkeit, Sorglosigkeit oder der­glei­chen ver­wech­seln, denn das sind nur ihre Ersätze für den nie­de­ren Gebrauch, wenn nicht gar für den ver­dor­be­nen. Vielleicht sollte man den ech­ten Zustand übe­rhaupt nicht Gehobenheit nen­nen, son­dern Entpanzerung ; Entpanzerung des Ich, so erklärte es Hans. Man müsse zwi­schen zwei Umwallungen des Menschen tren­nen. Die eine wird schon dann jedes­mal übers­tie­gen, wenn er etwas Gutes und Uneigennütziges tut, aber das ist nur die kleine Mauer. Die große bes­teht in der Selbsthaftigkeit noch des selbst­lo­ses­ten Menschen ; das ist schlecht­weg die Erbsünde ; jeder Sinneseindruck, jedes Gefühl, selbst das der Hingabe, ist in unse­rer Ausführung mehr ein Nehmen als ein Geben, und die­sem Panzer von Durchtränkung mit Eigensucht kann man kaum in irgen­dei­ner Weise entrin­nen. Hans zählte auf : So ist Wissen nichts als An-Eignung einer frem­den Sache ; man tötet, zer­reißt und ver­daut sie wie ein Tier. Begriff das reglos gewor­dene Getötete. Überzeugung, die nicht mehr verän­der­liche erkal­tete Beziehung. Forschung gleich Fest-Stellen. Charakter gleich Trägheit, sich zu wan­deln. Kenntnis eines Menschen soviel wie nicht mehr von ihm bewegt wer­den. Einsicht eine Sicht. Wahrheit der erfol­greiche Versuch, sachlich und unmen­schlich zu den­ken. In allen die­sen Beziehungen ist Tötung, Frost, ein Verlangen nach Eigentum und Erstarren und ein Gemisch von Eigensucht mit einer sachli­chen, fei­gen, heimtü­cki­schen, unech­ten Selbstlosigkeit ! »Und wann wäre« fragte Hans, obgleich er nur die unschul­dige Gerda kannte, »die Liebe selbst etwas anderes als der Wunsch nach Besitz oder Hingabe auf Gegenrechnung?!«

Ulrich stimmte die­sen nicht ganz ein­heit­li­chen Behauptungen vor­sich­tig und abän­dernd bei. Es sei rich­tig, daß auch das Erleiden und Sichentäußern einen Sparpfennig für uns selbst übri­glasse ; ein blas­ser, sozu­sa­gen gram­ma­ti­ka­li­scher Schatten von Egoismus bleibe auf allem Tun haf­ten, solange es keine Prädikate ohne Subjekt gebe.

Aber Hans lehnte hef­tig ab. Er und seine Freunde strit­ten, wie man leben solle. Manchmal nah­men sie an, daß jeder zunächst für sich und dann erst für alle leben müsse ; ein ander­mal waren sie über­zeugt, daß jeder ganz wah­rhaft nur einen Freund haben könne, aber die­ser doch wie­der einen ande­ren Freund brauche, wonach sich ihnen die Gemeinschaft als eine Seelenverbindung im Kreis, nach Art des Farbenspektrums oder ande­rer glied­wei­sen Verkettungen dars­tellte ; am liebs­ten aber glaub­ten sie daran, daß es ein see­lisches, von der Ichsucht bloß über­schat­tetes Gesetz des Gemeinschaftssinns gebe, eine innere, unge­heure, noch nicht aus­genützte Lebensquelle, der sie aben­teuer­liche Möglichkeiten zuschrie­ben. Nicht unge­wis­ser kann sich der Baum, im Walde kämp­fend und vom Wald gehegt, vor­kom­men, als empfän­gliche Menschen heute die dunkle Wärme der Masse, ihre Bewegungskraft, die mole­ku­lar unsicht­ba­ren Vorgänge ihres unbe­wuß­ten Zusammenhaltens emp­fin­den, die sie bei jedem Atemzug daran erin­nern, daß der Größte wie der Kleinste nicht allein sei ; so erging es auch Ulrich ; er sah wohl klar, daß der gezähmte Egoismus, aus dem sich das Leben auf­baut, ein geord­netes Gefüge ergibt, woge­gen der Atem der Gemeinsamkeit nur ein Inbegriff unk­la­rer Zusammenhänge bleibt, und er war für seine Person sogar ein zur Absonderung nei­gen­der Mensch, aber es ging ihm eigentüm­lich nahe, wenn die jun­gen Freunde Gerdas ihre aus­sch­wei­fende Behauptung von der großen Mauer auf­stell­ten, die übers­tie­gen wer­den müsse.

Hans spulte, bald leiernd, bald stoßend, die Augen, ohne zu sehen, voraus­ge­rich­tet, seine Glaubenssätze ab. Eine unnatür­liche Trennung laufe durch die Schöpfung und teile sie wie einen Apfel, des­sen beide Hälften daran aus­tro­ck­nen. Man müsse sich darum auf künst­liche und wider­natür­liche Weise heute anei­gnen, womit man vor­dem eins war. Man könne aber diese Trennung auf­he­ben, durch irgen­dein Sichöffnen, ein geän­dertes Verhalten, denn je mehr jemand sich ver­ges­sen, auslö­schen, von sich abrü­cken könne, des­to mehr Kraft für die Gemeinschaft werde in ihm frei, so als würde sie aus einer fal­schen Verbindung befreit ; und zugleich müsse er, je mehr er sich der Gemeinschaft nähere, des­to eige­ner wer­den ; denn folgte man Hans, so erfuhr man auch, daß der Grad der wah­ren Originalität nicht im eit­len Besonderssein bes­chlos­sen liege, son­dern durch das Sichöffnen ents­tehe, in stei­gende Grade des Teilnehmens und der Hingabe hinein, viel­leicht bis zu dem höchs­ten Grad einer Gemeinschaft der ganz von der Welt auf­ge­nom­me­nen, vol­len­det Ichlosen, den man auf diese Weise zu errei­chen vermöchte !

Diese schein­bar durch nichts aus­zufül­len­den Sätze ließen Ulrich träu­men, wie man ihnen einen wirk­li­chen Inhalt geben könnte […]. Man ver­mag, wenn man diese Sprache beherr­scht, in ihrer Anwendung mühe­los fort­zu­fah­ren. Man geht wie mit einem Licht in der Hand, des­sen zar­ter Strahl auf eine Beziehung des Lebens nach der ande­ren fällt, und alle sehen sie aus, als wären sie in ihrer gewöhn­li­chen Erscheinung, die sie im fes­ten Alletaglicht haben, nur rohe Mißverständnisse gewe­sen. Wie unmö­glich erscheint zum Beispiel sogleich die Gebärde des Wortes »besit­zen«, wenn man sie auf Liebende anwen­det ! Aber verrät es schö­ner anmu­tende Wünsche, daß man Grundsätze be-sit­zen möchte ? die Achtung sei­ner Kinder ? Gedanken ? sich selbst ? Diese plumpe Angriffsgebärde eines schwe­ren Tiers, das seine Beute mit dem gan­zen Körper nie­der­drückt, ist jedoch berech­tig­ter­weise der Grund- und Leibausdruck des Kapitalismus, und so zeigt sich darin der Zusammenhang zwi­schen den Besitzenden des bür­ger­li­chen Lebens und den Besitzern von Erkenntnissen und Fertigkeiten, zu denen es seine Denker und Künstler gemacht hat, wäh­rend abseits Liebe und Askese als ein ein­sames Geschwisterpaar ste­hen. Und sind diese Geschwister, wenn sie bei­sam­men stehn, nicht ziel­los und zwe­ck­los, im Gegensatz zu den Zielen und Zwecken des Lebens ? Es stam­men aber die Namen Ziel und Zweck aus der Sprache der Schützen : Bedeutet also ziel­los und zwe­ck­los in sei­nem urs­prün­gli­chen Zusammenhang nicht soviel wie kein Tötender sein ? So kommt man bloß dadurch, daß man die Spur der Sprache ver­folgt – eine ver­wi­schte, aber verrä­te­rische Spur ! – schon darauf, wie sich alle­ror­ten der roh verän­derte Sinn an die Stelle von bedacht­sa­me­ren Beziehungen gedrängt hat, die ganz ver­lo­ren­ge­gan­gen sind. Es ist das wie ein übe­rall zu füh­len­der, nir­gends zu fas­sen­der Zusammenhang […].

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t. 1
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chap. 113  : « Ulrich, s’entretenant avec Hans Sepp et Gerda, adopte le sabir de la zone fron­tière entre la sur­ra­tio­na­li­té et la sous-ratio­na­li­té »
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trad.  Philippe Jaccottet
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p. 738–743

Avoir de l’intuition était alors à la mode chez tous ceux qui n’arrivaient pas à jus­ti­fier entiè­re­ment leur acti­vi­té par la rai­son. Cela jouait à peu près le même rôle qu’en ce moment le fait d’être « dyna­mique ». Tout ce que l’on fai­sait faux, tout ce qui ne vous don­nait pas entière et pro­fonde satis­fac­tion, était jus­ti­fié sous pré­texte d’être fait pour ou par l’intuition. On recou­rait à l’intuition pour cuire un plat comme pour écrire un livre.

Intuition zu haben, war damals bei allen Leuten an der Zeit, die ihr Tun mit der Vernunft nicht recht verant­wor­ten konn­ten ; es spielte ungefähr die gleiche Rolle, die es augen­bli­ck­lich inne­hat, Tempo zu besit­zen. Alles, was man falsch machte oder was einem zu innerst nicht res­t­los gelang, wurde dadurch gerecht­fer­tigt, daß es für die Intuition oder durch sie ges­chaf­fen sei, und man benutzte Intuition sowohl zum Kochen wie zum Bücherschreiben…

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t. 1
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chap. 112  : « Arnheim range son père Samuel au nombre des dieux et décide de conqué­rir Ulrich. Soliman vou­drait en savoir davan­tage sur son royal père. »
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trad.  Philippe Jaccottet
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p. 725